Question de M. VASSELLE Alain (Oise - Les Républicains) publiée le 13/11/2015
Question posée en séance publique le 12/11/2015
M. Alain Vasselle. Monsieur le Premier ministre, je vous interpelle en votre qualité de chef du Gouvernement.
Il ne se passe pas de jour sans que le Gouvernement annonce une réforme : ainsi, la réforme du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu,
M. Didier Guillaume. Très bonne mesure !
M. Alain Vasselle.
une réforme du code du travail,
M. Didier Guillaume. Très bonne mesure !
M. Alain Vasselle.
le tiers payant généralisé,
M. Didier Guillaume. Très bonne mesure !
M. Alain Vasselle.
ou encore la mise en œuvre de la révision des bases des valeurs locatives.
M. Didier Guillaume. Très bonne mesure !
M. Alain Vasselle. Le Gouvernement veut par ailleurs faire adopter une réforme de la dotation globale de fonctionnement des collectivités locales.
M. Didier Guillaume. Très bonne mesure !
M. Alain Vasselle. Toutes ces réformes ont un point commun, monsieur le Premier ministre,
M. Roger Karoutchi. Le désordre !
M. Alain Vasselle.
le Gouvernement a décidé qu'elles n'entreraient en vigueur qu'après 2017 !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Voire 2020 !
M. Alain Vasselle. Monsieur le Premier ministre, en vertu de quelle logique, reportez-vous systématiquement la mise en œuvre de votre politique tout en affirmant quotidiennement l'urgence absolue de réformer le pays ? Nous attendons votre réponse ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
M. Didier Guillaume. Pourquoi n'avez-vous pas vous-mêmes réformé la DGF ?
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Réponse du Premier ministre publiée le 13/11/2015
Réponse apportée en séance publique le 12/11/2015
M. Manuel Valls, Premier ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, il règne désormais au Sénat une ambiance que j'aime retrouver régulièrement et j'y sens une attente que je ne trouve nulle part ailleurs ! (Rires et applaudissements.)
Monsieur le sénateur Vasselle, je pourrais rappeler les différentes réformes que nous avons menées dans bien des domaines. Il faut néanmoins se mettre d'accord sur ce mot de « réforme » qui inquiète parfois nos concitoyens...
Mme Annie David. C'est sûr !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Nous devons donner un sens clair à ce terme : la modernisation du pays, avec le souci de la justice sociale qui s'impose.
Les réformes menées depuis 2012 sont pourtant nombreuses : je pense ainsi, bien sûr, au mariage pour tous ; je pense à la diminution du nombre de régions ; je pense à la réforme du collège ; je pense à la parité ;... (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Isabelle Debré. La parité, c'est Chirac !
M. Manuel Valls, Premier ministre. ... je pense au non-cumul des mandats, qui a trouvé un succès certain dans cette assemblée ; je pense encore à la mise en place de la Banque publique d'investissement. Je ne poursuivrai pas l'énumération de ces réformes.
De mon point de vue, l'engagement gouvernemental le plus important est la réforme profonde de notre économie par la baisse tant du coût du travail que de la fiscalité sur les entreprises. Cette baisse, de l'ordre de 40 milliards d'euros, s'accompagne de notre lutte indispensable contre les déficits publics, soit un effort de 50 milliards d'euros sur trois ans, mené afin de redonner de la force et de la compétitivité à notre pays.
Cependant, vous m'interrogez plutôt sur les réformes à venir, monsieur le sénateur. Je ne ferai qu'évoquer les plus importantes.
M. Alain Fouché. Celle de la DGF ?
M. Manuel Valls, Premier ministre. La première de ces réformes concerne le droit du travail.
Personne n'a mis sur le métier avant nous cette réforme essentielle, qui doit faire en sorte que la négociation entre les salariés et les responsables des entreprises se fasse au plus près du terrain, dans les entreprises ou dans les branches professionnelles, dont il faut par ailleurs diminuer le nombre. Nous avons confié à Robert Badinter une mission : réécrire en moins de deux mois l'ensemble des principes prescripteurs en matière de droit du travail.
Par ailleurs, dès 2016, nous consacrerons un texte législatif à l'organisation du temps de travail. Chacun sait en effet que cette organisation est aujourd'hui trop rigide ; à l'époque du numérique, il faut pouvoir faire montre de souplesse. Par conséquent, quelque 120 pages du code du travail qui concernent l'organisation du travail seront d'ores et déjà modifiées l'année prochaine.
