Question de Mme LIENEMANN Marie-Noëlle (Paris - SOCR) publiée le 07/12/2017
Mme Marie-Noëlle Lienemann attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur les révélations concernant les pratiques suggérées par Airbnb aux hébergeurs inscrits sur sa plateforme.
La possibilité qu'offre la société Airbnb à ses hébergeurs d'être payés sur une carte prépayée rechargeable d'une société financière hébergée à Gibraltar participe de la même logique que l'on trouve dans le scandale des « Paradise papers » : ne pas participer à l'effort collectif par l'évitement fiscal. Ici pour les hébergeurs non déclarants, la fraude !
La société Airbnb ne peut pas prendre la France et son administration fiscale pour des niais ! Elle a bel et bien organisé un système qui favorise la fraude fiscale et toutes ses arguties juridiques ne résistent pas à l'analyse. Si elle voulait favoriser un paiement par carte prépayée, elle pouvait choisir un système français, négocier avec des banques nationales et ne pas s'installer dans un paradis fiscal.
Il convient donc que le fisc se retourne contre Airbnb pour incitation à la fraude fiscale.
Mais il faut aller plus vite et, sans doute, réglementer le système des cartes prépayées.
Comme l'indique un expert en paradis fiscaux cité par France info : « ce type de comptes adossés à une carte ne sont pas des comptes bancaires à proprement parler. Ils échappent aux accords sur l'échange d'informations bancaires (que Gibraltar a signés avec la France), et restent très pratiques pour ceux qui veulent éviter que l'on sache qu'ils ont de l'argent ailleurs que dans leur pays de résidence ».
Dans l'immédiat, on peut contrecarrer la pratique d'Airbnb, changer la loi en imposant aux plateformes de déclarer les revenus des hébergeurs.
Le Sénat a voté lors de l'examen du projet de loi n° 107 (Sénat, 2017-2018) de finances 2018 un amendement (n° I-592, 23 novembre 2017) qui vise à simplifier et à clarifier le régime fiscal et social applicable aux utilisateurs de plateformes en ligne, fondé sur un seuil unique de 3 000 € permettant : d'exonérer les petits compléments de revenus occasionnels, et de tracer la frontière entre « particuliers » et « professionnels ». Le Gouvernement a donné un avis défavorable à cet amendement en première lecture. La deuxième lecture lui donnera l'opportunité de donner un avis favorable.
C'est pourquoi elle lui demande de saisir les services fiscaux dans un but de contrôle administratif et juridictionnel, de réglementer les cartes prépayées, de proposer une modification des règles déclaratives des plateformes en ligne et d'adopter le système maintes fois préconisé par le Sénat.
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Transmise au Ministère de l'économie et des finances
Réponse du Ministère de l'économie et des finances publiée le 27/12/2018
La France est engagée au plan national et international dans un effort de lutte contre les pratiques favorisant l'évasion et la fraude fiscales. Les travaux de l'organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et de l'Union européenne ont permis d'élaborer de nouveaux standards et des directives dont l'objectif est d'éviter que les multinationales n'échappent à leurs obligations fiscales ou favorisent les stratégies de contournement de l'impôt de leurs clients. Dès septembre 2017, dans le cadre des premiers échanges automatiques de renseignements sur les comptes financiers, la France a participé au dispositif avec 50 Etats et territoires. Ces informations permettent à l'administration fiscale de mieux appréhender les actifs financiers à l'étranger de résidents français qu'ils soient titulaires de comptes ou bénéficiaires effectifs de ceux-ci. Ces échanges ont vocation à s'amplifier à l'avenir. Les cartes prépayées sont susceptibles de favoriser des stratégies de contournement du dispositif d'échange automatique et plus largement d'évitement de l'impôt. En coordination avec ses partenaires, la France uvre activement à ce que ce type de cartes soit compris dans les échanges automatiques de renseignements sur les comptes financiers afin de s'assurer que leurs détenteurs déclarent correctement leurs revenus, ce qui nécessite encore un accord des autres États en ce sens. Par ailleurs, l'article 10 de la loi relative à la lutte contre la fraude adoptée par le Parlement le 10 octobre 2018 prévoit l'obligation pour les opérateurs de plateforme d'économie collaborative d'adresser à compter de 2020 à l'administration fiscale des informations relatives aux opérations réalisées par leurs utilisateurs. S'agissant des utilisateurs personnes physiques, les opérateurs devront communiquer les éléments d'identification de ces utilisateurs, ainsi que le montant et le nombre de transactions réalisées par ceux-ci au cours de l'année précédente. Ces dispositions s'appliquent aux opérateurs situés en France et à ceux situés à l'étranger, lorsque leurs utilisateurs résident ou réalisent des opérations en France. Ces informations seront ensuite adressées par l'administration fiscale à l'administration sociale. Les informations transmises aux administrations fiscale et sociale permettront d'appréhender les sommes perçues par les utilisateurs, indépendamment du mode de versement des sommes en question.
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