Question de M. LELEUX Jean-Pierre (Alpes-Maritimes - Les Républicains-R) publiée le 20/07/2017

M. Jean-Pierre Leleux attire l'attention de Mme la ministre de la culture sur l'article 31 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine. Par ce texte, le législateur a entendu revenir sur le régime de dévolution successorale du droit de suite qui excluait jusque-là toute possibilité de transmission de ce droit à un légataire, tel qu'une fondation. Lors des discussions parlementaires, plusieurs voix se sont exprimées pour demander que les légataires désignés par des auteurs déjà décédés, qui n'ont pu recevoir le droit de suite du fait de l'exclusion légale, puissent désormais en devenir titulaires conformément aux volontés de l'artiste. Une telle application rétroactive des règles de dévolution du droit de suite étant toutefois de nature à entrer en conflit, dans un certain nombre de cas, avec des principes à valeur constitutionnelle, le Gouvernement a proposé que les nouvelles règles de dévolution du droit de suite s'appliquent également aux successions déjà réglées, sous réserve qu'aucun héritier n'ait été régulièrement investi du droit de suite en application des règles antérieures : c'est l'objet de la disposition transitoire prévue au II de l'article 31 de la loi du 7 juillet 2016.

Un certain nombre de légataires d'artistes décédés, notamment des fondations, se trouvent aujourd'hui en situation de prétendre au bénéfice du droit de suite compte tenu de l'absence d'héritiers constatée au moment du décès de l'artiste. Le II de l'article 31 de la loi du 7 juillet 2016 soulève toutefois une difficulté d'interprétation, puisqu'il prévoit que lorsqu'il n'existe pas d'héritier régulièrement investi du droit de suite, il peut être fait application du nouvel article L. 123-7 du code de la propriété intellectuelle. Or celui-ci fait à nouveau mention, au troisième alinéa de son I, à « l'absence d'héritier », comme condition de la transmission du droit de suite au légataire universel. Imposer une nouvelle recherche d'héritiers pour les auteurs dont la succession a déjà été réglée et n'a révélé aucun héritier serait une charge inutilement contraignante pour les légataires.

Aussi lui demande-t-il de confirmer que le II de l'article 31 de la loi du 7 juillet 2016 permet aux légataires universels d'auteurs décédés avant l'entrée en vigueur de la loi de bénéficier de plein droit du droit de suite, sans formalités ou recherches supplémentaires, lorsque l'absence d'héritiers a été constatée au moment du règlement de la succession.

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Réponse du Ministère de la culture publiée le 16/11/2017

En application de l'article L. 122-8 du code de la propriété intellectuelle (CPI), les auteurs d'œuvres originales graphiques et plastiques perçoivent, en application du droit de suite, une rémunération à raison de la vente de leurs œuvres faisant intervenir des professionnels du marché de l'art, après la première cession de celles-ci par l'auteur lui-même ou ses ayants droit. La loi n°  2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine est venue modifier l'article L. 123-7 du CPI afin d'élargir le périmètre des personnes pouvant prétendre à bénéficier du droit de suite après le décès de l'auteur. Sous réserve des droits des descendants et du conjoint survivant non divorcé, l'article L. 123 7 du CPI autorise l'auteur à transmettre le droit de suite par legs. En l'absence d'héritier ou de legs, le droit de suite est transmis au légataire universel ou, à défaut, au détenteur du droit moral. En cas de déshérence totale, le droit de suite est confié à un organisme de gestion collective agréé chargé de l'affecter à la prise en charge d'une partie du régime de retraite complémentaire des artistes graphiques et plastiques. L'article 31 de la loi du 7 juillet 2016 précitée indique que l'article L. 123-7 du CPI, dans sa nouvelle rédaction, est applicable « aux successions ouvertes avant la publication de la présente loi, y compris celles qui auraient été réglées à cette date, lorsqu'il n'existe aucun héritier régulièrement investi du droit de suite en application des règles de transmission en vigueur au jour du décès ». Le législateur a ainsi précisé l'application dans le temps du nouveau dispositif afin que le droit de suite puisse être attribué à des fondations chargées de la défense de l'œuvre d'artistes décédés avant l'adoption de la loi. Cependant, une telle précision ne pouvant avoir pour effet de porter atteinte aux droits acquis, le texte préserve les droits des héritiers régulièrement investis. La volonté exprimée tant par les parlementaires que par la ministre de la culture au cours des débats en séance publique était de s'assurer que les nouvelles dispositions de l'article L. 213-7 du CPI soient effectivement applicables aux fondations désignées légataires universels ou titulaires des droits moraux, même dans le cas de successions déjà réglées, dès lors qu'il n'existe aucun héritier à la date de liquidation de la succession. L'article 31 de la loi du 7 juillet 2016 précitée n'a donc pas pour effet de rouvrir un processus successoral clos et d'imposer une nouvelle recherche d'héritiers pour les auteurs dont la succession a déjà été réglée.

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