Question de Mme ESPAGNAC Frédérique (Pyrénées-Atlantiques - Socialiste et républicain) publiée le 02/06/2016
Mme Frédérique Espagnac attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur les mesures prises par le Gouvernement espagnol incitant les entreprises ibériques à n'acheter que du lait espagnol.
Dans le département des Pyrénées-Atlantiques une coopérative a été obligée de stopper son activité principale ayant perdu son seul et unique client basé à Saint-Sébastien au Pays basque espagnol. Cette coopérative comptait six chauffeurs-ramasseurs qu'elle a dû licencier et collectait le lait d'environ 80 éleveurs en Pays basque et en Béarn. Si la plupart des producteurs laitiers ont réussi à retrouver d'autres laiteries une dizaine d'entre eux se sont retrouvés sans solution étant même dans l'obligation de jeter leur lait faute de client.
Aussi lui demande-t-elle quelles solution il peut apporter aux éleveurs concernés et de bien vouloir préciser l'avis du Gouvernement sur les mesures prises par le gouvernement espagnol.
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Réponse du Ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt publiée le 01/09/2016
Les filières agricoles, en particulier d'élevage, traversent une période très difficile principalement due à des prix bas qui ne permettent plus la rémunération d'une partie des éleveurs et grèvent les trésoreries des exploitations, parfois déjà fragilisées depuis plusieurs années. Cette situation s'explique en partie par des tensions sur les marchés européens et mondiaux, mais elle trouve sa source également dans les difficultés structurelles d'organisation des filières et dans des relations commerciales peu équilibrées au détriment des producteurs. Le Gouvernement répond à cette crise, de dimension européenne, à la fois par la mise en place de mesures de soutien d'urgence au plan national, mais aussi par la mise en uvre de mesures de nature plus structurelle, permettant d'apporter des réponses plus durables aux difficultés rencontrées. La France formule des propositions en parallèle, et ce depuis plusieurs mois, auprès de la Commission européenne et des États membres, afin que l'Union européenne prenne toute la mesure de la crise agricole et y réponde avec les outils de régulation des marchés qui sont à sa disposition. Au niveau national, le Gouvernement a mis en uvre un plan de soutien à l'élevage dès l'été 2015, complété et élargi le 26 janvier dernier pour certaines mesures à d'autres filières, notamment les producteurs de céréales et de fruits et légumes. Mais la première question qui nous est posée est celle des prix qui ont atteint des niveaux ne permettant plus toujours une rémunération décente des producteurs. L'été dernier, le ministre en charge de l'agriculture a réuni à plusieurs reprises l'ensemble des acteurs des filières, dans les secteurs de la viande bovine, du porc et du lait, alors que les prix baissaient partout en Europe. Si le droit de la concurrence interdit des accords de prix, ces tables rondes auront eu le mérite de faire échanger les acteurs sur l'ampleur de la crise. En France, les prix du porc et du lait ont diminué moins fortement qu'ailleurs, par la simple prise de conscience que la crise que traversent les éleveurs ne pouvait pas être ignorée. De la même manière, le Gouvernement, lors des négociations commerciales pour 2016 qui se sont achevées fin février, a solennellement appelé les entreprises de transformation et de la grande distribution à davantage de responsabilité et à un esprit de solidarité au regard de la situation des éleveurs. Le Gouvernement a par ailleurs décidé d'accentuer la pression de contrôles pour cette campagne de négociations. Au-delà des négociations de cette année, le Gouvernement et la majorité sont mobilisés dans le cadre de l'examen du projet de loi relatif à la transparence, la lutte contre la corruption et la modernisation de la vie économique, pour rééquilibrer le rapport de force entre les maillons des filières dans les relations commerciales amont et aval, au profit des producteurs. En outre, l'amélioration de la situation des producteurs passera également nécessairement par une meilleure qualité des produits et l'élaboration de cahiers des charges de production permettant la signature de contrats générateurs de valeur, autour de la mise en avant de l'origine France. L'État s'est engagé très concrètement à recenser tous ses marchés d'achat alimentaire afin de faire davantage appel aux produits issus de filières ancrées dans nos territoires. Le ministre en charge de l'agriculture a également développé un ensemble d'outils à destination des donneurs d'ordre de la restauration collective publique, État et collectivités, pour traduire concrètement la priorité du Gouvernement pour l'ancrage territorial de la production, de la transformation et de la commercialisation des produits. Enfin, le ministre en charge de l'agriculture a présenté à la Commission européenne un projet de décret obligeant, à titre expérimental en France, l'étiquetage de l'origine des viandes et du lait utilisés comme ingrédients dans les produits transformés (l'étiquetage pour les viandes fraîches est déjà obligatoire depuis le 1er avril 2015). Le commissaire européen en charge de la consommation a répondu par courrier du 4 juillet 2016 aux autorités françaises que rien ne s'opposait au lancement d'une expérimentation telle que proposée par la France. Le projet de décret est actuellement soumis à l'avis du Conseil d'Etat. La filière laitière espagnole, comme la filière française, subit depuis de nombreux mois les conséquences de la crise européenne dans le secteur du lait de vache. L'Espagne, pays structurellement importateur de lait, s'efforce depuis 2013 de soutenir sa production tout en encourageant la consommation de lait et notamment de lait espagnol sur son marché intérieur. Ainsi, le ministère de l'agriculture espagnol a mis en place en 2013 un logo qui met en avant les produits laitiers fabriqués à partir de lait d'origine espagnole. Fin septembre 2015, un accord de filière a été signé en Espagne. Celui-ci prévoit que les industriels et les distributeurs s'engagent à afficher le pays d'origine des produits, en particulier du lait liquide. En juin 2016, une nouvelle campagne nationale de promotion de la consommation des produits laitiers a été lancée en Espagne, mettant en avant les produits d'origine espagnole. C'est dans ce contexte que certains éleveurs du département des Pyrénées-Atlantiques ont vu leur contrat de vente de leur lait en Espagne rompu. Concernant les treize éleveurs en difficulté suite à l'arrêt officiel de l'activité lait de leur coopérative le 20 avril 2016, les services de l'État, en partenariat avec la chambre d'agriculture, ont pu leur apporter un appui individuel pour conclure un nouveau contrat avec un opérateur. La plupart de ces producteurs ont pu trouver une solution de contractualisation, moyennant une adaptation de leur exploitation. Les autres ont réorienté leur activité agricole face aux changements à conduire pour satisfaire les exigences de qualité des collecteurs de la zone.
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