Question de Mme MONIER Marie-Pierre (Drôme - SOCR) publiée le 26/07/2018

Mme Marie-Pierre Monier appelle l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les modalités de récupération, par les autorités organisatrices de transport, de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) dans le cadre des opérations de transport scolaire.

En effet, il semble que l'administration estime que si la somme des participations financières perçues par le conseil régional auprès des familles des élèves est supérieure à 10 % du coût de revient annuel des prestations relatives à l'ensemble des contrats de transport scolaire, cette contribution constitue « une relation directe entre la somme acquittée par les familles et la prestation de transport », d'où la possibilité de récupérer la TVA après assujettissement.

Actuellement, deux tiers des conseils départementaux ne laissent à charge des parents d'élèves qu'un montant inférieur ou égal à 10 % du coût total annuel par élève transporté, soit quelques dizaines d'euros. Cette simple mesure aura donc pour conséquence inéluctable une remise en cause généralisée de la quasi-gratuité des transports scolaires, les conseils régionaux étant incités à éviter la « double peine » (financer la part familiale tout en renonçant à récupérer la TVA).

Pour des familles souvent en situation difficile, devoir payer 100 € ou plus annuellement par enfant transporté constitue une dépense élevée. Le coût du transport scolaire étant souvent déterminant dans les choix d'orientation et les chances de réussite des élèves, elle s'inquiète avec la fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE) des conséquences de cette règle édictée par l'administration fiscale sur la poursuite d'études après le brevet pour de nombreux jeunes, en particulier en territoire rural.

Aussi, elle lui demande d'une part de lui préciser les bases sur lesquelles l'administration fiscale a fixé ce seuil de 10 % qui apparaît, au vu des réponses apportées précédemment à des questions parlementaires, comme un choix arbitraire et d'autre part de lui indiquer si la part de financement du bloc communal, quand elle existe, peut venir « en soustraction » de la participation familiale, permettant ainsi d'assouplir ce seuil des 10 %.

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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 08/11/2018

Lorsqu'elle constitue une activité économique et ainsi que le prévoit l'article 256 B du CGI, l'activité de transports de personnes accomplie par une personne morale de droit public est, en tout état de cause, assujettie à la TVA. Ainsi, la fourniture, par une autorité organisatrice de transports (AOT), de prestations de transports de personnes à titre onéreux doit être soumise à la TVA. Une telle activité est réalisée à titre onéreux lorsqu'il existe un lien direct entre le service rendu et la contre-valeur reçue. Pour cela, le bénéficiaire de la prestation doit en retirer un avantage individuel et le niveau de cet avantage doit être en relation avec le prix payé. L'assujettissement a pour corollaire la possibilité, pour l'AOT, de déduire la TVA grevant les dépenses supportées pour effectuer ses prestations soumises à la taxe. Dans la situation du transport scolaire, le seuil de 10 % n'a pas été fixé de façon arbitraire, mais résulte d'une étude systématique de la jurisprudence récente de la Cour de Justice de l'Union européenne (CJUE). Il constitue un élément objectif pour l'appréciation de la qualité d'assujetti et apporte la sécurité juridique aux AOT. La Cour, dans l'arrêt Gemeente Borsele (Aff. C 520/14) rendu le 12 mai 2016, a jugé en présence de contributions acquittées annuellement par les usagers ne couvrant que 3 % de la totalité des frais annuels de transport, qu'il résulte d'une telle asymétrie entre les frais de fonctionnement et les montants perçus en contrepartie des services offerts une absence de liens réels entre la somme acquittée par les familles et la prestation de services fournie. Il s'ensuit qu'aucun droit à déduction de la TVA d'amont n'a pu être admis car dans de telles circonstances, la prestation est située en dehors du champ d'application de la TVA. Toutefois, cet arrêt ne fixe pas de seuil en pourcentage permettant de considérer que la prestation entre dans le champ d'application de la TVA s'agissant du transport. Par le passé, la CJUE, dans sa décision Commission contre Finlande (Aff. C-246/08), a cependant refusé la qualité d'assujetti à une personne publique dont les revenus d'une activité d'assistance juridique ne couvraient que 8 % des coûts engagés. Dans sa décision Gemeente Woerden (Aff. C 267/15), la Cour a admis que la commune soit qualifiée d'assujettie bien que celle-ci, dans les circonstances de l'affaire, ne percevait comme recettes que 10 % de ses coûts. Dès lors qu'en matière de transport scolaire le prix demandé aux usagers est très inférieur au coût supporté par l'AOT, l'étude de la jurisprudence européenne conduit à l'instauration d'un seuil minimal de 10 %. Pour l'AOT, le seuil de 10 % s'apprécie en fonction de l'ensemble des recettes taxables issues de l'activité de transport scolaire, comprenant, le cas échéant, les sommes versées par d'autres collectivités territoriales si elles peuvent être qualifiées au sens de la TVA de subventions complément de prix, rapporté à l'intégralité du coût de revient annuel.

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