Question de M. MASSON Jean Louis (Moselle - NI) publiée le 02/11/2017
Sa question écrite du 3 mars 2016 n'ayant pas obtenu de réponse sous la précédente législature, M. Jean Louis Masson expose à nouveau à M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur le cas d'une commune rurale, disposant d'un domaine privé constitué de landes et de taillis, qu'elle souhaite mettre gratuitement à disposition d'un éleveur d'ovins pour le pâturage et le débroussaillage en vue de la protéger contre les feux. La commune envisage de conclure avec cet éleveur un prêt à usage. Il lui demande si la conclusion d'un tel prêt à usage est licite compte tenu du principe qui prohibe les libéralités consenties par les collectivités territoriales.
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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 30/08/2018
L'article L. 2221-1 du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) prévoit que les collectivités territoriales « gèrent librement leur domaine privé selon les règles qui leur sont applicables ». L'article 1875 du code civil dispose que « le prêt à usage est un contrat par lequel l'une des parties livre une chose à l'autre pour s'en servir, à la charge par le preneur de la rendre après s'en être servi ». L'article 1876 dispose que « ce prêt est essentiellement gratuit ». Le prêt à usage est donc un contrat de service gratuit dont le bénéficiaire détient l'usage de la chose prêtée sans que ne soit opéré aucun transfert patrimonial à son profit. Il n'en résulte ainsi aucun appauvrissement du prêteur. Tout acte par lequel une personne procure à autrui, ou s'engage à lui procurer un avantage sans contrepartie peut être considéré comme une libéralité. Le Conseil d'État, dans un arrêt du 17 mars 1893, Chemins de fer de l'est, a posé le principe de la prohibition des libéralités en droit public (voir aussi, Conseil d'Etat, 4 mai 2011, chambre de commerce et d'industrie de Nîmes, Uzès, Bagnols, Le Vigan). Néanmoins, l'arrêt du Conseil d'Etat, section contentieux, 3 novembre 1997, commune de Fougerolles, puis plus récemment, l'arrêt du Conseil d'Etat, 14 octobre 2015, commune de Châtillon-sur-Seine, admettent qu'une cession par une personne publique à une personne privée poursuivant des fins d'intérêt privé, à un prix inférieur à sa valeur, est justifiée s'il existe des motifs d'intérêt général et si la cession comporte des contreparties suffisantes. Or, le contrat de prêt à usage n'entraînant pas appauvrissement de la collectivité territoriale puisqu'elle reste propriétaire de la chose prêtée (article 1877 du code civil), la cession n'a pas à être assortie de contreparties suffisantes pour éviter la qualification de libéralité. Une collectivité pourra donc conclure un contrat de prêt à usage pour des terres agricoles sur le fondement de l'article 1875 du code civil sans qu'il soit qualifié de libéralité s'il poursuit un but d'intérêt général.
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