Question de Mme EUSTACHE-BRINIO Jacqueline (Val-d'Oise - Les Républicains) publiée le 03/10/2018

Question posée en séance publique le 02/10/2018

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Début septembre, le ministre de l'intérieur ne ménageait pas ses critiques envers le chef de l'État. Quinze jours plus tard, il annonçait sa candidature à la mairie de Lyon, passant par pertes et profits son discours sur le nécessaire renouvellement de la classe politique. Puis l'on apprenait qu'il avait présenté sa démission au Président de la République, laquelle avait été aussitôt refusée. Rebondissement aujourd'hui : on apprend qu'il maintient sa démission…

Un épisode comme celui-là, mettant en scène le Président de la République et l'un de ses ministres d'État, est inédit : nous vivons un grand moment politique ! (M. Jackie Pierre s'exclame.) Alors que l'insécurité en France atteint un niveau de moins en moins supportable pour la population, le Président de la République et le ministre de l'intérieur nous jouent une pièce de théâtre de boulevard : on sort par une porte, on entre par une autre, et le suspense sur l'issue du spectacle demeure…

Lorsqu'on est élu, lorsqu'on est ministre de l'intérieur, on ne peut bien faire son travail que si l'on s'y consacre à 100 % ! Tous les élus s'engagent, et le ministre de l'intérieur se désengage…

Comment pouvez-vous penser faire croire que le ministre de l'intérieur, après ses démêlés avec le Président de la République, est en mesure d'exercer pleinement ses fonctions ? Avez-vous conscience, monsieur le Premier ministre, que les Français ne veulent plus de ces mises en scène, mais qu'ils attendent de la sincérité et des résultats ?

Monsieur le Premier ministre, M. Collomb va-t-il oui ou non quitter le ministère de l'intérieur ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe socialiste et républicain.)

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Réponse du Premier ministre publiée le 03/10/2018

Réponse apportée en séance publique le 02/10/2018

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je vous remercie de cet accueil, mesdames, messieurs les sénateurs. (Sourires.)

Vous posez, madame la sénatrice, la question de la sécurité des Français. (Marques d'ironie.)

Plusieurs sénateurs du groupe Les Républicains. Non !

M. Claude Bérit-Débat. « Ce n'était pas la question, mais c'est ma réponse » ! (Sourires.)

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Depuis ma nomination, le 15 mai 2017, la première priorité de ce gouvernement a toujours été la sécurité des Français. C'est ce qui explique nos choix en matière de réorganisation des services de renseignement, de coordination de l'action de ces services et d'augmentation des moyens budgétaires, matériels et humains mis à la disposition du ministère de l'intérieur. Ce sont là des faits vérifiables, essentiels pour que nos concitoyens aient la certitude que nous mettons en œuvre une politique destinée à garantir leur sécurité.

Ce matin même, une opération de toute évidence préparée depuis quelque temps a été menée, là encore avec le souci constant de protéger nos concitoyens.

M. Roland Courteau. Ce n'est pas la question !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Vous m'interrogez sur la concentration qui doit être celle d'un ministre de l'intérieur, ce qui vaut aussi, d'ailleurs, pour tous les membres d'un gouvernement.

Je partage parfaitement votre opinion, madame la sénatrice : oui, les ministres doivent se consacrer pleinement à leur tâche. C'est la raison pour laquelle aucun des membres du gouvernement que j'ai l'honneur de conduire ne dirige un exécutif local.

Mme Laurence Rossignol. Ils y pensent très fort !

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Vous reconnaîtrez avec moi que cela n'a pas toujours été le cas lors des deux quinquennats précédents… (Mme Sophie Primas s'exclame.)

L'implication et la concentration d'un ministre qui sert le Gouvernement, son pays et ses concitoyens doivent être entières. C'est d'ailleurs ce qu'a dit Gérard Collomb voilà deux semaines, considérant qu'il devrait quitter le Gouvernement lorsqu'il serait en campagne. Reconnaissez, madame la sénatrice, que cette attitude n'a pas toujours été celle de responsables ministériels qui étaient par ailleurs candidats à des élections. (M. André Gattolin applaudit. – Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.) Je me contente, sans aucun esprit polémique,…

Un sénateur du groupe Les Républicains. Aucun, en effet… (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Édouard Philippe, Premier ministre. … de pointer cette différence.

Vous avez également évoqué des articles de presse parus ce jour et hier soir, madame la sénatrice.

Sur ce point, ma réponse sera d'une parfaite clarté. Aux termes de l'article 21 de la Constitution, le Premier ministre dirige toute l'action du Gouvernement. Jamais je ne laisserai le début du commencement d'une hésitation pointer à ce sujet.

Aux termes de l'article 8, il lui revient de proposer au Président de la République la nomination ou la fin de fonctions des membres du Gouvernement.

Je prendrai donc mes responsabilités et j'aurai l'occasion de faire au Président de la République les propositions que les dispositions constitutionnelles prévoient et réservent au Premier ministre ! (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. François Grosdidier. Le plus tôt sera le mieux !

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour la réplique, en quelques secondes.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Monsieur le Premier ministre, ma question était très claire : M. Collomb va-t-il rester au Gouvernement ? Vous n'y avez évidemment pas répondu ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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