Question de M. CABANEL Henri (Hérault - SOCR) publiée le 29/11/2017
Question posée en séance publique le 28/11/2017
M. Henri Cabanel. Ma question s'adresse au ministre de l'agriculture et de l'alimentation et porte, elle aussi, sur le glyphosate. Ce seul mot peut soulever des tempêtes. Entre querelles d'experts et surenchère des lobbies, le consommateur n'y voit plus clair. Pourtant, il est précisément au centre de ce débat européen, car il est question de santé publique.
Comme il y a un doute, notre responsabilité est d'appliquer le principe de précaution, mais le législateur que nous sommes n'a aucun critère objectif pour appréhender la dangerosité ou non de ce produit. En effet, depuis 2015, l'Organisation mondiale de la santé a émis des avis contraires sur cet herbicide ; idem pour l'Agence européenne de sécurité des aliments. Comment s'y retrouver ? Car, autour de ce débat scientifique, on retrouve des enjeux économiques et financiers énormes.
La Commission européenne vient d'autoriser la commercialisation du glyphosate pour les cinq prochaines années. Le Président Macron affirme que la France interdira ce produit au plus tard dans trois ans.
Monsieur le ministre, vous aviez pourtant affirmé ici même qu'il n'y aurait aucune surtransposition des normes. Vous avez expliqué votre position, mais je crains que le délai de trois ans ne soit trop court.
Ce délai de trois ans est-il suffisant pour trouver, grâce à la recherche, un produit de substitution ? Des agriculteurs se sont déjà tournés vers des pratiques vertueuses qu'il faut encourager, mais une large majorité n'est pas encore sur cette voie. Car, derrière les effets d'annonce, derrière les postures, il y a la réalité d'une filière et d'une consommation qui passe majoritairement par la grande distribution, et où l'origine des produits est mondiale.
Au-delà de l'interdiction, il est donc primordial de mettre en place une véritable politique de traçabilité. Monsieur le ministre, êtes-vous d'accord ? Cela vous semble-t-il possible dans un délai aussi court ? Par exemple, qui assurera au consommateur français que le pain qu'il achète n'est pas issu de farine de blé provenant du Canada, où le glyphosate a été reconduit pour quinze ans ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 29/11/2017
Réponse apportée en séance publique le 28/11/2017
M. Stéphane Travert, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Cabanel, le sujet du glyphosate est une parfaite illustration des tensions qui peuvent exister entre le possible et le souhaitable.
La Commission européenne, vous le savez, a clairement cherché un possible. Elle devait dégager une majorité qualifiée au sein des vingt-huit États membres pour les prochaines années. Cette majorité qualifiée, elle l'a trouvée hier sur la durée du renouvellement de l'autorisation, fixée à cinq ans. C'est beaucoup mieux que les dix ans jusqu'alors envisagés. Pourtant, ce possible ne règle pas deux problèmes. Tout d'abord, il n'assure pas la sortie automatique du glyphosate à la fin de la période. Ensuite, il ne prévoit aucune restriction d'usage permettant de préparer progressivement cette sortie.
Le Président de la République a redéfini, hier soir, le souhaitable. C'est son rôle. Il faut sortir au plus vite du glyphosate, mais ne pas laisser les agriculteurs sans solution. Il a fixé, pour ce faire, une échéance dans trois ans.
Cette tension entre le possible et le souhaitable, monsieur le sénateur, est exactement le moteur des états généraux de l'alimentation que nous conduisons en ce moment même. Il s'agit de partager des diagnostics, d'identifier des contraintes, de coconstruire des solutions, l'ensemble des acteurs concernés étant engagés dans ces actions.
Le Gouvernement est au travail. Notre tâche est de savoir comment nous allons accompagner, demain, les agriculteurs dans la recherche de leurs nouvelles pratiques agronomiques, pour faire en sorte d'en finir avec ce pesticide dont nos concitoyens ne veulent plus.
Comment allons-nous y parvenir ? Nous allons, dans un temps donné, mobiliser la recherche, les instituts techniques, toutes les forces de l'innovation et les intelligences collectives pour régler cette question et pratiquer, enfin, une agriculture durable et respectueuse de l'environnement.
Nous soutenons bien évidemment les agriculteurs. Je n'ai qu'un seul but : faire en sorte de les accompagner le mieux possible pour que la « ferme France » reste compétitive. Nous avons en effet besoin de cette compétitivité pour aller, demain, chercher des marchés et permettre à tous les agriculteurs de vivre dignement de leurs revenus. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
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