Question de M. de NICOLAY Louis-Jean (Sarthe - Les Républicains) publiée le 10/05/2018
M. Louis-Jean de Nicolaÿ attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les orientations du Gouvernement concernant la réforme du « reste à charge 0 » (« RAC 0 ») en optique. Priorité du quinquennat en matière de santé, l'état actuel des discussions entre les organisations représentatives des opticiens, les organismes complémentaires de santé, la direction de la sécurité sociale et les représentants des patients laisse entrevoir que cette réforme, promise comme particulièrement ambitieuse en termes d'accès aux soins, ne sera pas à la hauteur de ses objectifs, sur la forme comme sur le fond.
Sur le fond, le projet de réforme en l'état pose plusieurs difficultés : sur le plan sanitaire, les mesures proposées par le Gouvernement prévoient notamment que le renouvellement des équipements visuels ne sera pris en charge que pour des baisses d'acuité visuelle très significatives (supérieures à 0,5 dioptrie). En deçà, le renouvellement ne serait pas couvert. Cette réforme ne répondra donc pas aux difficultés des dizaines de millions de Français souffrant de problème de vue, avec aucune disposition sur la prévention par exemple.
Sur le plan économique, les tarifs que le Gouvernement souhaite fixer pour les verres intégrés dans l'offre « RAC 0 » sont insuffisants au regard de la qualité exigée, qui génère des coûts de production bien supérieurs. Couplées à la baisse des plafonds des contrats responsables, ces mesures auront des répercussions fortes pour l'ensemble des acteurs de la filière de santé visuelle.
Sur la forme, il semble que la réforme du « RAC 0 » en optique ne sera pas soumise à l'examen du Parlement, contrairement à ce qu'elle avait annoncé. Le cœur du dispositif (contenu du panier de soins, modalités de prise en charge, conditions de renouvellement des lunettes...) serait en effet fixé prochainement par voie réglementaire. Cette méthode remet en cause le rôle de la représentation nationale ainsi que du débat parlementaire, pourtant légitimes pour statuer sur ce dossier de santé et de justice sociale.
Ainsi, au regard de l'inquiétude de l'ensemble des acteurs du secteur, mais aussi des patients, sur ce volet optique de la réforme, il lui demande dans quelle mesure le Gouvernement compte corriger ces conditions extrêmement restrictives qui in fine limiteraient fortement le nombre des bénéficiaires potentiels et remettraient ainsi en cause l'objectif même qu'il s'est fixé de diminuer le taux de renoncement aux soins pour des raisons financières et de réduire les inégalités territoriales en matière d'accès aux soins.
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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 24/05/2018
Après des échanges techniques qui ont débuté dès le mois de novembre 2017, la ministre des solidarités et de la santé a ouvert le 23 janvier 2018 une phase de concertation sur la réforme du « reste à charge zéro ». L'objectif du Gouvernement est de diminuer via cette réforme le taux de renoncement aux soins pour des raisons financières dans trois secteurs : la prothèse dentaire, l'audioprothèse, l'optique médicale. Plus précisément, il s'agit d'assurer un reste à charge nul après l'intervention combinée de l'assurance maladie obligatoire et de l'assurance maladie complémentaire. Le « reste à charge zéro » s'appliquera à un panier de soins nécessaires et de qualité, c'est à dire que les dispositifs de ce panier doivent permettre de répondre de façon médicalement pertinente aux besoins de santé et dans des conditions correspondant à une attente sociale légitime, par exemple en matière d'amincissement des verres pour les personnes très myopes. La liberté de choisir et de proposer sera préservée : il doit être possible à tout un chacun de s'équiper ou de recourir à des soins prothétiques sans reste à charge, mais il sera loisible à toute personne de faire un autre choix ; il s'agit de passer du reste à charge subi au reste à charge choisi. Les professionnels auront la liberté de proposer d'autres prestations en dehors de ce panier. Enfin, tous les contrats responsables devront proposer le reste à charge zéro, mais les assureurs complémentaires pourront continuer à proposer, au-delà de ce socle, d'autres offres de prise en charge. Au vu de l'importance du projet de reste à charge zéro pour les trois secteurs concernés, le Gouvernement privilégie une large concertation avec les acteurs concernés : les fabricants et distributeurs de dispositifs médicaux, les professionnels de santé, les organismes complémentaires de santé et les représentants des patients. Le cadre de concertation et de négociation pour les soins dentaires est le cadre conventionnel entre la caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) et les représentants des chirurgiens-dentistes : les négociations ont débuté en septembre 2017 et se poursuivent. Dans le secteur de l'optique et de l'audioprothèse, dans le cadre des échanges techniques entamés en novembre dernier avec les services du ministère, chaque partenaire a été invité à produire une contribution sur les différents volets de la réforme. Les réunions de concertation ont repris début mars et se poursuivront jusqu'à la fin mai 2018. Le Gouvernement entend laisser la négociation se dérouler librement et chacun est amené à exprimer ses positions et propositions. Il n'arrêtera ses décisions qu'à l'issue de cette phase et mobilisera en conséquence les leviers conventionnels, réglementaires et législatifs qui s'avèreront nécessaires.
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