Question de M. RAISON Michel (Haute-Saône - Les Républicains) publiée le 10/08/2017
M. Michel Raison attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la décision prise par l'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) de réduire la dose maximale de baclofène prescrite dans la prise en charge des patients alcoolo-dépendants.
À compter du 24 juillet 2017, la recommandation temporaire d'utilisation (RTU) ne permet plus de prescrire du baclofène à des posologies supérieures à 80 mg/jour, divisant par trois la prescription jusqu'alors autorisée.
Dans sa recommandation, l'agence nationale ajoute que le traitement devra être « réduit progressivement ».
Cette annonce rencontre une très forte opposition d'éminents médecins qui dénoncent dans une tribune adressée à la ministre des solidarités et de la santé cette décision « faite sans concertation avec les spécialistes de terrain (
), source d'une perte de chance pour de nombreux patients » et même dangereuse pour certains d'entre eux.
Face à la faiblesse de l'arsenal thérapeutique dans l'alcoolo-dépendance, il souhaite connaître les intentions du ministère face à cette levée de boucliers du corps médical et surtout, quels palliatifs elle prévoit de mettre en œuvre pour permettre cette « réduction progressive » et l'adaptation du traitement alors même que cette recommandation intervient dans une période de vacances des médecins.
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Réponse du Ministère des solidarités et de la santé publiée le 15/11/2018
Compte-tenu de résultats d'études suggérant que le baclofène aurait un effet sur la réduction de la dépendance et de l'appétence à l'alcool et devant une utilisation grandissante hors-AMM, prenant en compte un rapport bénéfice risque présumé favorable dans cette indication, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a élaboré en mars 2014 une recommandation temporaire d'utilisation (RTU) du baclofène (Liorésal 10 mg, comprimé sécable, Baclofène Zentiva 10 mg, comprimé sécable) dans le traitement de l'alcoolo-dépendance. Dans ce cadre, la dose maximale de baclofène avait été fixée à 300 mg par jour. Suite à une étude épidémiologique réalisée par la Caisse nationale de l'assurance maladie, en collaboration avec l'Institut national de la santé et de la recherche médicale et l'ANSM, pour évaluer l'efficacité et la sécurité du baclofène, rendus publics en juillet 2017 et publiés dans le journal de la société internationale de pharmacoépidémiologie (Pharmacoepidemiology and Drug Safety), revue de référence en pharmacoépidémiologie, la RTU a été modifiée pour des raisons de sécurité, de façon à limiter la dose maximale de baclofène à 80 mg/j. En effet, les résultats de cette étude ont montré que l'utilisation du baclofène est associée à un risque accru, augmentant avec la dose, d'hospitalisation et de décès par rapport aux traitements médicamenteux autorisés pour traiter la dépendance à l'alcool, c'est pourquoi la RTU ne permet plus de prescrire du baclofène à des posologies supérieures à 80 mg/ jour. Dans ce cadre, et afin d'assurer la continuité des traitements et la sécurité des patients traités, un courrier a été adressé aux professionnels de santé prescripteurs afin de les informer de cette nouvelle mesure et des précautions particulières à prendre autour de cette prescription. En ce sens, il a été rappelé aux prescripteurs que le traitement doit être réduit progressivement et que les patients en cours de traitement qui recevaient des doses supérieures à 80 mg/jour soient revus par leur médecin afin d'initier une réduction progressive de la posologie par paliers (réduction de 10 ou 15 mg tous les deux jours) pour éviter tout risque de syndrome de sevrage et qu'ils soient suivis de façon rapprochée, jusqu'à stabilisation de la posologie. L'ANSM a également renouvelé son appel à la prudence en cas de prescription de baclofène chez les patients présentant des troubles psychiatriques, en raison du risque d'aggravation d'une pathologie psychiatrique sous-jacente et/ou du potentiel risque suicidaire. Pour les patients épileptiques ou présentant des antécédents de crises comitiales, et pour lesquels un risque de diminution du seuil épileptogène est possible du fait de la prescription de baclofène, le traitement doit être instauré très progressivement et une surveillance étroite doit être effectuée tout au long de la prescription. Le protocole actualisé de la RTU ainsi que les informations destinées aux patients sont disponibles sur le site de l'ANSM (www.ansm.sante.fr). Parallèlement, le laboratoire ETHYPHARM a déposé une demande d'autorisation de mise sur le marché (AMM) auprès de l'ANSM pour BACLOCUR® (baclofène) dans l'alcoolo-dépendance. Il s'agit de la seule demande d'AMM déposée en Europe pour le baclofène dans cette indication. Dans le cadre de l'instruction de cette demande, en complément de son évaluation interne, l'ANSM s'est appuyée sur les avis d'un groupe d'experts indépendants (CSST) et d'une commission consultative qui a pu auditionner des professionnels de santé et des patients utilisant ce médicament. Au regard des données disponibles, dont l'expérience clinique rapportée par les différents acteurs concernés, et compte-tenu du problème de santé publique majeur que représente l'alcoolisme, l'ANSM a octroyé l'AMM à la spécialité BACLOCUR® (baclofène) à 10 mg, 20 mg et 40 mg dans l'alcoolo-dépendance, en raison de l'intérêt pour la prise en charge des patients en échec thérapeutique et donc d'un bénéfice pour la santé publique. Les conditions d'utilisation de cette spécialité, ainsi indiquée dans la réduction de la consommation d'alcool, en complément d'un suivi psychosocial, après échec des autres traitements, ont été précisées dans son AMM. Elles prévoient notamment une augmentation progressive des doses pour arriver à une posologie optimale adaptée à chaque patient, correspondant à la dose la plus faible, pour une bonne réponse thérapeutique et une tolérance acceptable. En outre, la posologie maximale ne doit pas dépasser 80 mg/jour. Par ailleurs, un suivi renforcé de la spécialité BACLOCUR® est prévu dès sa commercialisation. Sur la base de cette surveillance et de l'évolution des données scientifiques disponibles, l'ANSM pourra être amenée à réviser les conditions d'utilisation du baclofène dans cette indication. Enfin, la Recommandation Temporaire d'Utilisation du baclofène dans la prise en charge de patients alcoolo-dépendants, élaborée par l'ANSM en 2014 pour encadrer son utilisation hors AMM, est prolongée jusqu'à la commercialisation effective de la spécialité BACLOCUR®.
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