Enfin, sur tel ou tel aspect du code du travail, qui est une matière importante, peut-être faudra-t-il aller plus vite, mais nous devons nous donner du temps - je réponds ainsi à votre remarque, monsieur le sénateur -, car c'est nécessaire. Si la réforme prend deux ans et empiète sur le quinquennat suivant, cela témoigne que nous sommes une République moderne qui a la capacité de se réformer et de faire converger tous les acteurs, en associant le patronat, les organisations syndicales et la représentation nationale, puisque cette dernière sera consultée. Cette réforme se fera, elle est engagée.
Deux textes sont particulièrement importants : le projet de loi pour une République numérique et le projet de loi sur les nouvelles opportunités économiques. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) C'est un message d'optimisme qu'il faut adresser à la société. Il faut insister sur les opportunités offertes par le numérique et les changements que cela implique sur le marché du travail, dans l'entreprise, mais aussi dans la vie quotidienne et dans l'organisation du travail. Pour les services, pour les entreprises, pour l'État, des réformes importantes seront adoptées en 2016.
Le Gouvernement a aussi entrepris une réforme en matière d'égalité et de citoyenneté. Elle passe par des réponses en matière de logement, d'école, de mixité sociale dans les collèges - la ministre de l'éducation nationale répondra bientôt à une question en ce sens. Modernité, autorité, sécurité, égalité sont des axes importants de la politique que nous menons.
J'en viens à la fiscalité, monsieur le sénateur. Tout le monde demande depuis des années la retenue à la source, mais tout le monde pense que cette réforme est compliquée. Nous engageons cette réforme. Elle aussi sera irréversible et personne n'y reviendra.
C'est pourquoi, dans ce domaine également, il est plutôt de bonne méthode de prendre deux ou trois ans avant la mise en uvre de ce nouveau système et de prévoir son application à partir du 1er janvier 2018. Cependant, chacun sait désormais que cette réforme est inscrite dans la réalité fiscale : nos concitoyens l'attendent. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Sur la dotation globale de fonctionnement, curieuse critique !
M. Didier Guillaume. Bien sûr !
M. Manuel Valls, Premier ministre. L'ensemble des associations d'élus - je rencontrerai en fin d'après-midi François Baroin, que je salue, et une délégation de l'Association des maires de France pour préparer le congrès de la semaine prochaine - demandent du temps pour travailler à cette question. Le Gouvernement les entend.
M. Michel Raison. Régionales obligent !
M. Manuel Valls, Premier ministre. Les principes sont votés dans la loi de finances et la réforme de la DGF, qui sera conclue au printemps prochain, une fois achevées l'ensemble des simulations, notamment sur les perspectives pluriannuelles, sera appliquée à partir du 1er janvier 2017.
Monsieur le sénateur, j'en conclus que nous avons une approche différente de la réforme. Pour moi, les vraies réformes sont celles qui s'inscrivent dans le temps et qui sont efficaces. Ce n'est pas de l'esbroufe ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) Elles supposent une capacité à réformer une société souvent réticente. Ce que nous avons engagé changera profondément le pays...
M. Didier Guillaume. Oui !
M. Manuel Valls, Premier ministre. ... qui a besoin de se préparer à affronter les grands défis de l'avenir, et ce dans la justice. C'est ce que demandent les Français ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour la réplique.
M. Alain Vasselle. Monsieur le Premier ministre, drôle de calendrier qui consiste à attendre d'être à mi-mandat pour engager des réformes structurelles, comme celles que vous venez d'évoquer à l'instant même !
Je note également que vous avez passé cinq minutes à justifier ces réformes sans expliquer réellement ce qui motivait une mise en uvre aussi tardive !
M. Didier Guillaume. C'était pour répondre à votre question !
M. Alain Vasselle. Je constate qu'aujourd'hui le mécontentement dans le pays est général : après les avocats et les policiers, les médecins vont être dans la rue.
C'est à une véritable valse-hésitation du Gouvernement que nous assistons. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Didier Guillaume. On veut une France apaisée, pas une France qui se divise !
M. Alain Vasselle. Nos concitoyens sauront, le moment venu, en tirer les enseignements ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l'UDI-UC.)
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