Question de M. CHAIZE Patrick (Ain - Les Républicains) publiée le 26/04/2018
M. Patrick Chaize appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les difficultés que rencontrent les scieries pour s'approvisionner en bois, et plus particulièrement en chênes.
Troisième plus grande surface forestière d'Europe, la France est le premier producteur de chênes en Europe et le troisième au niveau mondial.
Pour autant, et bien qu'elle ait massivement investi pour sa modernisation, la filière est sinistrée. Selon les services douaniers français et chinois, un quart à un tiers des grumes de chêne collectées dans les forêts françaises quittent le sol avant d'avoir été transformées. Cette hausse des exportations des grumes de chêne prélevées sur les massifs forestiers français prive les scieries hexagonales de matière première, d'où une activité de ces dernières équivalente à 60 % seulement de leur capacité. La préemption par les négociants internationaux des grumes avant transformation, principalement récoltées en forêt privée, serait la cause de cette situation. Selon les professionnels, 80 % des grumes exportées sont des grumes dont les scieurs auraient besoin pour faire fonctionner leurs usines. Dans l'Ain, ce sont ainsi des quantités importantes de chênes et de chênes rouges qui sont exportées en grumes, soit sans transformation, vers l'Asie. Ces pratiques qui relèvent de marchés de masse où seul le volume est important, interviennent en dehors de toute préoccupation de l'avenir de la forêt française, sans respect du patrimoine forestier, des sols fragiles des plaines ou des arbres d'avenir que le bon sens devrait inciter à laisser sur pied afin d'assurer la ressource de demain.
Dans ce contexte, il y a lieu de limiter les fraudes à l'exportation de grumes, l'une des rares matières premières que possède la France, de rééquilibrer l'approvisionnement des scieries françaises et de favoriser l'exportation des produits transformés à base de bois « made in France ». Les pays vers lesquels la France exporte aujourd'hui du bois brut resteraient des partenaires commerciaux privilégiés, destinataires de produits transformés en France.
Alors que la situation constatée représente une menace grave et grandissante pour les scieurs de chênes mais aussi pour l'ensemble de l'activité des filières du bois, du meuble et du parquet, il lui demande de bien vouloir lui faire part des mesures qu'il envisage de prendre à court et long terme, afin de favoriser la transformation en local de la ressource forestière, dans l'intérêt de nos entreprises.
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 05/07/2018
Les professionnels de la première transformation du bois -notamment les scieries de chêne- connaissent, depuis plusieurs années, des difficultés d'approvisionnement en matière première. Au regard de cette conjoncture, la mise en place du « label UE » par l'office national des forêts participe de la volonté de pérenniser l'outil de transformation du bois et d'assurer un développement équilibré de la filière bois dans son ensemble. Afin de résoudre les difficultés d'approvisionnement, le Gouvernement a engagé des actions structurantes pour permettre de maintenir le tissu industriel de transformation du bois et répondre au double objectif de création de richesse nationale et d'emplois dans les territoires ruraux. La mission d'appui à la clarification de l'organisation de la filière forêt-bois confiée à M. Jean-Yves Caullet en début d'année 2018 resserrera les liens entre les différents acteurs de la filière. Leur rapprochement permettra d'améliorer la qualité du dialogue entre les familles professionnelles de l'amont à l'aval dans la perspective, in fine, de développer cette filière d'avenir, levier majeur de création de valeur ajoutée, de services environnementaux, de développement des énergies renouvelables et de lutte contre le changement climatique. France bois forêt (pour l'amont) et France bois industries entreprises (pour l'aval) ont été invités à travailler avec France bois régions à l'élaboration d'un plan de la filière « feuillus » d'ici à la fin juin 2018. Ce plan aura pour objectif de créer davantage de valeur et d'identifier les axes de transformation nécessaires pour faire face à la concurrence et gagner en compétitivité. Il sera assorti d'engagements des acteurs économiques les uns vis-à-vis des autres, précisera les objectifs à atteindre en terme de montée de gamme des produits ou de contractualisation à horizon de cinq ans. Concomitamment à cette démarche fédératrice, les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation travaillent à un nouveau dispositif de financement, conçu avec Bpifrance, et qui sera mis en uvre prochainement dans le cadre du grand plan d'investissement (GPI). Il permettra de soutenir l'investissement dans l'outil industriel de transformation du bois par l'attribution de prêts avec différé d'amortissement du capital durant la période de montée en puissance des équipements de production. Le GPI déploiera également deux outils en faveur de l'amont de la filière : un dispositif de subventions à l'investissement en faveur des pistes forestières et un dispositif de subvention en faveur de l'amélioration des peuplements. ll s'agit d'une part de subventionner les investissements réalisés par des propriétaires forestiers privés individuels ou regroupés et des communes forestières, pour l'amélioration de leur réseau de desserte -création de routes ou de pistes, mise au gabarit, création de place de dépôt ou de retournement, résorption de points noirs- afin d'augmenter les capacités de mobilisation de la ressource en bois, notamment en bois d'uvre, tout en diminuant l'impact environnemental. D'autre part, il s'agit d'encourager les investissements sylvicoles qui permettront d'améliorer la qualité des peuplements sur les moyen et long termes, de préparer les forêts aux conséquences du changement climatique et de maximiser la séquestration de carbone par les arbres, au bénéfice de la filière forêt-bois dans son ensemble. Par ailleurs, la feuille de route en cours de rédaction du comité stratégique de filière bois (CSF Bois) vise à concrétiser un développement de la filière ambitieux, créateur d'emploi et de valeur, fondé sur la demande des marchés et l'adaptation de l'offre nationale à cette demande, pleinement compatible avec la gestion durable des forêts et leur adaptation aux changements climatiques. Enfin, les services de l'État en région réunissent localement l'ensemble des parties prenantes pour partager un diagnostic et identifier les solutions à mettre en uvre qui s'appuieront sur des engagements réciproques des acteurs économiques.
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