Question de M. CHEVROLLIER Guillaume (Mayenne - Les Républicains) publiée le 28/02/2019

M. Guillaume Chevrollier attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les difficultés rencontrées par les Français assujettis à la fiscalité américaine par l'application de la loi « Foreign account tax compliance act (FATCA) ». La problématique porte sur les « Américains accidentels », personnes étant rattachées aux États-Unis par un ensemble d'élément factuels (« indices d'américanités »), mais aussi sur l'impact sur les personnes partageant un patrimoine commun avec ces personnes. Adopté par les États-Unis d'Amérique dans le cadre du développement de la lutte contre la fraude fiscale, le « Foreign account tax compliance act » (FATCA) du 18 mars 2010 instaure l'obligation pour toute institution financière située à l'étranger de transmettre à l'Internal revenue service (IRS) américain des informations fiscales sur les contribuables américains. Ainsi, les institutions financières françaises sont soumises à une obligation déclarative concernant leurs clients présentant des « indices d'américanité ». Afin d'assurer le respect de cet accord, plusieurs sanctions ont été prévues à l'égard des particuliers et des banques : les premiers pouvant être poursuivis par le fisc et se voir imposer une taxe de rapatriement de 17,5 % sur les bénéfices des trente dernières années des entreprises détenues, pour les seconds les sanctions vont jusqu'à un retrait de la licence bancaire aux États-Unis. Par ailleurs, les personnes souhaitant ne pas subir cette double imposition peuvent abandonner leur nationalité américaine mais la procédure est coûteuse, nécessitant l'intervention d'avocats en France et aux États-Unis, et est soumise à une mise en conformité fiscale préalable. En outre, en l'absence de liens concrets avec les États-Unis, où ils n'ont pas résidé, et de documents officiels de ce pays, ces personnes ont des difficultés pour fournir les informations demandées par les établissements financiers français, notamment un numéro d'identification fiscale américain dont l'obtention peut être particulièrement longue.

Ces personnes peuvent également subir une sanction indirecte du fait d'une discrimination de certaines banques à l'égard des clients présentant des indices d'américanité, comme le relève l'avis du Défenseur des droits du 23 mai 2018 : clôtures arbitraires de comptes, refus d'ouverture, impossibilité de souscrire à des produits d'épargne et de placement.

Il lui demande donc quelles solutions sont envisagées par le Gouvernement pour alléger les procédures d'abandon de la nationalité américaine. Au plan interne, il lui demande également quelles sont les mesures envisagées pour étendre les garanties du « droit au compte » pour les personnes ainsi victimes de discrimination de la part de leur banque, ce droit ne permettant actuellement de ne bénéficier que de services limités.

