Question de M. LEROY Jean-Claude (Pas-de-Calais - Socialiste et républicain) publiée le 14/04/2016
M. Jean-Claude Leroy attire l'attention de Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat sur la destruction en cours de 60 000 moulins de France.
En effet, il semble que le troisième patrimoine historique bâti de France fasse l'objet d'une application trop restrictive de la loi n° 2006-1772 du 30 décembre 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques, à la suite de la mise en œuvre de la circulaire du 25 janvier 2010 relative à la mise en œuvre par l'État et ses établissements publics
d'un plan d'actions pour la restauration de la continuité écologique des cours d'eau, qui prône l'effacement systématique des ouvrages et des seuils des moulins.
Les moulins de France représentent des ressources économiques et énergétiques mais aussi un maillage territorial et un patrimoine culturel incontestable. Pourtant, il apparaît qu'ils sont plutôt en pratique considérés comme des obstacles à la continuité écologique des cours d'eau, et non comme un patrimoine historique à préserver.
Ceci suscite l'inquiétude des propriétaires des moulins, qui ne sont pas opposés au principe de la continuité écologique, mais à l'application excessive qui en est faite.
C'est pourquoi il semble nécessaire de trouver une solution entre la gestion équilibrée de la ressource en eau et la préservation du patrimoine. Alors qu'une nouvelle mission vient d'être demandée au conseil général de l'environnement et du développement durable, actant de fait l'échec des conclusions de la précédente mission, la situation continue de se dégrader dans les territoires avec notamment l'échec récent de la signature de la charte des moulins et la demande d'un moratoire sur le classement des rivières.
Aussi, il lui demande de bien vouloir lui préciser les intentions du Gouvernement permettant une conciliation harmonieuse des différents usages de l'eau dans le respect du patrimoine et des obligations de la France découlant de la directive cadre sur l'eau (directive n° 2000/60/CE du 23/10/00 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau), afin de remédier enfin aux situations de blocage.
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Réponse du Ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargé des relations internationales sur le climat publiée le 25/08/2016
La continuité écologique des cours d'eau constitue l'un des objectifs fixés par la directive Cadre sur l'eau. Elle est indispensable à la circulation des espèces mais également des sédiments. La conciliation entre ce principe et l'existence de moulins, dont l'aspect patrimonial de certains est indéniable, est cependant un autre objectif à atteindre. Ainsi, afin de pouvoir appréhender au mieux la situation actuelle, l'office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA) a établi un inventaire des obstacles à l'écoulement de toutes sortes (barrages, buses, radiers de pont, etc.). Celui-ci recense plus de 80 000 obstacles. Parmi ceux-ci, un premier ordre de grandeur de 18 000 obstacles dont le nom contient le mot « moulin » peut être tiré. Moins de 6 000 d'entre eux se situent sur des cours d'eau où s'impose une obligation de restauration de la continuité écologique. Enfin, une partie d'entre eux sont de fait partiellement ou totalement détruits et d'autres sont déjà aménagés d'une passe-à-poissons ou correctement gérés et ne nécessitent pas d'aménagement supplémentaire. Ainsi, il apparait important d'indiquer que la politique de restauration de la continuité écologique ne vise pas la destruction de moulins. En effet, cette politique se fonde systématiquement sur une étude au cas par cas de toutes les solutions envisageables sur la base d'une analyse des différents enjeux concernés incluant l'usage qui est fait des ouvrages voire leur éventuelle dimension patrimoniale. Cette approche correspond à l'esprit des textes règlementaires sur le sujet, aucun n'ayant jamais prôné la destruction des seuils de moulins. Pour atteindre le bon état écologique et respecter les engagements de la France en matière de restauration des populations de poissons amphihalins vivant alternativement en eau douce et en eau salée, tels que le saumon, l'anguille ou l'alose, il est indispensable de mettre en uvre des solutions de réduction des effets du cumul des ouvrages sur un même linéaire. C'est pourquoi, la politique de restauration de la continuité écologique des cours d'eau se fonde également sur la nécessité de supprimer certains ouvrages, particulièrement ceux qui sont inutiles et/ou abandonnés. Ce point ne concerne ni ne vise spécifiquement les seuils de moulins. Les moulins entretenus, utilisés ou ayant une dimension patrimoniale d'intérêt, ne sont en aucun cas mis en danger par la politique de restauration de la continuité écologique. Compte tenu des nombreuses réactions, notamment des fédérations de propriétaires de moulins et d'élus, dues surtout à des incompréhensions de cette politique, une instruction a été donnée le 9 décembre 2015 aux préfets afin qu'ils ne concentrent pas leurs efforts sur ces ouvrages chargés de cette dimension patrimoniale. Cette instruction les invite également à prendre des initiatives pédagogiques à partir des multiples situations de rétablissement de la continuité réalisées à la satisfaction de tous, y compris sur les moulins. Le groupe de travail organisé par le ministère de la culture et de la communication, dont le ministère de l'environnement, de l'énergie et de la mer fait partie, ainsi que la mission du conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), devrait permettre d'affiner la connaissance sur le nombre de seuils de moulins véritablement concernés. Il devrait proposer également des pistes pour renforcer la concertation locale et la prise en compte adaptée de la dimension patrimoniale des moulins dans le cadre d'une diversité de solutions de conciliation avec l'enjeu de restauration de la continuité écologique des cours d'eau.
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