Question de Mme CARTRON Françoise (Gironde - SOCR) publiée le 12/07/2018
Mme Françoise Cartron appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les revendications des pêcheurs professionnels en eau douce.
Le comité national de la pêche professionnelle en eau douce (CONAPPED) l'a sollicitée dans l'espoir de clarifier le statut de ces pêcheurs.
Sur 380 pêcheurs, 320 professionnels sont assimilés à des agriculteurs (dépendant du régime social agricole, la mutualité sociale agricole) tandis que les 60 autres ont un statut de marin pêcheur (régime social de l'établissement national des invalides de la marine).
La pêche professionnelle en eau douce peut être considérée comme une activité agricole, mais cette qualification n'est pas explicite.
L'inscription de la pêche en eau douce dans les articles L. 311-1 et L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime permettrait cette clarification.
Elle lui demande ce qu'il envisage de faire afin de préciser le statut de ces pêcheurs professionnels en eau douce.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 01/08/2018
Réponse apportée en séance publique le 31/07/2018
Mme Françoise Cartron. Monsieur le ministre, en cette fin de session parlementaire particulièrement dense, je vous propose une pause avant la trêve estivale, un moment de calme tel qu'on peut en vivre auprès des pêcheurs en eau douce.
J'ai récemment participé à une émission de la chaîne Public Sénat, intitulée Manger c'est voter, que je vous conseille de regarder si ce n'est déjà fait. Ce programme met à l'honneur des producteurs locaux qui se battent pour promouvoir le bien-manger. C'est ainsi que j'ai eu l'occasion de rencontrer M. Philippe Vignac, pêcheur de lamproie qui porte, dans mon département, l'ambition de préserver une pêche traditionnelle, artisanale et respectueuse de notre environnement. M. Vignac est par ailleurs président de l'association départementale des pêcheurs professionnels en eau douce.
C'est par lui et par le comité national de la pêche professionnelle en eau douce que j'ai été sensibilisée aux enjeux de cette profession. Ce comité représente près de 400 membres répartis autour de nos estuaires, de nos lacs et de nos rivières, sur l'ensemble du territoire français.
Une grande majorité d'entre eux sont assimilés à des agriculteurs du fait de leur affiliation à la mutualité sociale agricole, la MSA. Les autres dépendent du régime social de l'Établissement national des invalides de la marine, de par leur statut de marin pêcheur.
Ces pêcheurs veulent aujourd'hui voir leur profession reconnue statutairement comme une activité agricole pour une meilleure lisibilité juridique, sociale et fiscale. Ils pourraient alors relever à part entière des dispositifs rattachés, notamment au titre du régime des calamités agricoles et du regroupement en coopérative agricole.
J'avais déposé un amendement à cette fin lors de l'examen du projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous. Hélas, il n'a pu passer sous les fourches caudines de l'article 40 de la Constitution, comme cela était prévisible.
C'est pourquoi, monsieur le ministre, je vous interroge ce matin : je veux porter auprès de vous cette légitime demande de reconnaissance. La pêche professionnelle en eau douce ne peut-elle être aujourd'hui considérée comme une activité agricole ?
Je souhaiterais connaître votre intention, monsieur le ministre, concernant les revendications légitimes de ces professionnels.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Madame la sénatrice Françoise Cartron, votre question porte sur l'exclusion de la pêche professionnelle en eau douce de la définition de l'activité agricole par le code rural et de la pêche maritime.
Vous n'ignorez pas que, selon une pratique administrative constante, le responsable d'une entreprise de pêche professionnelle en eau douce est considéré comme un chef d'exploitation agricole, une telle entreprise pouvant être assimilée à une exploitation piscicole, donc agricole, notamment du fait de la détention très fréquente des captures vivantes dans des viviers avant leur valorisation.
En outre, les pêcheurs professionnels en eau douce sont affiliés à la MSA. Ils sont également soumis à la TVA agricole.
La qualification de la pêche professionnelle en eau douce en tant qu'activité agricole n'a cependant jamais été explicite.
L'action du Gouvernement sur ce sujet est simple. Aux fins de clarification définitive, et en vue d'éviter toute ambiguïté à l'avenir, la modification des articles L. 311-1 et L. 722-1 du code rural et de la pêche maritime pourrait se révéler opportune.
Cette reconnaissance comme activité agricole n'aurait pas de conséquence pour l'accès aux aides européennes, puisque les pêcheurs professionnels en eau douce relèvent du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, ou FEAMP.
Cette reconnaissance permettrait une sécurisation juridique et une simplification pour les pêcheurs professionnels en eau douce.
Il convient néanmoins d'approfondir cette question. La profession a récemment saisi le Gouvernement pour évaluer de manière globale l'impact d'une telle reconnaissance sur leurs activités. Le travail est en cours.
Des amendements ont été déposés sur des projets de loi en cours d'examen, dont le projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous. Ces amendements n'ont pu être retenus, car ils constituaient des cavaliers législatifs ou ne passaient pas l'obstacle de l'article 40 de la Constitution.
Si l'expertise en cours conclut qu'il serait intéressant de clarifier la reconnaissance de cette profession comme activité agricole, je soutiendrai bien évidemment toute proposition de loi en ce sens. Une telle proposition de loi pourrait d'ailleurs englober d'autres difficultés identifiées de même nature, comme le régime applicable à la saliculture. Il est en tout cas important de préciser que nous souhaitons avancer dans la reconnaissance du travail des pêcheurs professionnels en eau douce.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour répondre à M. le ministre.
Mme Françoise Cartron. Merci, monsieur le ministre : nous entendons vos propos comme une porte ouverte. Il ne nous reste plus qu'à nous mettre au travail afin qu'une proposition de loi offre à ces pêcheurs cohérence et simplification.
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