Question de Mme ESTROSI SASSONE Dominique (Alpes-Maritimes - Les Républicains) publiée le 13/07/2017
Mme Dominique Estrosi Sassone attire l'attention de Mme la ministre du travail sur la lutte contre le travail dissimulé.
Selon le rapport annuel de l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), près d'un quart des plateformes logistiques contrôlées aléatoirement par les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) en 2016 ont pratiqué le travail dissimulé : la fraude concernerait 23,6 % des plateformes et 9 % des salariés, selon l'organisme.
Le secteur du bâtiment est également particulièrement touché puisqu'il représente à lui seul 51,2 % des redressements prononcés en 2016. Toutefois, d'autres secteurs sont également impactés tels que les services administratifs, l'hôtellerie, la restauration ou encore l'industrie.
Alors que la hausse du travail dissimulé et les redressements en découlant sont en constante augmentation depuis 2009, avec un montant record de 555 millions d'euros de pénalités cumulées rien que pour 2016, elle lui demande ce qu'elle compte entreprendre pour enrayer ce phénomène et encourager les entreprises à respecter le code du travail dans l'ensemble des secteurs professionnels.
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Réponse du Ministère du travail publiée le 29/03/2018
La lutte contre le travail dissimulé constitue un enjeu majeur de la valorisation des droits des salariés et du maintien d'une concurrence saine et non faussée entre les entreprises. Ainsi, elle figure au cur des conventions d'objectifs et de gestion (COG) signées entre l'État et les organismes chargées du recouvrement : l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) pour le régime général et le régime des indépendants ; la mutualité sociale agricole (MSA) pour les travailleurs agricoles. En 2016, près de 60 000 contrôles ont été réalisés par les URSSAF. Parmi ces contrôles, deux tiers des contrôles concernent le secteur de la construction (27,6 %), de l'hébergement et de la restauration (21,7 %) et du commerce en détail (21 %). On peut noter que dans le secteur de la construction, une progression de 9 % des contrôles a eu lieu sur une période d'un an. 88 % des actions ciblées (régime général et travailleurs indépendants) comptabilisées au titre de l'exercice ont donné lieu à un redressement, témoignant de la pertinence de la détection du risque et plus spécifiquement des situations de travail illégal. Grâce à ces contrôles, notamment dans le secteur de la construction, le montant total relevé s'élève à 238,8 millions d'euros, preuve de l'efficacité du dispositif. Pour enrayer ce phénomène, les organismes chargés du recouvrement réalisent des contrôles aléatoires dans les secteurs jugés à risque (construction, hôtellerie, restauration), en particulier dans les régions caractérisées par une forte saisonnalité de l'activité. Plus spécifiquement dans le secteur de la construction, les contrôles sont plus importants et ont été renforcés par le droit de l'Union européenne grâce à l'appui de la France. En vertu de la directive d'application 2014/67 du 15 mai 2014, est désormais mise en uvre une responsabilité solidaire dans l'ensemble de la chaîne de sous-traitance en cas de constat de travail dissimulé. Les contrôles par les agents de l'URSSAF sont donc plus larges et permettent une plus grande récupération de l'indu. Pour encourager les entreprises à respecter le code du travail dans l'ensemble des secteurs professionnels, des sanctions administratives et pénales ont été progressivement mises en uvre par les lois de financement de la sécurité sociale et par certaines lois ordinaires. Par ailleurs, la réunion de la commission nationale de lutte contre le travail illégal le 12 février 2018 a été l'occasion pour la ministre du travail de rappeler que la lutte contre le travail illégal et la fraude au détachement constitue l'un des axes majeurs de la politique publique tant ces phénomènes sont destructeurs des équilibres des comptes publics, portent atteinte aux droits des travailleurs et sont un facteur inacceptable de concurrence déloyale entre les acteurs économiques. Ainsi, la France s'est pleinement engagée dans la révision de la directive sur le détachement pour améliorer les droits des travailleurs et les conditions de la concurrence en Europe. Un compromis a été trouvé pour un meilleur encadrement du travail détaché (réduction à douze mois de la durée maximale de détachement, principe « à travail égal, salaire égal », renforcement de la lutte contre la fraude et les abus). Au niveau national, la ministre du travail a annoncé le 12 février 2018 seize mesures nouvelles visant à rendre les sanctions plus efficaces, à optimiser les outils des agents de contrôle et des préfets permettant d'agir, à préciser le cadre juridique et à faciliter les contrôles par des moyens nouveaux : la publication systématique des condamnations pénales (« name and shame »), le renforcement des sanctions financières, de 2 000 à 3 000 par salarié détaché illégalement et de 4 000 à 6 000 en cas de récidive, avec possibilité de suspension de l'activité si le prestataire ne s'acquitte pas de l'amende, l'extension des pouvoirs de sanction des préfets, notamment de la possibilité d'ordonner la fermeture ou la cessation d'activité d'un établissement, le renforcement des capacités d'enquête de l'inspection du travail. La ministre a annoncé d'autre part l'augmentation du nombre de contrôles, avec un objectif de 1 500 contrôles par mois et la hausse du nombre de contrôles conjoints avec d'autres services anti-fraude (police, gendarmerie, douanes, services fiscaux ) pour qu'ils représentent 50 % des contrôles dans les secteurs prioritaires du bâtiment et des travaux publics (BTP) et des transports. Plusieurs de ces mesures seront intégrées au projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, qui sera présenté en conseil des ministres à la fin du mois d'avril.
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