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 08/08/2019

En matière de fiscalité, les États-Unis appliquent le principe de l'imposition sur la base de la citoyenneté, celle-ci pouvant s'acquérir par la seule naissance sur le sol américain. Les citoyens français qui ont également la nationalité américaine sont ainsi tenus, par le droit américain, de procéder à une déclaration de leurs revenus auprès des services fiscaux de ce pays et d'acquitter les impôts dus sous réserve de franchises applicables. Il en va d'ailleurs de même pour tous les citoyens américains résidant en France. Il s'agit là d'un principe ancien. Une convention fiscale bilatérale ayant été conclue entre la France et les États-Unis en vue d'éviter les doubles impositions, ce n'est que dans les cas où l'impôt français est inférieur à l'impôt américain ou si certains revenus bénéficient d'une non-imposition du seul côté français, qu'un impôt complémentaire pourra être valablement demandé par l'administration américaine. En outre, s'agissant des citoyens américains qui résident hors des États-Unis, la législation américaine prévoit différents mécanismes qui réduisent largement le risque de double décaissement dans le cadre de l'instauration du prélèvement à la source. Ainsi, il leur est accordé un abattement sur les revenus de leur travail (foreign earned income exclusion) fixé à 104 100 dollars pour 2018 ou encore à une déduction spéciale des charges d'hébergement exposées par leur employeur (foreign housing exclusion). De plus, la législation américaine prévoit des modalités particulières de prise en compte des impôts acquittés à l'étranger conduisant à imputer sur l'impôt américain le crédit afférent à l'impôt étranger payé au titre des revenus de la même année ou bien celui estimé au titre des revenus de l'année en cours. Le 14 novembre 2013, la France a signé un accord intergouvernemental, dit « accord FATCA » (Foreign Account Tax Compliance Act), relatif au respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers. Entré en vigueur le 14 octobre 2014, cet accord fixe un cadre pour l'échange automatique et réciproque d'informations fiscales entre la France et les États-Unis. À défaut, la loi « FATCA » que les États-Unis ont adoptée en 2010 aurait obligé tous les établissements financiers à transmettre directement à l'administration fiscale américaine des informations détaillées sur les comptes détenus directement ou indirectement par des contribuables américains. Ainsi, l'administration américaine dispose d'informations plus exhaustives sur l'ensemble des ressortissants américains, dont les « Américains accidentels », c'est-à-dire certains citoyens français ayant également la nationalité américaine, notamment du fait de leur naissance sur le sol américain, mais n'ayant pas de liens particuliers avec les États-Unis. Cette administration considère qu'en application de la législation des États-Unis, les « Américains accidentels » auraient dû accomplir les démarches déclaratives incombant à tout ressortissant américain. Cette problématique ne concerne pas les seuls binationaux français : le Mexique et le Canada sont particulièrement concernés, de même que d'autres États, notamment européens. Le Gouvernement, par le biais du ministère de l'économie et des finances et du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, a sollicité l'attention des autorités américaines sur ces situations particulières et plaidé en faveur d'une renonciation facilitée à la nationalité américaine pour ces « Américains accidentels », étant entendu que les conditions d'octroi de la nationalité et le principe de l'imposition sur la base de la citoyenneté relèvent de la compétence souveraine des États-Unis. Un courrier a également été adressé au secrétaire du Trésor américain, le 8 mai 2017, par la présidence de l'UE, appelant son attention sur les difficultés concrètes rencontrées par certains citoyens européens ayant également la nationalité américaine. Les représentants de l'administration fiscale française ont par ailleurs engagé des contacts et un dialogue avec les services fiscaux américains pour proposer que dans les situations où, comme c'est le cas pour les « Américains accidentels », les liens avec les États-Unis sont ténus, la procédure de renonciation à la nationalité soit rendue plus simple et moins coûteuse au regard des obligations fiscales qui en découlent. La France est à cet égard l'un des États les plus mobilisés. Les démarches répétées du Gouvernement pour faire admettre notre interprétation sur la nature de ces impositions ont d'ailleurs permis de résoudre une difficulté ancienne portant sur la Contribution sociale généralisée (CSG) et la Contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS), problématique qui concerne notamment les « Américains accidentels » qui déclarent des revenus aux États-Unis. L'administration américaine vient en effet d'admettre que ces prélèvements acquittés en France ne sont pas des cotisations sociales mais bien des impositions de toute nature, comme l'a toujours soutenu la France. Ainsi, l'Internal Revenue Service accepte désormais d'accorder un crédit d'impôt au titre de ces impositions sur les impôts dus aux États-Unis. Cela permet de tenir compte de la CSG et de la CRDS dans le calcul du crédit déductible de l'impôt américain sur le revenu accordé aux résidents américains percevant des revenus de source française et aux résidents de France soumis à l'impôt américain. La France espère d'autres avancées concrètes de la part des autorités américaines. C'est pourquoi le dialogue sera poursuivi. Enfin, le Gouvernement reste vigilant quant au respect par les banques de leurs obligations à l'égard des personnes de nationalité américaine, afin que le droit au compte leur soit reconnu et soit appliqué de manière effective. À cet égard, il est rappelé qu'il existe une procédure de recours devant la Banque de France permettant de contraindre une banque à accepter l'ouverture d'un compte, l'établissement étant alors désigné par la Banque de France.

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