Question de M. BONNECARRÈRE Philippe (Tarn - UDI-UC) publiée le 25/02/2016

M. Philippe Bonnecarrère attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur le projet de loi relatif à l'action de groupe et à l'organisation judiciaire dit « justice du 21ème siècle » (Assemblée nationale n° 3204 XIVème législature), dans le cadre de sa première lecture, prévoit que le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) serait compétent pour statuer sur les contestations relatives au contentieux général, au contentieux technique et à l'admission à l'aide sociale. Concrètement, le tribunal du contentieux de l'incapacité (TCI), la commission nationale de l'indemnisation (CNI), et la commission départementale de l'aide Sociale (CDAS) vont disparaître, au bénéfice du TASS. Le contentieux technique constitue un domaine large où les recours devant le TCI sont très nombreux. L'intention du Gouvernement de regrouper ce contentieux à une échelle départementale, c'est à dire au niveau d'une juridiction dont l'accès est aisé, relève d'une bonne intention mais les TASS sont, en général, dans les ressorts de première instance, les juridictions ayant les stocks de dossiers les plus importants et donc les délais de traitement les plus élevés.

Il est permis de craindre que le volume, sous-estimé par le ministère, des dossiers devant les TCI n'entraîne un engorgement substantiel des TASS. Sauf à ce que des moyens très importants soient mis à disposition des juridictions de première instance pour créer, par exemple, des sections supplémentaires dans les TASS, il est permis de douter de l'efficacité, au sens opérationnel, du projet présenté. Enfin, le projet de loi omet une spécificité des TCI, à savoir que, lors du traitement des dossiers, les usagers peuvent être examinés gratuitement par un médecin expert présent à l'audience.

Il lui demande si cette gratuité des frais d'expertise sera prévue devant le TASS et si, compte tenu du nombre de dossiers, le ministère sera en mesure d'assurer cette gratuité. À défaut, la mesure de regroupement des contentieux envisagée aurait un effet dissuasif sur le justiciable qui n'oserait pas saisir le TASS s'il sait que l'expertise quasi-systématique interviendra à ses frais avancés. Il lui demande s'il serait possible, profitant de la période actuelle de navette entre les deux assemblées, de réétudier l'efficacité opérationnelle du projet de loi, en ce qui concerne son volet social.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 01/12/2016

Le projet de loi de modernisation de la justice du XXIème siècle, tel qu'adopté par l'Assemblée nationale en lecture définitive le 12 octobre dernier, contient une réforme des juridictions sociales dont le contenu résulte d'arbitrages rendus à la suite d'un rapport rédigé par une mission d'inspection interministérielle chargée d'élaborer des préconisations relatives au transfert des juridictions sociales vers les pôles sociaux de certains tribunaux de grande instance. Il est désormais notamment prévu que le contentieux des tribunaux des affaires de sécurité sociale (TASS), des tribunaux du contentieux de l'incapacité (TCI) et d'une partie du contentieux des commissions départementales de l'aide sociale (CDAS) soit transféré vers des tribunaux de grande instance (TGI) spécialement désignés. L'organisation des juridictions s'en trouvera ainsi simplifiée et unifiée. Afin que ce transfert se déroule de manière optimale, eu égard aux retards qu'accusent actuellement certains TASS et TCI, des moyens vont être mis en œuvre pour permettre une résorption des stocks, dont le suivi sera assuré par un comité de pilotage national présidé par le premier président de la cour d'appel d'Orléans, M. François Pion, et des comités locaux, en amont du transfert du contentieux aux TGI. Les difficultés techniques que peuvent poser les expertises médicales en cours d'audience devant un TCI ont également été anticipées. Pour y remédier, l'article 12 du projet de loi prévoit l'institution d'une commission de recours amiable médicale dont la saisine précèdera le recours contentieux devant les pôles sociaux. Ce recours préalable a pour objet de favoriser une issue amiable pour les contestations à caractère médical, en évitant que les personnes concernées se trouvent contraintes, comme aujourd'hui, de saisir le juge à la seule fin d'obtenir une nouvelle expertise. L'office du juge sera ainsi recentré sur les cas les plus litigieux, avec la possibilité d'ordonner une expertise qui aura cette fois un caractère véritablement judiciaire. En application de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante supportera les frais d'expertise au titre des dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie.

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