Question de M. KANNER Patrick (Nord - SOCR) publiée le 12/10/2018
Question posée en séance publique le 11/10/2018
M. Patrick Kanner. Monsieur le Premier ministre, un remaniement ne règle pas tous les problèmes, nous le savons tous, mais ce non-remaniement, auquel nous assistons depuis deux jours, devient un problème pour l'image politique de votre exécutif.
La difficulté n'est pas tant le casting celui-ci n'intéresse pas grand-monde, en réalité que la politique qui sera menée celle-là, tous les Français s'en préoccupent.
Vos hésitations, la différence de vues que l'on vous prête avec le Président de la République, l'absence de ministre de l'intérieur, le fait que certains ministres soient sur le départ forcé depuis dix jours je remarque d'ailleurs que moins de la moitié de votre gouvernement est présente aujourd'hui au banc des ministres ! , et cette confusion empêchent de parler de l'essentiel, la politique que vous menez. Pourtant, les sujets ne manquent pas.
Quelles sont vos réelles intentions pour le pouvoir d'achat, notamment celui des retraités ? Quel est le montant réel de la revalorisation de la prime d'activité au niveau du SMIC ? Vous aviez annoncé 20 euros mensuels ; or le décret qui vient d'être publié retient une augmentation réelle de 8 euros. Allez-vous bloquer longtemps les salaires des fonctionnaires, alors que l'inflation est fortement de retour ? La même question se pose pour les revenus sociaux.
Monsieur le Premier ministre, je ne vais pas faire durer mon intervention ; la liste est longue et aurait dû, j'y insiste, relever d'un débat de politique générale. Retenez seulement cette question : est-ce que la vie quotidienne des Français, de plus en plus nombreux à ne plus vous croire, va changer avec votre remaniement ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
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Réponse du Premier ministre publiée le 12/10/2018
Réponse apportée en séance publique le 11/10/2018
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Monsieur le président Kanner, vous avez commencé votre intervention en évoquant la portée politique que pouvait avoir tel ou tel remaniement et en indiquant qu'aucun remaniement ne pouvait, à lui seul, changer une donne politique. Vous vous fondiez probablement sur une expérience passée, que nous avons tous en tête (Sourires sur les travées du groupe La République En Marche. Murmures sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Xavier Iacovelli. Un peu d'humilité !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. J'en suis persuadé depuis longtemps et, encore une fois, l'expérience me conduit à vous donner raison ; plus exactement, l'expérience sur laquelle vous vous fondez ou que vous avez vécue me conduit à vous donner raison. (Mêmes mouvements.)
M. Roland Courteau. Restez humble, monsieur le Premier ministre !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je le dis avec beaucoup de simplicité, mesdames, messieurs les sénateurs, et dans les mêmes termes que le président Kanner.
Vous indiquez que notre État doit faire l'objet de directives qui soient claires et de mises en uvre de politiques publiques qui soient fermes. Vous avez raison, monsieur le président Kanner, et je partage en tout point cet avis. C'est la raison pour laquelle les ministres sont à leur tâche. En effet, il ne vous a pas échappé que les ministres travaillent, qu'ils sont présents et qu'ils répondent aux questions.
M. Michel Boutant. Ils sont à Lyon !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Il ne vous a pas non plus échappé que le Président de la République avait décidé de confier au Premier ministre que je suis la responsabilité du ministère de l'intérieur pendant cette période d'intérim, comme l'on dit. Je l'exerce pleinement, avec sérieux, en consacrant le temps et l'attention requis à cette tâche.
La situation n'a pas vocation à durer, je vous l'accorde, mais, entre-temps, je rencontre l'ensemble des responsables de la sécurité publique et l'ensemble des acteurs du ministère de l'intérieur, car je sais à la fois la sensibilité de la période et l'exigence d'une action ferme je dirai même très ferme.
Monsieur le président Kanner, le Président de la République a pris des engagements. Ceux-ci seront tenus si vous me permettez de le dire de façon triviale, je suis là pour ça ! , et en tous points. En effet, nous considérons que, même si l'on peut être en désaccord avec les engagements pris par le Président de la République c'est d'ailleurs votre cas , l'honneur de la politique est de faire en sorte que ces engagements soient tenus dans l'action et que les résultats soient probants.
Puisque vous m'avez interrogé sur ce qui change, monsieur le président Kanner, permettez-moi de vous indiquer que, depuis quelques jours, les Français reçoivent leur feuille d'impôts. (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. André Reichardt. Justement !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Et ils voient que la taxe d'habitation a baissé de façon effective pour 80 % des contribuables (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.),
M. Albéric de Montgolfier. Et la CSG ?
M. Édouard Philippe, Premier ministre. sauf, vous le savez parfaitement, lorsque des communes, informées que la mesure s'accompagnait d'un dégrèvement, ont choisi, sans doute librement, de remonter leur taux. (Oh ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Chacun assume ses décisions, mais dix-huit millions de Français, monsieur le président Kanner, ont vu le montant de leur taxe d'habitation baisser. Voilà des éléments précis et fermes. Nous allons tenir les engagements pris par le Président de la République. Je n'ai aucun état d'âme en la matière, et je suis certain que vous n'en avez aucun non plus. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. M. Daniel Chasseing applaudit également.)
M. François Patriat. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour la réplique.
M. Patrick Kanner. Monsieur le Premier ministre, je ne suis pas convaincu par votre réponse (Exclamations ironiques sur les travées du groupe La République En Marche.), et les Français non plus, manifestement, au regard des sondages qui se succèdent.
Je pense, monsieur le Premier ministre, que votre théorie du ruissellement est en train de devenir la théorie du goutte-à-goutte pour le plus grand nombre de nos concitoyens. Vous ne maîtrisez pas réellement le temps des horloges.
Finalement, nous en arrivons au temps des désillusions, après le temps des espoirs que vous avez portés. Vous ne possédez pas la clef qui permettrait de remettre en route cette horloge aujourd'hui défaillante. Telle est la vérité que découvrent aujourd'hui le plus grand nombre de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Jean-Marc Todeschini. Très bien !
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