Question de Mme COHEN Laurence (Val-de-Marne - CRCE) publiée le 22/03/2018
Mme Laurence Cohen interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur l'intention du Gouvernement quant à la privatisation des trois aéroports franciliens, Orly, Roissy Charles-de-Gaulle et le Bourget, dans le cadre de la future loi de plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE).
Aujourd'hui, l'État est le principal actionnaire de cette entreprise publique, avec 50,6 % des parts.
Vendre au privé rapporterait à l'État environ 8 milliards d'euros. Cette martingale pourrait certes abonder un fonds d'innovation comme l'envisage le Gouvernement, mais cette privatisation engendrerait surtout de nombreux problèmes : aéroports de Paris (ADP) étant en situation de monopole sur les aéroports de la région parisienne, un rachat par une société privée pourrait fortement augmenter les prix et réduire la qualité des services au détriment de ses clients, notamment Air France ; dans un contexte national et international de lutte contre le terrorisme, il semblerait plus compliqué de garantir la sécurité via notamment la gestion des frontières en confiant ces missions à une entreprise privée ; la privatisation des autoroutes ainsi que celle plus récente de l'aéroport de Toulouse s'avèrent être un gouffre financier pour la Nation, pour ne pas dire une erreur stratégique, tant les appétits financiers sont à l'opposé d'une logique de service public, répondant à l'intérêt général.
De plus, compte tenu du nombre d'emplois générés par ces aéroports, une privatisation aurait très certainement des répercussions négatives sur la nature-même des emplois et les conditions de travail des salariés.
Au regard de tous ces éléments, elle lui demande s'il entend revenir sur son projet et rester l'actionnaire principal d'ADP.
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Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 18/07/2019
La loi autorisant la privatisation d'ADP prévoit les dispositions nécessaires pour renforcer les leviers de régulation et de règlementation pour s'assurer que la principale porte d'entrée du territoire français continue de fournir un service de qualité pour les transporteurs aériens et pour les voyageurs, dans le respect des plus hauts standards de sécurité et de sûreté. Tout d'abord, les fonctions régaliennes de l'État en matière de sécurité (police aux frontières, contrôles douaniers) des personnes et des biens resteront assurées par les services de l'État. Les exigences en termes de sûreté (contrôle des personnes et des biens) sont prévues par une régulation européenne et nationale qui n'est pas négociable par les aéroports qui ne font que la mettre en uvre. S'agissant de la qualité de service, la privatisation s'accompagne d'un aménagement du cadre régulatoire qui se traduit par l'inscription dans la loi des pouvoirs de contrôle dont dispose aujourd'hui l'État. L'État pourra ainsi s'assurer que les investissements et les travaux nécessaires au bon fonctionnement du service public aéroportuaires sont bien réalisés. Il pourra imposer à l'opérateur de maintenir une qualité de service aux meilleurs standards des aéroports internationaux. En cas de désaccord avec ADP, c'est l'État qui fixera les objectifs de qualité de service à atteindre. Ce cadre règlementaire est proportionné puisqu'il tient compte du fait qu'ADP est un acteur économique incontournable non seulement pour l'Ile de France mais également pour tout le pays. Il est sécurisant pour les usagers, les compagnies aériennes et l'État dans la mesure où il inscrit dans le marbre de la loi des pratiques déjà à l'uvre entre l'État régulateur et l'entreprise. Pour ce qui est des tarifs, le système de régulation garantit que des hausses des redevances payées par les compagnies aériennes ne peuvent être liées qu'à des investissements sur les plateformes aéroportuaires et donc à une augmentation de la capacité ou de la qualité de service, ce qui bénéficiera aux compagnies. Par ailleurs, comme aujourd'hui, les compagnies aériennes continueront d'être associées aux discussions pour fixer les redevances dans le cadre du contrat de régulation économique. En cas de désaccord entre l'État et ADP, l'État fixera unilatéralement les tarifs ce qui constitue une garantie de modération tarifaire pour les compagnies. Concernant les employés d'ADP, la loi ne modifie pas les statuts du personnel d'ADP et la modification de ces statuts reste soumise à l'approbation de l'État. Il faut noter que les privatisations des autoroutes et de l'aéroport de Toulouse ont été réalisées sur la base de valorisations supérieures à celles observées pour des transactions comparables et ne se sont pas traduites par une détérioration de la qualité du service pour les usagers. Une procédure de référendum d'initiative partagée a été engagée au mois de mai 2019. Le Gouvernement a annoncé qu'aucune opération de privatisation n'aurait lieu pendant cette procédure.
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