Question de Mme FÉRAT Françoise (Marne - UC) publiée le 14/12/2017

Mme Françoise Férat attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur les places libres en prison.
Alors que les chiffres de la surpopulation carcérale en France est alarmante (moyenne de 139 % avec des pics à 200 % en Île-de-France), un chiffre paraît surprenant : 4 000 places seraient inoccupées dans nos établissements pénitentiaires !
Une partie infime peut probablement s'expliquer par les nouvelles cellules momentanément vacantes dans les bâtiments neufs ou rénovés. En revanche, des criminologues et autres experts soulèvent des interrogations légitimes restées bien souvent sans réponse de la part de l'État.
Les établissements réservés aux condamnés pour une peine de plus de deux ans (maisons centrales, centres de détention ou centres de semi-liberté) affichent un numerus clausus, permettant de ne pas accueillir plus de détenus que de places disponibles, pour des raisons de sécurité. Or, certains comptent un sous-effectif : il en existe avec 350 détenus pour 400 places ! On peine à trouver les évaluations de ces décisions.
Ensuite, il serait intéressant de connaître les raisons du surnombre des places dans les établissements pour les mineurs et pour les femmes (surestimation par l'administration…) où trop de cellules sont vides.
Enfin, la question de la répartition territoriale questionne également les spécialistes.
Un rapport documentant et chiffrant précisément les causes de cette vacance a régulièrement été demandé, sans succès.
Elle lui demande de donner les précisions sur cette surprenante vacance pénitentiaire.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 15/02/2018

Il existe deux grandes catégories d'établissements pénitentiaires : les maisons d'arrêt et les établissements pour peines. Au 1er janvier 2018, la densité carcérale était de 118 % pour l'ensemble des établissements pénitentiaires et de 139 % pour les seules maisons d'arrêt. Ces dernières accueillent les personnes prévenues ainsi que les personnes condamnées dont la peine ou le reliquat de peine n'excède pas deux ans. Les établissements pour peines (maisons centrales, centre de détention, centres de semi-liberté,…) accueillent les autres personnes condamnées. L'affectation des personnes détenues se fait en respectant cette distinction mais aussi en tenant compte du profil de la personne incarcérée afin de ne pas perturber les équilibres de détention, du respect des liens familiaux et enfin de la sécurité des établissements. L'occupation des places vides ne peut se réduire à un examen mathématique.  Le respect de l'encellulement individuel et donc d'un numerus clausus au sein des établissements pour peines, dans un contexte de surpopulation pénale chronique et durable, entraîne inévitablement la constitution en maison d'arrêt de listes d'attente de personnes condamnées qui ont vocation à rejoindre un établissement pour peines. Pour favoriser ces affectations, l'administration pénitentiaire met en œuvre une politique d'orientation des personnes détenues condamnées dynamique et constante afin d'optimiser l'utilisation des places en centres de détention et en maisons centrales.  Un décret du 4 mai 2017 est venu assouplir les conditions d'affectation en maison d'arrêt des prévenus pour garantir une meilleure répartition des personnes placées sous main de justice dans les établissements pénitentiaires.  Ce même décret a simplifié la constitution des dossiers d'orientation pour accélérer l'affectation des personnes condamnées dans un établissement pour peines.  Enfin, la volonté de faire coïncider les besoins de places au choix des lieux des futures constructions du programme 15 000 contribuera à rationaliser la politique d'affectation, tout en garantissant, à terme, l'encellulement individuel à 80 % des détenus écroués en maison d'arrêt.  Les agglomérations choisies l'ont été en fonction de la surpopulation carcérale et de la nécessité de localiser les maisons d'arrêt près des villes pour maintenir les liens familiaux, pour être à proximité des juridictions et de mieux préparer la réinsertion des personnes détenues.  La lutte contre la surpopulation pénale est aussi une réponse à la nécessaire prise en compte du respect de la dignité des conditions de détention pour les personnes détenues et l'amélioration des conditions de travail des personnels pénitentiaires.  Concernant les quartiers mineurs (QM) et établissements pour mineurs (EPM), le taux d'occupation était au 1er janvier 2018 de 66 %, soit 772 détenus mineurs pour 1 187 places. Il convient de rappeler qu'au cours de l'année passée, plusieurs directions interrégionales des services pénitentiaires ont dépassé les 80 % d'occupation (Bordeaux, Lille, Lyon, Paris, Marseille, Toulouse) et plusieurs QM ont été saturés. Des effectifs élevés dans ces structures sont incompatibles avec une prise en charge individualisée des mineurs détenus et traduisent un réel besoin de places pour les accueillir. Àcet égard, la direction de l'administration pénitentiaire sollicite les QM et EPM qui bénéficient de taux d'occupation structurellement bas (à l'instar des QM du Havre et de Caen) dans le cadre d'une politique volontariste de transferts aux fins de régulation des effectifs.  Enfin, le taux d'occupation global des établissements accueillant des femmes était, au 1er janvier 2018, de 94 %, soit 2 393 femmes détenues pour 2 543 places. Si certains quartiers de centre de détention pour femmes connaissent des taux d'occupation bas, leur répartition territoriale vise à garantir un maillage suffisant et le maintien des liens familiaux. Cela permet aux femmes détenues d'être orientées en établissement pour peines dans de brefs délais et de limiter le temps passé en maison d'arrêt, où les possibilités d'investissement de leur parcours de détention et de préparation de leur sortie sont limitées.

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