Question de M. CADIC Olivier (Français établis hors de France - UDI-UC) publiée le 18/09/2015

Question posée en séance publique le 17/09/2015

M. Olivier Cadic. Ma question s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales.

La semaine dernière, la France a découvert le calvaire du petit Bastien, âgé de trois ans. Son père l'a tué en l'enfermant dans un lave-linge, qu'il a mis en marche. Quand ce père a téléphoné aux pompiers, il leur a dit qu'il avait « un petit souci ».

S'il avait un petit souci, nous avons, nous tous, collectivement, un gros problème avec la maltraitance. Voilà deux ans, un colloque national sur les violences faites aux enfants s'est tenu au Sénat. Il a donné lieu à un rapport, qui a été présenté à Mme la ministre Marisol Touraine. Ce document indique qu'« il manque encore en France un outil statistique national pour mesurer l'ampleur du problème du danger et de la maltraitance ».

Depuis cette publication, on estime que 1 500 enfants sont morts en France sous les coups de parents bourreaux. Il y en aura deux de plus ce soir, et deux autres demain... À l'échelle du quinquennat, nous parlons d'une hécatombe équivalant à celle du 11 septembre.

Si deux enfants meurent chaque jour en France de mauvais traitements, ils sont deux par semaine au Royaume-Uni. Là-bas, des acteurs sociaux et la justice sont tenus d'intervenir à la première alerte. Des mesures de sauvegarde sont prises au moindre soupçon. (M. Didier Guillaume s'exclame.) Compte tenu des observations de nos services sociaux, outre-Manche, ils auraient été tenus de retirer Bastien de la garde de ses parents. Le système français a failli.

Jacques Toubon, le Défenseur des droits, a réclamé au Président de la République de faire de la lutte contre la maltraitance une cause nationale.

Madame la ministre, voilà quelques jours, la photo du petit Aylan, trouvé mort sur une plage turque, a ému la communauté internationale s'agissant du sort des migrants.

À Melun, la juge a fait projeter aux jurés les photos du corps martyrisé du petit Bastien. Faut-il publier ces photos pour obtenir un sursaut des pouvoirs publics ?

Madame la ministre, pourriez-vous nous indiquer si vous allez enfin mettre en place un outil statistique de suivi de la maltraitance ? Pourriez-vous nous préciser les mesures que vous envisagez de prendre pour mieux prévenir et combattre la maltraitance en France ? Allez-vous en faire une priorité nationale ? (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC, du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées du RDSE.)

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargé de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie publiée le 18/09/2015

Réponse apportée en séance publique le 17/09/2015

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie. Monsieur le sénateur Olivier Cadic, je tiens tout d'abord à vous remercier d'avoir posé cette question et parlé devant la Haute Assemblée du petit Bastien : ce qu'il a subi mérite que nous prononcions son prénom aujourd'hui.

Bien entendu, lorsqu'un drame d'une telle nature survient, on se pose forcément la question : comment est-ce possible ? Comment est-il possible, pas seulement que des parents assassinent leurs enfants - malheureusement, nous savons que cela existe -, mais que les services sociaux, qui suivaient pourtant cette famille, n'aient pas pu prévenir ce qui est arrivé ?

Toutefois, avant d'évoquer les dysfonctionnements, j'aimerais rappeler un certain nombre d'éléments. La protection de l'enfance protège 300 000 enfants chaque année ; elle sauve des enfants tous les jours. Je veux aussi saluer l'action des travailleurs sociaux et les politiques publiques qui sont menées dans notre pays, en particulier par les départements ; nous devons en être fiers.

Mme Éliane Assassi. C'est vrai !

Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. Il peut, certes, y avoir des erreurs de diagnostic, mais c'est malheureusement le cas dans toutes les professions.

Vous me demandez quand nous allons faire de la protection de l'enfance une priorité. Mais c'est déjà le cas, monsieur le sénateur ! Et, d'un certain point de vue, c'est aussi grâce au Sénat. Nous avons engagé l'an dernier une réforme des textes en vigueur, mais aussi des pratiques des professionnels - car on ne change pas les pratiques uniquement par la loi -, sur la base des travaux parlementaires de Mmes Muguette Dini, alors sénatrice de l'UDI-UC, et Michelle Meunier, sénatrice socialiste.

Pour ma part, depuis un an, j'ai procédé à des concertations et rencontré l'ensemble des acteurs concernés : professionnels, anciens enfants de l'Aide sociale à l'enfance, l'ASE, parents d'enfants placés, magistrats, travailleurs sociaux...

La proposition de loi, qui est la grande réforme de la protection de l'enfance - d'un certain point de vue, on pourrait parler d'« acte II », depuis la réforme engagée par Philippe Bas -, sera adoptée par le Sénat. Une feuille de route avec 100 actions a été présentée à l'ensemble des professions. Le repérage précoce, le suivi et la prévention de la répétition de la maltraitance sont au cœur de nos priorités.

Je suis convaincue que la réforme aboutira. Je ne l'ai pas conduite seule et d'en haut. Je l'ai conçue sur la base du travail effectué par les parlementaires, et avec l'ensemble des professionnels. Grâce à cette méthode, nous allons réussir ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC, ainsi que sur plusieurs travées du groupe écologiste. - M. Joseph Castelli applaudit également.)

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