Question de Mme ESTROSI SASSONE Dominique (Alpes-Maritimes - Les Républicains) publiée le 16/06/2016

Mme Dominique Estrosi Sassone interroge Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat sur le projet d'assouplissement du décret 2006-608 du 26 mai 2006 relatif aux concessions de plage, dit décret plage.

Alors qu'en 2014, le Gouvernement s'était engagé à mettre en place un groupe de travail pour proposer une évolution législative ou réglementaire de ce décret, aucune démarche n'a été entreprise depuis.

Dans le département des Alpes-Maritimes, des concessions de plage arrivent à expiration et ne pouvant plus respecter les dispositions du décret, de nombreux professionnels vont fermer leurs établissements. Pourtant, la Côte d'Azur représente à elle seule un tiers de l'offre nationale des activités de plage et compte à elle seule 2.000 emplois. La conséquence d'une stricte application de ce décret est donc très inquiétante pour les salariés.

Outre l'impact sur les emplois et sur l'activité économique des plagistes, ce décret pose également un problème pour les élus des communes puisqu'il leur est demandé d'ordonner la destruction d'établissements qui constituent l'attractivité touristique de leur territoire.

Les professionnels réunis en convention nationale à Cannes en mai ont dressé les trois points essentiels qui posent problème à la pérennité de leur activité : le taux d'occupation des plages, la durée des concessions et la démontabilité des infrastructures. Ainsi, ils ont formulé plusieurs propositions de modification du décret.

Elle demande à la ministre si elle compte aménager au moins en partie le décret de 2006 afin de permettre aux professionnels de poursuivre leur activité et d'éviter les suppressions d'emplois. Elle souhaite également savoir dans quelle mesure l'aménagement est réalisable afin de ne pas porter atteinte à l'activité économique du secteur touristique ainsi qu'aux emplois qui en dépendent pour les communes concernées des Alpes-Maritimes.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargé des relations internationales sur le climat, chargé de la biodiversité publiée le 16/11/2016

Réponse apportée en séance publique le 15/11/2016

Mme Dominique Estrosi Sassone. Ma question porte sur le décret du 26 mai 2006 relatif aux concessions de plage, dit « décret plage », et son éventuel aménagement.

Alors qu'en 2014 le Gouvernement s'était engagé à mettre en place un groupe de travail chargé de proposer une évolution législative ou réglementaire de ce décret, aucune démarche officielle n'a finalement été entreprise, malgré les nombreuses interpellations des élus et des professionnels lors des renouvellements de concession. La Côte d'Azur représente un tiers de l'offre nationale des activités de plage et compte à elle seule plus de 2 000 emplois directs. Les conséquences d'une stricte application de ce décret sont donc très inquiétantes pour la pérennité des établissements, mais surtout pour les salariés qui en dépendent, sur les plages tant naturelles qu'artificielles.

Selon les estimations, cela représente la suppression de près de 400 emplois à Antibes-Juan-les-Pins, ainsi qu'à Cannes, à Vallauris-Golfe-Juan ou encore à Saint-Jean-Cap-Ferrat.

De plus, ce décret provoque des blocages, puisque certaines concessions arrivées à échéance n'ont pu être renouvelées et ont donc ouvert sans droit ni titre, comme à Juan-les-Pins.

Outre ses incidences économiques, l'application de ce décret pose un double problème aux élus des communes concernées : d'une part, il leur est demandé d'ordonner la destruction d'établissements stables implantés depuis longtemps ; d'autre part, les finances municipales subissent une perte de redevance importante, dans un contexte de baisse des dotations budgétaires.

Enfin, c'est non pas l'intégralité du décret qui pose problème, mais trois points en particulier : le taux d'occupation des plages, alors qu'il serait plus logique de prendre en compte l'ensemble du littoral d'une commune, plutôt que la densité de chaque plage ; la démontabilité des infrastructures, puisque de nombreux établissements vont devoir détruire pour reconstruire une même structure « démontable » ; la durée des concessions, qui pourrait être allongée, notamment pour amortir ces investissements.

Madame la secrétaire d'État, alors que de nombreuses communes souffrent d'une baisse historique de leur fréquentation touristique en raison des attentats qui ont frappé notre pays depuis un an, que l'inspection générale de l'administration a proposé des assouplissements au décret dès 2009, que les professionnels ont transmis des propositions concrètes pour l'emploi et que la secrétaire d'État chargée du commerce s'était engagée à envisager un assouplissement du décret lors de sa venue à Nice en juillet dernier, quels aménagements le Gouvernement compte-t-il mettre en œuvre ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Barbara Pompili, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, chargée de la biodiversité. Madame la sénatrice, Mme Ségolène Royal, qui est retenue ce jour à Marrakech par la COP 22, souhaite vous réaffirmer son attachement à la préservation du littoral français, de ses paysages et de sa biodiversité, garante de son attractivité.

La loi du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, ou loi Littoral, a énoncé le principe selon lequel « l'usage libre et gratuit par le public constitue la destination fondamentale des plages ». Nos concitoyens sont très attachés à ce principe de gratuité et de libre usage des plages, et c'est dans cet esprit que le décret relatif aux concessions de plage, dit « décret plage », a été élaboré et adopté le 26 mai 2006.

Les dispositions réglementaires issues de ce décret prévoient qu'une plage naturelle doit rester libre, à concurrence d'au moins 80 %, en surface et en linéaire, de tout équipement ou installation ; ce taux est fixé à 50 % pour une plage artificielle.

Par ailleurs, les dispositions réglementaires imposent le caractère démontable ou transportable des équipements et installations autorisés sur la plage. Ils doivent être conçus de manière à permettre, en fin de concession, un retour du site à l'état initial. Cette obligation répond à des enjeux très importants de sécurité publique, dont la responsabilité incombe à l'État, en tant que propriétaire du domaine public maritime naturel. Il est fondamental, vu le développement des phénomènes climatiques extrêmes, de renforcer la sécurité sur les plages en cas d'accident.

Par ailleurs, la démolition des établissements et installations à l'issue des concessions de plage en cours dans les Alpes-Maritimes, qui s'effectuera sous la responsabilité conjointe des collectivités concessionnaires et des services de l'État, contribuera à un renouvellement de l'offre et de l'attractivité des plages du territoire.

Le préfet contactera rapidement les élus locaux pour les inviter à s'engager rapidement dans l'élaboration des concessions de plage.

Mme la présidente. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.

Mme Dominique Estrosi Sassone. Madame la secrétaire d'État, j'entends bien votre réponse. Toutefois, je souligne de nouveau que les professionnels et les collectivités concernés souhaitent un assouplissement de la réglementation. Ils sont bien conscients de la nécessité de préserver l'environnement et la biodiversité.

Cet assouplissement passe, selon nous, par la prise en compte des spécificités de chaque littoral. La façade méditerranéenne est ainsi beaucoup plus étroite que la façade atlantique. En outre, plus de la moitié des établissements balnéaires et des concessions de plage se situent sur le littoral méditerranéen. Il me semble que ces éléments justifient une application différenciée du « décret plage » et une adaptation de ses dispositions aux spécificités de chaque commune.

Il faut par ailleurs laisser aux conseils municipaux la possibilité d'apprécier l'opportunité d'autoriser l'ouverture à l'année. Les élus sont responsables et l'on peut leur faire confiance pour trouver des solutions et permettre aux professionnels du secteur du tourisme, particulièrement touchés par les difficultés de la saison 2016, de retrouver des marges de manœuvre, ce qui leur permettra d'investir de nouveau.

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