Question de Mme ROSSIGNOL Laurence (Oise - SOCR) publiée le 28/03/2019

Mme Laurence Rossignol appelle l'attention de Mme la ministre du travail au sujet de la parution prochaine de l'un des décrets consécutifs à la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

Le décret en question est celui qui traite des conséquences d'une mise en demeure par l'inspection du travail si elle constate des manquements de l'entreprise à ses obligations en matière d'égalité femmes hommes. Un tiers des plus grandes entreprises n'ont pour le moment pas respecté ces obligations : la mise en conformité doit donc être garantie par les pouvoirs publics, sauf à laisser les dispositions en matière d'égalité professionnelle peu ou mal appliquées.

Or, la réécriture de l'article R. 2242-3 du code du travail, au sujet du délai dont l'employeur dispose pour se mettre en conformité une fois mis en demeure, met en péril le caractère contraignant des normes relatives à l'égalité professionnelle. Le projet transmis aux organisations représentatives supprime en effet le délai maximum prévu pour la mise en conformité (celui actuellement en vigueur est de six mois).
En outre, le contenu des plans d'action obligatoires en matière d'égalité professionnelle est également vidé de sa substance par la modification de l'article R. 2242-2-2 du même code, qui prévoit de supprimer les indicateurs devant figurer obligatoirement dans ces plans.

En définitive, cela signifie que, d'une part, le Gouvernement laisse aux entreprises le soin de prendre le temps qu'elles souhaitent pour remplir leurs obligations en matière d'égalité professionnelle ; et d'autre part qu'elles pourront décider par elles-mêmes du volontarisme de leur plan d'action, au risque d'en faire une coquille vide (malgré un intitulé prometteur).

Elle lui demande donc d'expliciter sa stratégie pour imposer aux entreprises le fait de parvenir au plus vite à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, conformément aux engagements pris en séance lors de la discussion du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

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Transmise au Ministère du travail


Réponse du Ministère du travail publiée le 19/09/2019

Le décret n° 2019-382 du 29 avril 2019 portant application des dispositions de l'article 104 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel relatif aux obligations en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans l'entreprise a été publié au Journal officiel du 30 avril 2019.  Ce décret prévoit, au 4° de son article 1er, que l'agent de contrôle de l'inspection du travail, constatant un manquement, met en demeure l'employeur de se mettre en conformité, dans un délai d'exécution qui ne peut être inférieur à un mois – au lieu de six mois fixes auparavant – au regard des trois obligations suivantes :  - la couverture par un accord d'entreprise relatif à l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;  - la publication annuelle de l'index de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes ;  - et la définition de mesures de correction prévues à l'article L. 1142-9 du code du travail, dès lors que le niveau de résultat de l'Index est inférieur à 75 points. L'instauration d'un délai « plancher » d'un mois minimum en lieu et place d'un délai fixe de six mois a ainsi pour but d'adapter le délai de mise en conformité en fonction de la nature des obligations précitées. En effet, le délai de six mois fixes était conçu pour donner le temps à l'employeur de négocier un accord sur l'égalité professionnelle ou à défaut élaborer un plan d'action. Or un tel délai fixe n'est pas adapté pour demander une mise en conformité avec les deux nouvelles obligations introduites par la loi : publier l'index de l'égalité professionnelle et prendre les mesures de correction qui s'imposent en cas de mauvais résultats.  Cette mesure renforce donc le caractère contraignant des normes relatives à l'égalité professionnelle, en accroissant le pouvoir d'appréciation de l'agent de contrôle et en lui permettant d'adapter le délai de la mise en demeure à chaque situation rencontrée. Lorsqu'il estimera que l'employeur peut se mettre en conformité rapidement, comme cela sera souvent le cas pour publier l'index sur l'égalité professionnelle, il pourra lui enjoindre de se mettre en conformité dans un délai court d'un mois, ce qu'il n'aurait pu faire avec les anciennes dispositions du code du travail. L'absence de durée maximale de la mise en demeure ne conduit pas, dans les faits, à une absence de sanction. En effet, l'agent de contrôle de l'inspection du travail fixera dans tous les cas un délai maximum de mise en conformité. Et au terme de ce délai, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi décidera le cas échéant de notifier une pénalité qui peut aller jusqu'à 1% de la masse salariale de l'entreprise. Il ne s'agit donc aucunement de laisser aux entreprises « le soin de prendre le temps qu'elles souhaitent pour remplir leurs obligations » : le Gouvernement rappelle, à cet égard, l'engagement et le professionnalisme des services de l'inspection du travail, dont la mission est précisément de veiller à la bonne application de la loi. En outre, ce type de délais d'exécution « plancher » pour les mises en demeure est déjà communément utilisé par les services de l'inspection du travail, comme c'est le cas pour d'autres infractions énumérées à l'article R. 4721-5 en matière de santé et de sécurité au travail. Il ne constitue donc aucunement une nouveauté ou une exception. Le Gouvernement tient à souligner que le respect de l'obligation de publication et l'analyse des résultats transmis font l'objet d'un suivi attentif et rigoureux des services de l'administration du travail. La ministre du travail a donné comme objectif aux services d'inspection du travail de conduire 7 000 contrôles et interventions en 2019 en matière d'égalité professionnelle, qui est l'une des grandes priorités de leur action pour cette année. Enfin, le contenu des plans d'action en faveur de l'égalité entre les femmes et les hommes, obligatoire à défaut d'accord dans toutes les entreprises d'au moins 50 salariés, est déterminé à l'article R. 2242-2. Cet article demeure en vigueur et n'est aucunement modifié. L'article R. 2242-2-2 détaille quant à lui uniquement le contenu de la synthèse de ce plan d'action que l'employeur devait publier sur son site internet. Il est logiquement abrogé puisque cette obligation de publication, jugée redondante avec la publication de l'index, a été supprimée par la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

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