Question de M. BOURQUIN Martial (Doubs - SOCR) publiée le 23/01/2019

Question posée en séance publique le 22/01/2019

M. Martial Bourquin. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances.

Monsieur le ministre, nous avons appris que la Commission européenne pourrait remettre en cause l'accord de fusion conclu entre Siemens et Alstom. Deux choix s'offrent aujourd'hui à la France : soit les groupes acceptent de nouvelles cessions d'actifs, ce qui est synonyme de suppressions de production et d'emplois, peut-être même de sites industriels, soit ce sera un refus de la Commission européenne.

Nous partageons, comme vous, le dogmatisme de la Commission sur la question de la concurrence qui empêche l'émergence de champions européens.

Cependant, nous l'avons dit et répété, l'accord passé entre Siemens et Alstom était un mauvais accord, qui est plus une absorption d'Alstom par Siemens qu'une véritable fusion entre égaux.

Monsieur le ministre, nous vous demandons de refuser toute nouvelle cession d'actifs, qui serait synonyme de démantèlement d'Alstom. En cas de refus de l'Union européenne, vous devez mettre sur pied une stratégie nationale.

Alstom s'est désendettée, a gagné de nombreux marchés à travers le monde ; il va être urgent de mettre en place un pacte d'actionnaires en vue d'une véritable stratégie industrielle. Thales, entreprise pionnière dans la signalisation, pourrait par exemple participer à ce pacte d'actionnaires.

Il est aussi nécessaire que la Caisse des dépôts et consignations ou la Banque publique d'investissement soient associées à un tel pacte pour protéger Alstom contre d'éventuels prédateurs financiers.

Monsieur le ministre, avez-vous la volonté de défendre ce fleuron industriel ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 23/01/2019

Réponse apportée en séance publique le 22/01/2019

M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie et des finances. Monsieur le sénateur Martial Bourquin, j'ai parfois l'impression que la Commission européenne et les responsables européens ne vivent pas dans le même monde que le nôtre. (Marques d'approbation et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Sido. Oui !

M. Bruno Le Maire, ministre. Ils n'ont pas vu que, depuis quinze ans, un champion chinois de l'industrie ferroviaire avait émergé.

On dénombre 26 000 kilomètres de lignes à grande vitesse et très grande vitesse en Chine – c'est un marché captif pour les Chinois – contre 9 000 en Europe. CRRC construit 200 à 220 trains à grande vitesse ou à très grande vitesse chaque année ; Alstom et Siemens, à eux deux, en construisent 35.

M. Bruno Sido. Oh là là !

M. Bruno Le Maire, ministre. Le chiffre d'affaires de CRRC est le double de ceux d'Alstom et de Siemens réunis.

Je considère donc qu'il est temps que nous adaptions les règles de la concurrence européenne à la réalité de l'industrie mondiale du XXIe siècle… (Marques d'approbation et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. Christian Cambon. Très bien !

M. Bruno Le Maire, ministre. … et que nous arrêtions d'appliquer, en 2019, des règles de la concurrence européenne qui n'ont pas été modifiées depuis quinze ans, c'est-à-dire depuis 2004.

Mme Sophie Primas. Très bien !

M. Bruno Le Maire, ministre. L'Europe doit changer pour mieux protéger et défendre notre industrie nationale et européenne. (Très bien ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Vous avez parfaitement raison, monsieur Bourquin, Alstom et Siemens ont fait des concessions, même d'ultimes concessions pour répondre aux demandes de la Commission européenne. Ces deux groupes ne feront pas de concessions supplémentaires qui pourraient les fragiliser. C'est maintenant à la Commission européenne de prendre ses responsabilités.

Quant à nous, soyez-en sûr, nous prendrons les nôtres. J'estime que, si jamais la Commission européenne devait rendre une décision négative sur la création d'un champion industriel européen, d'un géant du ferroviaire, pour résister à la concurrence chinoise et à la concurrence d'autres grandes nations du monde, elle commettrait une erreur économique et une faute politique. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

Un sénateur du groupe socialiste et républicain. Et donc ?

M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour la réplique.

M. Martial Bourquin. Monsieur le ministre, Alstom, c'est 8 500 personnes en France sur douze sites, 4 500 fournisseurs, 27 000 emplois : cela vaut la peine de défendre ce fleuron industriel ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

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