Question de M. BONHOMME François (Tarn-et-Garonne - Les Républicains-A) publiée le 12/04/2018
M. François Bonhomme attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur les risques liés à la présence de nanoparticules de dioxyde de titane dans les médicaments.
En mars 2018 60 millions de consommateurs révélait dans une enquête que six spécialités de médicaments très courantes contenaient du dioxyde de titane, additif susceptible d'être présent sous forme de nanoparticules.
Il rappelle qu'une étude conduite par l'institut national de la recherche agronomique (INRA) en janvier 2017 démontrait que ce dioxyde de titane (TiO2), présent dans de nombreux produits, pourrait favoriser l'initiation de la cancérogénèse colorectale. L'INRA incite par là-même à la vigilance et à une « analyse des risques » chez l'homme concernant le recours à ces nanoparticules.
Néanmoins, dans les spécialités pharmaceutiques analysées par 60 millions de consommateurs le dioxyde de titane fait partie des excipients et ne joue donc aucun rôle thérapeutique ce qui amène à s'interroger sur son caractère indispensable dans ces médicaments.
Il lui demande de bien vouloir lui indiquer quelles mesures le Gouvernement entend prendre concernant cette question.
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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 12/07/2018
Le dioxyde de titane (TiO2), sous forme d'additif alimentaire (E171), est un opacifiant (couleur blanche) utilisé pour blanchir les formulations pharmaceutiques ; il entre ainsi en tant qu'excipient dans la composition de plusieurs milliers de médicaments, aucun risque particulier pour la santé humaine n'ayant été identifié à ce jour. Il est aussi très largement utilisé dans l'industrie alimentaire. Deux études sur des rats conduites par l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), publiées en janvier 2017, indiquent que les lots commerciaux de E171 utilisés dans les études contenaient jusqu'à 36 % de particules inférieures à 100 nanomètres par rapport au nombre total de particules. Ces études rapportent une saturation du système immunitaire par les particules, qui a pour conséquence une faible inflammation de l'intestin et une diminution des compétences du système immunitaire. Dans l'étude menée chez le rat pendant cent jours, les auteurs ont observé une augmentation de la formation d'un marqueur très précoce, qui se retrouve chez les patients atteints d'un cancer du côlon. L'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) a été saisie pour rendre un avis sur les conséquences sanitaires des résultats de ces études. Les médicaments étant également concernés, l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a été associée aux travaux. Dans son avis du 4 avril 2017, l'ANSES reconnaît la valeur scientifique des publications de janvier 2017 et des résultats qui en résultent, estimant qu'elles apportent de nouveaux éléments quant à un effet promoteur potentiel du E171 sur la survenue de cancer du côlon. Récemment, des enquêtes de 60 millions de consommateurs et de UFC Que-choisir ont mis en évidence jusqu'à 40 % de TiO2 sous forme nanométrique dans certains médicaments. Des publications dans la littérature scientifique rapportent en outre des effets délétères sur la descendance et sur les organes de la reproduction, ainsi qu'une possible altération du développement cognitif chez le ftus. Le gouvernement français a donc saisi la Commission européenne afin que l'agence européenne de l'alimentation (EFSA) réévalue le risque du E171 et que des mesures soient prises si nécessaire au niveau européen, dès lors que le Ti02 est susceptible de constituer un risque pour la santé humaine. En 2016, en l'absence de données suffisamment robustes, l'EFSA n'avait pas été en mesure de fixer une valeur toxicologique de référence et avait estimé qu'il n'y avait pas de risque lié à sa consommation sous forme d'additif alimentaire. L'ANSM a par ailleurs saisi l'agence européenne des médicaments ; des travaux sont en effet actuellement en cours, portant plus largement sur l'ensemble des excipients sous forme nanométrique, entrant dans la composition des médicaments autorisés. Enfin, à ce jour, il résulte des dispositions du code de la santé publique, portant transposition de la directive 2001/83/CE instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain, que seuls doivent être mentionnés, tant sur l'étiquetage du conditionnement extérieur des médicaments que sur la notice d'information destinée aux patients, les excipients dont la connaissance est nécessaire pour une utilisation efficace et sans risque du médicament (excipients à effet notoire), ce qui n'est pas le cas du E171. Néanmoins, lorsque de nouveaux éléments scientifiques seront disponibles, les autorités sanitaires prendront toute mesure nécessaire à la protection de la santé publique, au vu en particulier de la position de la Commission européenne et le cas échéant en lien avec le projet de loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable, en cours de discussion au Parlement et qui comporte à ce stade une disposition prévoyant : « Dans les conditions prévues à l'article L. 521-17 du code de la consommation et à l'article 54 du règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l'Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires, le Gouvernement prend les mesures réglementaires visant à la suspension de la mise sur le marché de l'additif E 171 (dioxyde de titane - TiO2) ainsi que des denrées alimentaires en contenant. Le Gouvernement adresse, au plus tard le 1er janvier 2019, un rapport au Parlement sur toutes les mesures prises concernant l'importation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux de toute denrée alimentaire contenant du dioxyde de titane en tant qu'additif alimentaire (E 171) et les usages grand public. ». Enfin, il peut être indiqué qu'en application de l'article 60 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, le Gouvernement remettra prochainement au Parlement un rapport sur les nanomatériaux dans les médicaments et dispositifs médicaux.
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