Question de M. RAISON Michel (Haute-Saône - Les Républicains) publiée le 06/07/2017
M. Michel Raison attire l'attention de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conclusions rendues le 21 février 2017 par la mission d'information sénatoriale intitulée « Désendoctrinement, désembrigadement et réinsertion des djihadistes en France et en Europe ».
Constituée afin de procéder à une évaluation des dispositifs de prise en charge de la radicalisation violente, cette mission a rendu un bilan d'étape particulièrement inquiétant.
La mission a en effet relevé « la hâte avec laquelle ces programmes de déradicalisation avaient été conçus » et « l'effet d'aubaine financière » qui a donné lieu à un « business de la déradicalisation » auprès de plusieurs associations « recherchant des financements publics en période de pénurie budgétaire (
) sans réelle expérience dans ce secteur ».
Face à l'échec de la politique de prise en charge de la radicalisation, il souhaite connaître les intentions du Gouvernement en matière d'évaluation des dispositifs mis en place par l'État et les perspectives qu'il entend mettre en œuvre tant en matière de prévention que de prise en charge des personnes détenues radicalisées ou incarcérées pour actes de terrorisme liés aux filières islamistes.
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Réponse du Ministère de la justice publiée le 13/06/2019
Le ministère de la justice a pris de nombreuses initiatives afin de répondre aux phénomènes de radicalisation. En premier lieu, il a préconisé, au travers de la circulaire du 5 décembre 2014, l'instauration d'un maillage territorial spécifiquement dédié à la détection et à la prévention de la radicalisation violente (mise en place de magistrats référents terrorisme dans chaque juridiction et création de postes d'assistants spécialisés radicalisation) afin de permettre une articulation optimale des réponses judiciaires et un partage d'informations fluide et efficient entre la section antiterroriste du parquet de Paris et les parquets locaux. La loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice a renforcé le dispositif grâce à l'institution des magistrats délégués à la lutte contre le terrorisme. En deuxième lieu, la direction des affaires criminelles et des grâces (DACG) a accompagné l'implication forte de l'ensemble des parquets de France dans les dispositifs judiciaires et partenariaux de prévention de la radicalisation violente, notamment les groupes d'évaluation départementaux et cellules départementales de suivi pour la prévention de la radicalisation et l'accompagnement des familles, par plusieurs circulaires (circulaires du 25 juin 2014, du 5 novembre 2016, du 2 octobre 2017, du 24 mars 2017 et du 8 juin 2018). En troisième lieu, dès 2015, la direction de l'administration pénitentiaire a expérimenté des modalités de prise en charge spécifiques des personnes détenues radicalisées, terroristes ou de droit commun, qui ont depuis été étendues. Ces actions sont développées à travers plusieurs dispositifs cohérents consacrés notamment par le plan national de prévention de radicalisation arrêté par le Gouvernement le 23 février 2018 (grilles de détection de la radicalisation, programmes de prévention de la radicalisation violente, quartiers d'évaluation (QER) et de prise en charge des personnes radicalisées (QPR). L'organisation d'un maillage territorial d'agents dédiés et la mise en place d'un plan de formation spécifique de tous les personnels pénitentiaires sur les thématiques liées à l'islam radical, la formation spécialisée des personnels en contact avec les détenus radicalisés, ainsi que la mise en place de référents sur cette même thématique, sont autant de premières mesures qui ont permis de faciliter la détection précoce des processus de radicalisation et de renforcer les capacités pénitentiaires d'évaluation des différents niveaux de radicalité. Des recherches-actions sur la radicalisation en prison ont été menées dans différentes disciplines. Les services d'insertion et de probation ont développé sur l'ensemble du territoire des programmes de prévention primaire axés sur la laïcité, le renoncement à la violence à l'attention de l'ensemble des détenus, tandis que des programmes secondaires de désengagement ont également été déployés pour toucher les publics radicalisés. Entre 2012 et 2018, le nombre des aumôniers musulmans a cru de 53 % (231 à ce jour), montrant l'effort significatif du ministère pour accompagner et aider les détenus pratiquants qui pourraient être tentés par un discours radical. Enfin, en février 2017, le service du renseignement pénitentiaire a intégré le deuxième cercle de la communauté française du renseignement. Il dispose de pouvoirs d'investigation étendus, notamment le recours possible aux techniques de recueil de renseignement. Les effectifs du bureau central du renseignement pénitentiaire ont quadruplé depuis deux ans pendant qu'un réseau territorial était développé dans chaque direction interrégionale, chaque établissement et dans chaque service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP).
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