Question de M. BOCQUET Éric (Nord - CRCE) publiée le 08/02/2018
M. Éric Bocquet interroge Mme la ministre, auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports, sur la hausse des tarifs des péages d'autoroutes applicables au 1er février 2018.
Il est annoncé une hausse des tarifs des péages en moyenne de 1 à 2 % (de 3 à 4 % sur les axes secondaires).
Or, selon l'autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER), cette augmentation excède le juste niveau qu'il serait légitime de faire supporter aux usagers. Cela est d'autant plus vrai que le plan d'investissement décidé par le Gouvernement et les sociétés autoroutières en janvier 2017 portait sur la réalisation de 57 opérations qui devaient être financées par des hausses des tarifs de 0,1 % à 0,4 % par an sur les années 2019, 2020 et 2021.
Toutefois, un accord datant d'avril 2015 et qui fait suite au gel des tarifs cette même année, aurait été conclu entre l'État et les concessionnaires avec notamment la prise en charge de 3,2 milliards d'euros d'investissement payés par les sociétés mais en contrepartie d'une stabilité fiscale, d'un prolongement des concessions de deux à quatre ans, mais aussi d'une hausse additionnelle des tarifs jusqu'à 2023. Les usagers paieront de l'ordre de 500 millions d'euros de péages supplémentaires sur la durée restante des concessions pour compenser le coût du gel des tarifs en 2015.
Enfin, il est rappelé encore la recherche de la rentabilité maximale de ces mêmes sociétés qui ne cessent de progresser depuis la privatisation initiée en 2002, avec notamment l'automatisation des péages et la suppression de personnels, une augmentation des tarifs (plus de 20 % de 2006 à 2016) plus forte que l'inflation et un chiffre d'affaires des sociétés qui s'est élevé à 9,4 milliards d'euros en 2015.
Il lui demande de confirmer ou d'infirmer la véracité des termes de l'accord d'avril 2015 et de préciser les mesures qu'elle entend porter pour réguler les tarifications des péages qui pèsent injustement sur les automobilistes et qui servent avant tout à augmenter la part des bénéfices des sociétés privées d'autoroutes.
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Réponse du Ministère auprès du ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargé des transports publiée le 07/06/2018
En premier lieu, il est nécessaire de rappeler qu'un contrat de concession autoroutière est un contrat par le biais duquel le concédant, en l'occurrence l'État, confie à une société les missions de financer, de concevoir, de construire et d'exploiter un ouvrage. Les seules ressources de cette société sont constituées par les recettes des péages et éventuellement par des contributions publiques qui s'avéreraient nécessaires pour assurer l'équilibre économique de la concession. La société concessionnaire recourt à des emprunts pour financer les travaux de construction des ouvrages et mobilise également des capitaux propres qui sont apportés par ses actionnaires. Les ressources de la société sont donc utilisées pour rembourser intégralement les emprunts, les capitaux propres et leur rémunération et pour assurer les frais d'entretien et d'exploitation qui apparaissent à la mise en service des ouvrages. De la même manière, la réalisation de tout nouvel aménagement sur le réseau déjà en service d'une concession qui n'est pas prévue dans le contrat liant la société concessionnaire d'autoroutes et l'État doit lui être compensée afin de maintenir l'équilibre contractuel et financier entre l'État et cette société. En second lieu, il convient de distinguer les hausses annuelles des tarifs des péages autoroutiers, sur lesquelles aucun avis de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER) n'est rendu, et les projets de modification des contrats de concession sur lesquels cette Autorité a été amenée à se prononcer dans le courant de l'année 2017. Sur le premier point, les tarifs des péages autoroutiers évoluent chaque année au 1er février, en application du décret n° 95-81 du 24 janvier 1995 relatif aux péages autoroutiers et des contrats de concession. Ce décret prévoit notamment une augmentation minimale à hauteur de 70 % de l'inflation, afin d'indexer les tarifs des péages aux charges générées par l'exploitation et l'entretien des autoroutes. Pour 2018, l'inflation prise en compte s'est élevée à 1,03 %, générant une hausse minimale de 0,72 %. Par ailleurs, pour certaines sociétés, des hausses supplémentaires ont été contractualisées pour compenser la réalisation d'opérations nouvelles non prévues initialement dans les contrats, comme la construction ou l'élargissement de tronçons autoroutiers. En l'espèce, pour 2018, seules les sociétés APRR et AREA sont concernées. Ces hausses s'élèvent à 0,52 % pour APRR et 0,56 % pour AREA. Enfin, en 2016, 2017 et 2018, une hausse tarifaire additionnelle comprise entre 0,6 et 0,8 % compense la hausse intervenue en 2013 de la redevance domaniale acquittée par les sociétés concessionnaires. Au total, la hausse tarifaire au 1er février 2018 pour les sociétés concessionnaires historiques a été comprise entre 1,3 et 2 %. Sur le second point, l'ARAFER a été amenée à rendre des avis consultatifs sur le nouveau plan d'investissement autoroutier. Ce plan vise notamment à contribuer au développement économique des territoires, à favoriser leur desserte, à améliorer la qualité des infrastructures et à faciliter la transition énergétique et écologique des autoroutes concédées. Outre une participation financière substantielle des collectivités locales concernées, ce plan a vocation à être financé par des hausses tarifaires additionnelles limitées, de l'ordre de 0,15 % à 0,35 % sur les années 2019 à 2021. Sur la base des avis rendus par l'Autorité, l'État a mené des analyses complémentaires visant à répondre aux critiques formulées par celle-ci, et a ajusté le contenu et les conditions économiques de ce plan d'investissement avec les sociétés concessionnaires au bénéfice des usagers de l'autoroute. Le plan ainsi amendé a été porté par l'État à l'examen du Conseil d'État. En dernier lieu, en ce qui concerne la situation des sociétés concessionnaires, il est utile de rappeler que le groupe de travail parlementaire réuni à ce sujet par le Premier ministre en 2014 avait conclu que l'évaluation de la rentabilité des concessions était un exercice délicat et que les sociétés concessionnaires ne réalisaient pas des « surprofits » exceptionnels, au regard de la dette qu'elles doivent rembourser. Le groupe de travail a également conclu à ne pas retenir l'option de résiliation des concessions dont le montant calculé de l'indemnité était considérable et difficilement supportable pour les finances publiques. C'est ainsi que les avenants aux contrats de concession, validés par décret en Conseil d'État en août 2015 après l'aval de la Commission européenne, ont permis au Gouvernement de solder les négociations conduites avec les sociétés concessionnaires d'autoroutes, de rééquilibrer ces contrats et de les moderniser afin : de mieux garantir l'intérêt des usagers et de l'État ; de dégager des ressources nouvelles pour le financement des infrastructures de transport avec le versement par les sociétés concessionnaires d'autoroutes d'un milliard d'euros au profit de l'amélioration des infrastructures de transport du pays, dont 300 millions d'euros au cours des trois premières années qui ont permis un programme spécifique d'accélération de la maintenance des réseaux routier national et fluvial ; de contribuer à la reprise de l'activité économique dans le secteur des travaux publics grâce à la conclusion d'un « plan de relance autoroutier » d'un montant de 3,27 milliards d'euros générant près de 10 000 emplois directs et indirects sur la durée des travaux. Désormais figurent dans les contrats de concession des clauses plafond encadrant la rentabilité des sociétés concessionnaires et des indicateurs de performances et de qualité de service ont été également introduits. Toutes ces dispositions sont parfaitement publiques et sont contenus dans les avenants à ces contrats de concession qui ont été publiés au Journal officiel de la République française le 23 août 2015.
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