Question de M. LE SCOUARNEC Michel (Morbihan - CRC) publiée le 18/06/2015
M. Michel Le Scouarnec attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur l'exposition des enfants aux insecticides. Une étude menée par les chercheurs de l'Institut national de la santé et de la recherche, Inserm, a démontré que personne n'échapperait aux insecticides. Les enfants, par nature plus vulnérables, seraient encore davantage touchés. Employés dans les domaines agricoles, vétérinaires et domestiques comme dans les traitements anti-poux, les insecticides comme les pyréthrinoïdes seraient présents au quotidien, d'où une forte exposition de l'ensemble de la population. Le mode d'action des pyréthrinoïdes consisterait à bloquer la neurotransmission des insectes qui meurent par paralysie. Les enfants seraient particulièrement exposés vu leur plus grande proximité avec les produits contenant ces substances qu'ils absorberaient principalement par voie digestive. Une fois ingérés, ces pesticides seraient rapidement métabolisés puis éliminés en 48 heures sous forme de métabolites. Or, les chercheurs de l'Inserm ont découvert qu'une présence accrue de ces métabolites dans l'urine des enfants est associée « à une baisse significative de leurs performances cognitives. Leur concentration, leur compréhension de l'environnement, leur capacité à acquérir de nouvelles connaissances et leur mémoire seraient particulièrement affectés ». C'est pourquoi, face à la présence et à l'utilisation accrue de ces substances au quotidien et face aux risques démontrés par l'étude de l'Inserm, il lui demande les mesures envisagées pour limiter, voire interdire l'emploi des pesticides dans les produits de la vie courante.
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Réponse du Ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes publiée le 17/12/2015
L'étude menée récemment par l'institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) en lien avec le laboratoire de psychologie du développement et de l'éducation de l'université de Rennes 2 concernant l'impact de l'exposition aux pesticides pyréthrinoïdes sur le développement cognitif de l'enfant, apporte des éléments suggérant leur neurotoxicité pour ces jeunes populations. Ces pesticides sont employés dans divers domaines : agricole (produits phytopharmaceutiques), vétérinaire (médicaments antiparasitaires vétérinaires), médical (traitements antiparasitaires contre les poux et la gale) et domestique (produits biocides). Le suivi de l'imprégnation et donc de l'exposition des populations (femmes enceintes, enfants (de 6 à 17 ans), et adultes (de 18 à 74 ans) ) aux pyréthrinoïdes est assuré par l'institut de veille sanitaire, dans le cadre du programme national de biosurveillance. Les derniers résultats montrent une sur-imprégnation de la population française à ces substances, comparativement à la population des États Unis, et concerne notamment les femmes enceintes. De nombreuses actions ont été mises en place pour évaluer et réduire les risques pour la santé liés à l'utilisation des pesticides. Concernant les produits biocides, le règlement (UE) N° 528/2012 du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 concernant la mise à disposition sur le marché et l'utilisation des produits biocides a pour but de garantir un niveau élevé de protection de la santé humaine et animale et de l'environnement, en accordant une attention particulière à la protection des groupes vulnérables de la population, tels que les femmes enceintes et les enfants. Les substances actives biocides, notamment celles appartenant à la famille des pyréthrinoïdes, sont ainsi approuvées au niveau européen après avis de l'agence européenne des produits chimiques formulé sur la base d'un rapport d'évaluation démontrant leur efficacité et leur absence d'effets inacceptables sur la santé humaine et l'environnement. Les autorisations nationales de mise à disposition sur le marché des produits biocides contenant ces substances actives sont délivrées par le ministère chargé de l'environnement sur la base d'un rapport d'évaluation de l'agence nationale de la sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) démontrant leur efficacité et leur absence d'effets inacceptables sur la santé humaine et l'environnement. Concernant les produits phytopharmaceutiques, l'ANSES est chargée, depuis 2006, de leur évaluation conformément aux critères définis par le règlement européen CE n° 1107/2009 du 21 octobre 2009. Cette évaluation comprend, d'une part, une évaluation des dangers et des risques liés aux substances actives entrant dans la composition des produits, ainsi que de leur efficacité. Cette évaluation est réalisée au niveau européen sous la coordination de l'Autorité européenne de sécurité alimentaire (AESA) qui s'appuie sur l'évaluation collective réalisée par les Etats membres (l'ANSES pour la France). En effet, une substance active ne peut être approuvée que si son évaluation permet de conclure qu'elle ne présente pas d'effet nocif sur la santé humaine ou animale et n'a pas de conséquence sur l'environnement. D'autre part, une évaluation des risques et de l'efficacité est réalisée sur les préparations commerciales (ou produits), selon des principes harmonisés de la réglementation européenne. C'est sur la base de l'évaluation scientifique des risques et de l'efficacité des produits que les autorisations de mise sur le marché sont délivrées au niveau national. Depuis le 1er juillet 2015, c'est l'ANSES qui est chargée de délivrer, retirer ou modifier les autorisations de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques (auparavant délivrées par le ministère chargé de l'agriculture). Concernant les médicaments vétérinaires, l'exposition des enfants provenant essentiellement des antiparasitaires externes destinés aux animaux de compagnie, l'ANSES a décidé de retirer en 2012 les autorisations de mise sur le marché de certains colliers au regard d'un rapport bénéfice/risque défavorable. Sous le pilotage des ministères chargés de l'agriculture et de l'environnement, le plan national Ecophyto II, en cours de finalisation, a pour objectif de réduire l'utilisation des produits phytopharmaceutiques et donc l'exposition de la population notamment aux pyréthrinoïdes. Dans le cadre de ce plan, le ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes co-finance avec le ministère de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt et le ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, l'étude Pesti'Home menée par l'ANSES. Cette étude répond à l'une des recommandations de l'expertise collective de l'INSERM sur les pesticides et leurs effets sur la santé publiée en juin 2013. Son objectif est de mieux connaître l'exposition aux produits biocides, produits phytopharmaceutiques et médicaments vétérinaires utilisés par la population aux fins d'élimination des nuisibles dans la maison ainsi qu'à l'extérieur du domicile, d'une part, et de traitement des animaux domestiques, d'autre part. Cette étude contribuera à définir des priorités pour réduire les expositions des populations aux pesticides, dont les pyréthrinoïdes.
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