Question de Mme COHEN Laurence (Val-de-Marne - CRCE) publiée le 01/11/2018
Mme Laurence Cohen interroge M. le ministre de l'intérieur sur les risques encourus par les pompiers du fait de leur exposition régulière à des substances toxiques.
Au-delà des risques connus liés à leur profession, les pompiers sont victimes d'émanations toxiques qu'ils respirent lors d'interventions. En effet, les feux d'incendies attaquent les plaques toitures et de façades, les cloisons, faux plafonds, dalles de sol, etc. contenant de l'amiante. Des quantités de fibres d'amiante sont dispersées par les courants ascendants d'air chaud, et se répandent sur les vêtements de protection.
Une étude menée par la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) révèle que les pompiers sont exposés à des risques accrus de maladies cardiovasculaires et respiratoires, mais aussi de cancers, de morts prématurées.
Ainsi, la CNRACL pointe des failles dans les processus de nettoyage et de décontamination : « les matériels utilisés pendant l'intervention (lances, tuyaux, etc.), sont souvent transportés, sans précaution particulière, dans les véhicules d'incendie ou des utilitaires. Le personnel et le matériel n'étant pas décontaminés avant le retour en caserne, l'ensemble du personnel et le véhicule se trouvent ainsi contaminés ».
Le nettoyage d'équipements tels que casques, cagoules, gants de feu et effets chaussants « ne fait pas l'objet de réglementation particulière, l'approche individuelle étant souvent la règle », poursuit la CNRACL.
Du côté des appareils respiratoires isolants (ARI), seul le nettoyage du masque est défini, mais « aucune norme n'existe pour les autres pièces (dossard, bretelles, canalisations et soupape respiratoire). Cette situation peut conduire à relier un masque "propre" avec un appareil qui ne l'est pas ».
C'est donc toute l'organisation de la gestion de ces matériels contaminés qui est à revoir, ou à mettre en place. La prévention du risque d'exposition à des agents chimiques cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction (CMR) relève du code du travail (articles R. 4412-59 à R. 4412-93) et s'inscrit dans la prévention du risque chimique.
Aussi, elle lui demande ce qu'il entend faire pour améliorer de façon systématique et ce, sur l'ensemble du territoire, la protection des sapeurs-pompiers avec un matériel et des équipements adaptés, l'information et la sensibilisation sur ces questions, développer la formation et la culture de la prévention.
Elle lui demande également ce que le Gouvernement entend faire pour que l'amiante soit reconnue et intégrée dans les attestations d'exposition aux risques CMR délivrées par les services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), afin que tous les pompiers, professionnel, volontaires et les retraités puissent bénéficier d'un suivi médical le plus précoce possible, d'une prise en charge immédiate, et ce, sans avoir à fournir des preuves de leur exposition, difficilement retraçables mais pourtant bien réelles.
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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 28/11/2019
Le ministère de l'intérieur a lancé fin 2018 un plan triennal sur la santé, la sécurité et la qualité de vie en service (SSQVS) des sapeurs-pompiers, qui sera prochainement complété par la mise en place d'un suivi médical post-professionnel au sein des services départementaux d'incendie et de secours. Le ministère a également préparé un guide de doctrine opérationnelle, publié en mars 2018 et préconisant les mesures de protection des personnels. Des évolutions importantes sont d'ores et déjà perceptibles comme la nouvelle définition des cagoules de feu des sapeurs-pompiers. Un document de synthèse sera produit prochainement exposant les mesures immédiates et prospectives, à plus long terme. Sur le sujet particulier de l'exposition aux fumées, un rapport de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) constate la difficulté à mettre en place des études scientifiques validant un lien de causalité entre l'exposition et la survenance de maladies professionnelles, notamment de cancers, au regard de la diversité des situations professionnelles. Il semble donc pertinent de déployer un plan d'action fondé sur trois objectifs principaux : mettre en place une cohorte pour la réalisation des études épidémiologiques manquantes, adapter les stratégies de prévention dans les différents domaines, et intégrer une analyse approfondie du rapport de l'ANSES afin de mettre en perspective les actions déjà réalisées et de prioriser les actions restant à mettre en uvre. Par ailleurs, si la toxicité aiguë des fumées est bien prise en compte par les équipements de protection individuelle sur intervention, des efforts restent à fournir dans le domaine post-opérationnel (déblais, nettoyage des matériels, etc.) et dans le domaine particulier des feux en espaces naturels. La mise en place d'une étude épidémiologique de grande ampleur type cohorte parait être la seule réponse plausible à l'appréhension de la toxicité chronique des fumées d'incendie. En attendant, la mise en uvre du plan SSQVS et des doctrines opérationnelles constitue une réponse adaptée à la nature et à l'importance des risques auxquels les sapeurs-pompiers sont exposés.
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