Question de M. PONIATOWSKI Ladislas (Eure - Les Républicains) publiée le 20/12/2018
M. Ladislas Poniatowski attire l'attention de Mme la ministre des armées sur la surprenante décision de la direction générale de l'armement (DGA) d'interdire, dorénavant, à toutes les petites et moyennes entreprises (PME) qui ont un chiffre d'affaires inférieur à 50 millions d'euros de répondre aux appels d'offres d'équipements d'armement du ministère de la défense.
Cette exigence a permis, récemment, à des entreprises étrangères de remporter des marchés au détriment d'entreprises françaises pourtant dotées d'un savoir-faire qui n'est plus à démontrer. C'est ainsi qu'une PME de la région de Saint-Étienne a été écartée de l'appel d'offres qui doit permettre d'équiper les soldats français de 2 600 fusils de précision semi-automatiques.
La seule solution de repli pour ces PME est de s'associer à des acteurs qui ne sont pas des partenaires naturels, voire même des concurrents !
C'est le choix qu'avait fait une PME de la région de Bernay (Eure), spécialisée dans la conception d'équipements balistiques et de maintien de l'ordre, après avoir été conseillée en ce sens par le service de l'achat, de l'équipement et de la logistique de la sécurité intérieure (SAELSI), pour répondre à l'appel d'offres de 307 000 gilets pare-balles. Ce dossier a couté plus de 100 000 euros à l'entreprise et le marché a finalement été confiée à une entreprise irlandaise.
Au moment où le discours du Gouvernement est d'aider les PME françaises, il lui demande si le Ministère de la Défense est disposé à revenir sur cette discrimination stupéfiante.
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Réponse du Ministère des armées publiée le 27/06/2019
La question de l'honorable parlementaire relative à la politique des appels d'offres d'équipements d'armement du ministère des armées appelle plusieurs remarques : s'agissant d'abord du seuil de chiffre d'affaires, pour les marchés relevant de la compétence de la direction générale de l'armement (DGA), l'imposition d'un critère de sélection relatif au chiffre d'affaires n'a aucun caractère systématique ; de même, le seuil financier, lorsqu'il est utilisé comme critère de sélection, n'est pas fixe mais proportionné à l'objet du marché et à ses conditions d'exécution. La finalité d'un tel critère n'est pas non plus d'exclure les petites et moyennes entreprises (PME), mais de s'assurer que l'industriel ou le groupement industriel qui sera sélectionné sera en capacité économique et financière de fournir le matériel ou les prestations demandées. Par ailleurs, la DGA a prévu pour les candidats la possibilité de se présenter en groupement d'opérateurs économiques, dont les capacités peuvent s'additionner pour satisfaire à l'ensemble des capacités demandées, dont le critère du chiffre d'affaires. Concernant la nationalité des sociétés candidates, la ministre des armées souligne que, d'une manière générale, la localisation en Europe peut être imposée pour les marchés d'études et de production des matériels de guerre, conformément à la directive européenne spécifique aux marchés de défense et sécurité, sans pour autant établir de discrimination sur la nationalité, interdite par le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. En termes de souveraineté nationale, la revue stratégique de 2017 a dressé une cartographie des coopérations industrielles et technologiques qui relèvent plus ou moins de l'exercice de celle-ci. En particulier, les armements de petit calibre ne font pas partie des domaines identifiés comme devant rester de souveraineté nationale, dans un marché international - et notamment européen - très concurrentiel pour ce type de matériels. Au sujet de l'appel d'offres du ministère des armées pour le fusil de précision semi-automatique que mentionne l'honorable parlementaire, il convient de rappeler que le projet de marché relatif au FPSA (fusil de précision semi-automatique) porte sur l'acquisition d'environ 2 600 armes de calibre 7,62 mm OTAN avec équipements de visée, 1 800 modules à intensification de lumière, 1 000 modules infrarouges, des accessoires, des munitions de 7.62 mm, les éléments permettant d'assurer le soutien initial et les éléments nécessaires à la qualification du système. Il aurait été préjudiciable pour la tenue des performances globales (notamment de précision et de sécurité) d'acquérir séparément l'arme et les autres modules. Afin de garantir aux forces armées le niveau de performance requis, la DGA a donc publié l'appel d'offres sur l'ensemble du système sur lequel il est demandé aux candidats de démontrer leurs capacités dans la fourniture des différents sous-ensembles, ainsi que dans le pilotage de la performance d'ensemble sur toute la période couverte par le marché. Concernant enfin le soutien aux PME et aux entreprises de taille intermédiaire (ETI) par le ministère des armées, la ministre tient à souligner que, en termes de nombre de contrats, la très grande majorité des achats du ministère est passée à des entreprises françaises. En particulier, le ministère des armées consacre près de 14 % de son budget annuel à des achats directs auprès de quelque 26 000 PME et ETI. Compte tenu de l'effort budgétaire prévu par le projet de loi de programmation militaire (LPM) 2019-2025, ce sont environ 40 milliards d'euros qui seront ainsi dépensés auprès des PME et ETI sur cette période. Le ministère des armées promeut les PME, tout en restant attentif à la capacité de l'industrie à fournir, et à soutenir dans la durée, le matériel qu'attendent les opérationnels. Présenté par la ministre des armées en mai 2018, le plan Action PME vient renforcer le précédent pacte PME, avec 21 actions engagées pour renforcer le dialogue et les échanges entre les entreprises les chefs de PME et ETI et les hauts responsables du ministère, notamment par des rencontres destinées à renforcer l'écoute des attentes des sociétés. Ce plan consolide l'ensemble des dispositifs directs de soutien aux PME et notamment de soutien à l'innovation, dont le montant global sera porté à 110 millions d'euros annuels sur la durée de la LPM 2019-2025. De même, le ministère des armées mobilise les maîtres d'uvre industriels au travers des conventions bilatérales signées pour soutenir la croissance des PME. Le soutien du ministère des armées aux PME passe également par le fonds Def'invest, créé avec BPI France en 2017 pour sécuriser le capital d'entreprises d'intérêt stratégique pour le secteur de la défense, pour soutenir leur développement notamment en matière d'innovation mais aussi pour participer à des opérations de croissance externe permettant de consolider la filière. Ce fonds est aujourd'hui doté de 10 millions d'euros par an sur 5 ans. Enfin, le ministère agit directement vers les start-up pour renforcer l'agilité du dispositif et soutenir l'innovation, notamment en développant des partenariats avec des incubateurs et des accélérateurs. L'agence de l'innovation de défense, créée le 1er septembre 2018, a pour mission de renforcer cette démarche.
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