Question de Mme LASSARADE Florence (Gironde - Les Républicains) publiée le 28/06/2018

Mme Florence Lassarade appelle l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les effets secondaires graves du traitement par fluoropyrimidines en cancérologie chez les patients présentant un déficit en dihydropyrimidine déshydrogénase. Ces molécules utilisées dans environ 60 % des chimiothérapies seraient à l'origine de près de 200 décès de patients chaque année en France pour 100 000 patients recevant une chimiothérapie basée sur les fluoropyrimidines. Des chercheurs du laboratoire d'oncopharmacologie de l'institut de cancérologie de l'Ouest et de l'université d'Angers ont mis au point une méthode de dépistage multiparamétrique qui permet d'individualiser les traitements thérapeutiques en cancérologie. La méthode multiparamétrique est, actuellement, la seule méthode efficace qui permet de prédire 100 % des toxicités létales et 96 % des toxicités graves. Plus de 26 000 patients en ont déjà bénéficié, avec un recul sur plus de quinze ans. En France, 314 centres hospitaliers, soit 510 oncologues, ont déjà choisi cette méthode de dépistage multiparamétrique. La simple généralisation de ce dépistage permettrait d'éviter des effets secondaires graves et des décès. D'autre part, d'un point de vue économique, le coût de ce test avec analyse des résultats s'élève à 180 euros et génère d'importantes économies dans la prise en charge des patients présentant un déficit en dihydropyrimidine déshydrogénase. Elle souhaiterait donc savoir si le Gouvernement envisage de rendre obligatoire et systématique le dépistage multiparamétrique pour les patients traités par fluoropyrimidines en cancérologie.

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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 12/07/2018

Les toxicités aiguës aux fluoropyrimidines (5-fluorouracile et capecitabine) chez les patients présentant un déficit en dihydropyrimidine déshydrogénase (DPD) font l'objet d'une attention et d'une surveillance particulière des autorités sanitaires nationales et européennes depuis plusieurs années. Les toxicités aiguës et précoces par surexposition en lien avec un défaut de métabolisation de fluoropyrimidines sont en effet rapportées chez des patients présentant un déficit en DPD. Les médicaments anticancéreux à base de fluoropyrimidines sont largement utilisés en cancérologie, on estime, selon des données de l'Institut national du cancer (INCa), qu'environ 90 000 patients y sont nouvellement exposés chaque année, pour le traitement de cancers avancés digestifs, colorectaux, mammaires, ovariens, ou des voies aérodigestives supérieures. Il faut toutefois distinguer les patients ayant un déficit enzymatique total, qui représentent environ 0,1 à 0,5 % de la population générale de ceux qui ont un déficit partiel qui représentent entre 3 à 10 %. Actuellement, ce risque est décrit dans le résumé des caractéristiques du produit (RCP), de l'autorisation de mise sur le marché (AMM) de la capecitabine (XELODA) et dans les RCP des spécialités à base de 5-fluorouracile. Plus précisément, il est contre-indiqué d'utiliser les fluoropyrimidines chez les patients ayant un déficit enzymatique total connu, car ces patients sont considérés comme extrêmement à risque de développer une toxicité. Pour les patients ayant un déficit partiel, l'activité de la DPD étant variable, un ajustement de la dose à administrer doit être réalisé. Cependant, en l'état actuel des connaissances, il est difficile de statuer sur un niveau adéquat de diminution de la dose en fonction de la capacité métabolique du patient, afin de traiter la pathologie cancéreuse dans les meilleures conditions d'efficacité et de sécurité. Depuis mars 2018, suite à des discussions au sein du comité européen de pharmacovigilance et d'évaluation des risques (PRAC), siégeant auprès de l'Agence européenne du médicament (EMA), des recommandations plus précises de dépistage par technique de génotypage sont disponibles dans le RCP de capecitabine (XELODA). Ces recommandations, qui concernent également les spécialités à base de 5-fluorouracile, seront ajoutées aux RCP de ces produits courant 2018. Bien qu'il n'existe pas de consensus au niveau national et international sur les modalités de dépistage du déficit en DPD, des tests de génotypage et phénotypage sont actuellement disponibles en France (coût de 110,7 € pour le génotypage et 40,5 € pour le phénotypage, liste complémentaire d'actes). Des recommandations à destination des professionnels de santé qui prescrivent les fluoropyrimidines, ont été publiées par le Groupe de Pharmacologie Clinique Oncologique (GPCO) et le Réseau national de pharmacogénétique (RNPGx) en février 2018 et relayées par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Ces recommandations synthétisent l'état actuel des connaissances sur les modalités de détection et de prise en charge des déficits en DPD pour des patients éligibles à un traitement par fluoropyrimidines. En raison de cet enjeu de santé publique, un projet de recherche clinique a fait l'objet d'une promotion dans le cadre du programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) 2014 : FUSAFE « Dépistage du déficit en dihydropyrimidine deshydrogénase (DPD) pour éviter les toxicités sévères aux fluoropyrimidines : Méta- analyses et état des lieux des pratiques en France. », coordonné par le GPCO-RNPGx. Ce projet vise notamment à clarifier les performances des différentes stratégies existantes de dépistage du déficit en DPD – génotypage et phénotypage et élaborer des propositions collégiales pour une future prescription sécurisée des fluoropyrimidines basée sur le dépistage pré-thérapeutique des déficits en DPD. Les conclusions de ce PHRC seront publiées courant 2018. En parallèle,  l'INCa souhaite mettre en place un groupe de travail sur ce sujet et rendra ses conclusions sur les modalités des techniques de dépistage et d'utilisation de ces tests en pratique fin 2018.

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