Question de M. CADIC Olivier (Français établis hors de France - UDI-UC) publiée le 01/10/2015

M. Olivier Cadic attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur le contrôle des changes au Venezuela et l'impact du gel des transferts de capitaux qui en découle.

Lors de son déplacement en 2015 au Venezuela, il a été sensibilisé à la pratique d'un contrôle des changes extrêmement strict par les autorités vénézuéliennes depuis 2003. En raison de sa situation économique délicate, le pays a procédé au gel des rapatriements de devises. Cela correspond à des recettes de vente de billets d'avion pour Air France, des dividendes ou autres produits financiers pour d'autres entreprises françaises implantées dans le pays.
Il souhaiterait attirer son attention sur le cas spécifique de la compagnie aérienne nationale. En effet Air France, acteur impliqué dans les relations franco-vénézuéliennes opère sur la ligne Paris – Caracas de manière constante depuis soixante-et-un ans, à hauteur de cinq vols par semaine actuellement. Le contrôle des changes en vigueur au Venezuela ces dernières années a engendré des pertes de change importantes pour la compagnie (30 M$ en 2010 et 12M$ en 2013). L'office du contrôle des changes du Venezuela (le CENCOEX) doit des centaines de millions d'euros au titre des importations de biens et de services effectuées entre 2013 et 2015. De plus, Air France n'a pas été en mesure de rapatrier ses excédents réalisés entre février et décembre 2013, soit 237 M$. Ce sont des sommes considérables qui amputent le résultat de cette société, qui conduisent à baisser les capacités et à limiter le potentiel des échanges commerciaux avec ce pays.
Ces pratiques sont en totale contradiction avec l'accord de transport aérien signé entre la France et le Venezuela en mai 1954, qui stipule dans son annexe II que « les excédents des revenus sur les frais seront transférables librement dans la monnaie du pays du siège social de la compagnie dont il s'agit, sur la base des taux de changes officiels reconnus au moment de l'encaissement des revenus ». La crédibilité de la signature de l'État français est en jeu ; le futur des échanges commerciaux, avec des emplois à la clef, également.
Aussi, il lui demande d'engager un dialogue soutenu avec les autorités vénézuéliennes pour négocier un assouplissement du contrôle des changes pour les entreprises françaises et de recourir à toutes possibilités offertes en droit international de compenser des flux économiques entre les deux pays. Une couverture spécifique de ce risque doit être également envisagée par la banque publique d'investissement (BPI), dans le cadre de ses nouvelles attributions en matière de couverture de risque à l'exportation.

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Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique publiée le 02/06/2016

Les compagnies aériennes disposent, en principe, d'un statut privilégié qui les autorisent à transférer régulièrement le montant de leurs recettes commerciales. Le rapatriement de ces recettes commerciales fait l'objet, depuis près de trois ans, de discussions très suivies avec le gouvernement Vénézuélien qui immobilise les transferts des compagnies aériennes pour un montant estimé à 3,7 MDS d'USD, principalement au titre de 2013. Certaines compagnies dont Air France ont reçu des paiements partiels en 2014 ou début 2015. Malgré l'existence de deux accords bilatéraux visant à prémunir les entreprises françaises contre les risques de change (dont un accord spécifique au transport aérien), Air France est exposée au Venezuela à des délais de paiement qui perturbent son activité. Aujourd'hui, le transfert de nouvelles recettes commerciales en bolivars ne se pose plus car la majorité des ventes de billets s'effectue en devises à l'extérieur du pays. À la fin du mois de mars 2016, les arriérés de transfert au titre de 2013 s'élèvent encore à 191 MUSD [1]. Face à la récession économique qui frappe le Venezuela pour la troisième année consécutive en raison de l'effondrement des prix du pétrole, le pays dispose aujourd'hui d'une trésorerie, en devises, très tendue. La priorité absolue a donc été donnée, pour l'année 2016, aux paiements de la dette externe et des importations prioritaires (aliments, médicaments, etc.). En dépit de ce contexte très contraint, l'ambassade de France et le Service économique continuent cependant d'accorder à ce dossier une attention toute particulière. Des réunions avec le ministre des transports aquatiques et aériens ont été régulièrement organisées à l'occasion des missions des dirigeants d'Air France à Caracas en 2015. Les autorités vénézuéliennes ne contestent pas ces arriérés de transferts de recettes commerciales, qui ont d'ailleurs été validées par des audits, mais elles mettent en avant leurs difficultés de trésorerie en devises pour expliquer leur incapacité à effectuer les transferts correspondants. Quant à une négociation d'un assouplissement du contrôle des changes pour les entreprises françaises, elle n'est pas envisageable car ce contrôle des changes s'applique à tous les acteurs nationaux ou étrangers, publics ou privés, de l'économie vénézuélienne, sans exception, et ne pourrait pas légalement faire l'objet d'une exception non prévue par la loi. [1] et non plus 237 MUSD comme indiqué

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