Question de Mme LABORDE Françoise (Haute-Garonne - RDSE) publiée le 03/08/2017

Mme Françoise Laborde attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la nécessité de renforcer la lutte contre le cyberterrorisme sur les réseaux sociaux. Ces dernières années, les groupes terroristes utilisent internet pour lancer des campagnes de recrutement, de radicalisation et de promotion basées sur l'apologie de crimes et d'actes terroristes. Dans une étude publiée en mars 2015, « Brookings institution », un « think tank » américain basé à Washington, met en évidence l'explosion du nombre de comptes créés par des réseaux djihadistes de soutien à « Daesh » sur le réseau twitter : 1064 en 2011, 2380 en 2012, 4378 en 2013, 11902 en 2014. Ce nombre atteint déjà 46 000 comptes pour les quatre derniers mois et 90 000 tweets échangés par jour, soit près de 1 % des échanges quotidiens (0,8 %). Plusieurs États membres de l'Union européenne ont pris des mesures pour lutter contre l'utilisation d'internet par les groupes de propagande terroriste, mettant sur pied des polices spécialisées dans le contrôle du cyberespace, par exemple. Ces services travaillent étroitement avec l'industrie numérique et les opérateurs de l'internet pour effacer les contenus suspectés. En France, une plateforme opérationnelle de signalement des publications faisant l'apologie du terrorisme et de la violence a été mise en place sur le site du ministère de l'intérieur, la plateforme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements (PHAROS). Elle reste néanmoins encore peu connue des utilisateurs de réseaux sociaux et de sites d'hébergement de vidéos. C'est pourquoi elle lui demande de dresser un premier bilan des signalements et de l'effectivité du dispositif PHAROS pour parer la menace terroriste afin de pouvoir encore l'améliorer et informer le grand public sur son efficacité grâce à des campagnes d'information et de prévention auprès du grand public, en particulier, sur les réseaux sociaux et auprès des usagers d'internet.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 22/03/2018

Depuis plusieurs années, d'importantes mesures ont été prises pour renforcer le dispositif de lutte antiterroriste, sur le plan juridique, sur le plan de l'organisation et sur le plan des moyens. Les capacités de lutte contre la propagande djihadiste sur internet ont en particulier été renforcées. Ces efforts se poursuivent, notamment sur le plan des moyens, et sur le plan juridique avec la loi du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme. S'agissant du système PHAROS (plate-forme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements), il s'agit effectivement d'un élément important du dispositif français de lutte contre la radicalisation et la propagande terroriste. La plate-forme, qui compte aujourd'hui 23 enquêteurs (policiers et gendarmes), a été créée dès 2006 au sein de l'office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication (OCLCTIC), placé au sein de la sous-direction de la lutte contre la cybercriminalité de la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ). La plate-forme PHAROS exploite le portail www.internet-signalement.gouv.fr, qui permet depuis 2009 aux internautes et aux acteurs d'internet de signaler les contenus illicites du web, dont, par exemple, les faits d'apologie du terrorisme. PHAROS mène également une veille proactive sur internet pour détecter des contenus illicites ou contribuer à la résolution d'enquêtes. Ce système constitue un repère fort pour les internautes confrontés à des contenus ou des comportements illicites. Il marque aussi la présence de l'État sur internet et rappelle que cet espace de liberté n'est pas une zone de non-droit. En 2017, le nombre total de signalements recueillis atteint 153 586. Ce nombre, en augmentation régulière depuis 2009, prouve que le dispositif est clairement identifié par les internautes. L'adresse du site www.internet-signalement.gouv.fr est d'ailleurs diffusée auprès des internautes par les sites gouvernementaux ainsi que par les entreprises de l'internet. Même s'il est en légère baisse par rapport aux pics des années 2015 et 2016 liés aux attentats, le nombre de signalements continue donc en tendance d'augmenter fortement (138 000 signalements en 2014). La plate-forme a développé au cours des années un réseau partenarial privilégié qui la place au carrefour de l'internet français. Ce partenariat s'étend aux grands prestataires de service américains (Google, Facebook, Twitter, etc.). De nombreux hébergeurs (Dailymotion, Skyrock, Doctissimo, etc.) et des associations (LICRA, SOS Homophobie, etc.) ont manifesté leur intérêt pour des comptes professionnels qui permettent d'accéder à un formulaire de signalement spécifique sur le site www.internet-signalement.gouv.fr. En 2017, la plate-forme a reçu 6 263 signalements en relation avec le terrorisme, soit 4 % du total des signalements (contre 11 423 en 2016 et 31 302 en 2015). La plate-forme analyse les signalements et les adresse aux services antiterroristes. Elle travaille également en liaison permanente avec l'European Union Internet Referral Unit(EU IRU) d'Europol, qui lutte contre les contenus de propagande terroriste au niveau européen. Grâce à un partenariat avec les grandes plates-formes de l'internet, cette coopération européenne a été renforcée début 2018 afin de diminuer le délai de retrait des contenus à caractère terroriste et d'étendre l'effectivité des mesures à un plus grand nombre de pays. L'incitation à la haine raciale ou religieuse constituant l'une des racines de la radicalisation, PHAROS s'est dotée dès 2015 d'une cellule spécialisée en matière de droit de la presse et de discriminations. Le système PHAROS met également en œuvre la procédure de blocage et de déréférencement administratif des contenus incitant à des actes de terrorisme ou en faisant l'apologie, en lien avec les fournisseurs d'accès à internet et les éditeurs de moteurs de recherche. En matière terroriste, 30 634 demandes de retrait de contenus ont été effectuées en 2017 (+1 004 %), ainsi que 90 demandes de blocage d'accès et 534 demandes de déréférencement. Lorsqu'un internaute tente de se connecter à un site dont l'accès est bloqué, il est immédiatement renvoyé sur une page d'information du ministère de l'intérieur lui expliquant la nature du blocage et l'informant sur les voies de recours. En juin 2017, le comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR) a sollicité la DCPJ pour rencontrer trois des grands acteurs du web (Google, Twitter et Facebook) concernés par la lutte contre la radicalisation sur internet. Des réunions bilatérales ont eu lieu entre la DCPJ et des représentants de chacun de ces acteurs. Des pistes ont été identifiées pour améliorer le retrait des contenus terroristes et des discours de haine en ligne et la diffusion des contre-discours. Le nouveau plan national de prévention de la radicalisation « Prévenir pour protéger », présenté par le Premier ministre le 23 février 2018, va permettre d'amplifier encore l'action conduite par l'État et ses partenaires. Le plan comporte en particulier des actions destinées à davantage impliquer les grandes plates-formes numériques dans la lutte contre la radicalisation, mais aussi à développer les contre-discours et, dans le milieu scolaire, à renforcer les capacités des jeunes à se prémunir face au risque de radicalisation dans l'espace numérique.

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