Question de Mme PEROL-DUMONT Marie-Françoise (Haute-Vienne - SOCR) publiée le 09/05/2019
Mme Marie-Françoise Perol-Dumont attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur la demande d'inscription dans la Constitution de la langue des signes française, formulée par la fédération nationale des sourds de France.
La loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a donné à la langue des signes française un statut de langue de la République en la reconnaissant comme langue d'enseignement des sourds français et de leur entourage immédiat.
Néanmoins, la fédération nationale des sourds de France estime que seule une inscription de la langue des signes française dans la Constitution est de nature à permettre une réelle égalité entre les citoyens français sourds et entendants. Les sourds français rencontrent de nombreux obstacles dans leur vie quotidienne et notamment dans les domaines éducatif, culturel, professionnel et médical.
Par ailleurs, la France a signé la convention relative aux droits des personnes handicapées des Nations unies qui stipule en son article 21 que les États parties « reconnaissent et favorisent l'utilisation des langues des signes ».
Aussi lui demande-t-elle son opinion sur cette demande et la façon dont elle entend y répondre.
- page 2489
Réponse du Ministère de la justice publiée le 28/05/2020
La loi constitutionnelle du 25 juin 1992 a inscrit à l'article 2 de la Constitution la langue française comme langue de la République. En application de cette disposition, l'utilisation de la langue française s'impose aux personnes morales de droit public et aux personnes morales de droit privé dans l'exercice d'une mission de service public. Ce principe n'apparait pas pour autant comme un obstacle à la reconnaissance et à l'utilisation d'autres langues sur le territoire de la République. Ainsi, d'autres langues parmi lesquelles la langue des signes française, ont connu une reconnaissance à travers une consécration législative. La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a consacré la langue des signes française comme langue « à part entière ». Le Code de l'éducation consacre la liberté de choix des jeunes sourds entre une communication bilingue (langue des signes et langue française) et une communication en langue française (Art. L.112-3). Par ailleurs, devant les juridictions françaises, il est prévu que toute personne sourde puisse bénéficier d'un dispositif de communication adapté à son handicap, tel que l'assistance d'un interprète en langue des signes lors des audiences (Art. 23-1 du code de procédure civile). Bien que la langue des signes française ne soit pas inscrite dans la Constitution, des exigences constitutionnelles imposent également au législateur de faciliter l'intégration des personnes en situation d'handicap, à travers notamment le respect des droits et libertés fondamentaux. Le Conseil d'Etat a rappelé que l'exigence relative à l'utilisation d'un dispositif de communication adapté au handicap d'un justiciable lors des audiences devant les juridictions administratives est une garantie du principe relatif au caractère contradictoire de la procédure et des droits de la défense (Conseil d'Etat, 15 mars 2019, n° 414751). Le principe d'égalité impose également une égalité d'accès aux services publics ou aux emplois publics entre tous les citoyens. Le Conseil constitutionnel a reconnu, à travers les principes énoncés par le Préambule de la Constitution de 1946, l'existence d'exigences constitutionnelles imposant au législateur la mise en uvre d'une politique de solidarité nationale en faveur des personnes handicapées, libre à lui d'en choisir les modalités concrètes qui paraissent appropriées pour atteindre ces exigences (Conseil Constitutionnel, 15 novembre 2018, n° 2018-772 DC).
- page 2438
Page mise à jour le