Question de Mme BLONDIN Maryvonne (Finistère - Socialiste et républicain) publiée le 14/09/2017

Mme Maryvonne Blondin attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur l'emploi du tildé dans les documents officiels de l'administration.
Depuis le mois de mai 2017, la presse relaye les difficultés auxquelles se trouve confronté un couple rospordinois pour l'état civil de leur enfant. Si le service d'état civil a accepté cette orthographe, le procureur de la République de Quimper a refusé de valider la graphie du prénom breton Fañch, invoquant une circulaire datant du 23 juillet 2014 qui émane du ministère de la justice. Celle-ci rappelle en effet que le français est la langue de l'administration, précise les signes diacritiques utilisables pour l'état civil et rejette le « ñ » considéré comme étranger. Des difficultés similaires ont été rencontrées au tribunal de grande instance de Bayonne pour l'inscription à l'état civil de prénoms ou noms de famille basques.
Alors que la Constitution elle-même reconnaît, dans son article 75-1, les langues régionales comme « langues de France » appartenant au patrimoine national, la langue bretonne comme le basque et d'autres langues régionales encore se trouvent, dans ces affaires, reléguées au rang de pratiques accessoires.
Pourtant, ce signe est utilisé depuis des siècles, en latin, en français, en gallo, en breton, en basque. Il n'est pas une exclusivité castillane. Le Conseil culturel de Bretagne vient de réaliser, à cet effet, une étude retraçant la manière dont le « n tildé » est devenu étranger aux yeux de notre administration alors même que son utilisation est historique : appelé « tiltre » en France au Moyen-Age, il est utilisé par la royauté dans ses écrits officiels et apparaît même dans la célèbre ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539 qui impose l'utilisation de la langue française dans les actes de justice dans le domaine royal de l'époque !
Le président de la République a marqué son attachement à la diversité culturelle et linguistique et sa volonté de voir ratifier la Charte européenne des langues régionales durant son mandat. Dès lors, le refus de la mention du tildé à l'état civil apparaît aujourd'hui obsolète et vexatoire pour l'ensemble de nos cultures régionales qui en usent.
Elle l'interroge donc sur les dispositions juridiques qu'elle entend prendre pour résoudre cette question et permettre la mention du « ñ » dans l'ensemble des documents administratifs.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 29/03/2018

Le principe de liberté de choix de prénom d'un enfant,  consacré par la loi n°  93-22 du 8 janvier 1993 modifiant le code civil relative à l'état civil, à la famille et au droit de l'enfant et instituant le juge aux affaires familiales, ne permet toutefois pas de retenir un prénom comportant des signes diacritiques non connus de la langue française, celle-ci étant la seule admise pour l'établissement des actes publics, ainsi qu'il résulte, notamment, de l'article 2 alinéa 1er de la Constitution, dont le Conseil constitutionnel a déduit que les particuliers ne peuvent se prévaloir, dans leurs relations avec les administrations et les services publics, d'un droit à l'usage d'une langue autre que le français, ni être contraints à un tel usage. C'est la raison pour laquelle la circulaire (NOR JUSC1412888C) du 23 juillet 2014 relative à l'état civil rappelle que seules peuvent être employées les voyelles et consonne accompagnées d'un signe diacritique connu de la langue française : à - â - ä - é - è - ê - ë - ï - î - ô - ö - ù - û - ü - ÿ – ç, de même que les ligatures « ae » (ou « AE ») et « oe » (ou OE). Toutefois, les textes en vigueur, confortés par la jurisprudence, n'excluent pas que les communes puissent délivrer des livrets de famille bilingues, dès lors que les livrets de famille sont rédigés en langue française et que la traduction en langue régionale fait simplement office d'usage. 

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