Question de Mme ESTROSI SASSONE Dominique (Alpes-Maritimes - Les Républicains) publiée le 25/06/2015
Mme Dominique Estrosi Sassone interroge Mme la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité sur la modification du bénéficiaire de l'aide au logement temporaire (ALT).
Le décret n° 2014-1742 du 30 décembre 2014 relatif à l'aide versée aux gestionnaires d'aires d'accueil des gens du voyage a réformé les modalités de calcul et d'attribution de l'ALT. Ce décret, précisé par une instruction ministérielle du 4 février 2015 relative à la réforme de l'aide versée aux gestionnaires d'aires d'accueil des gens du voyage, instaure un nouveau type de conventionnement directement avec la société gestionnaire du site. De plus, depuis le 1er janvier 2015, la compétence a été transférée aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI).
Dans le cas de la métropole de Nice Côte d'Azur, la ville de Nice a confié la gestion de cette aire à un prestataire privé à qui sera versée l'ALT. Un décret à paraître prochainement devrait préciser les modalités d'application de la réforme et trancher définitivement le flou juridique de la définition du gestionnaire de l'équipement, et par conséquent du bénéficiaire de l'ALT : la collectivité ou le prestataire.
Or, les nouvelles modalités ne vont pas sans créer de difficultés pour les collectivités assurant la mission d'accueil des gens du voyage, dans leurs relations contractuelles avec leurs prestataires de service en charge de la gestion de ces équipements publics. Pour rappel, le projet de décret prévoit, en matière de perception de l'ALT - qui, à l'origine, est une subvention mensuelle de fonctionnement versée à la collectivité en charge de la compétence accueil des gens du voyage - qu'un tiers de cette participation sera modulée en fonction de l'occupation des aires d'accueil et que « le signataire de la convention est le gestionnaire opérationnel direct de l'aire, soit la commune/intercommunalité en cas de régie directe, soit l'opérateur en cas de gestion déléguée, soit l'opérateur en cas de gestion confiée dans le cadre d'un marché public ».
Concernant la modulation du tiers de l'aide selon le taux d'occupation, elle aura pour conséquence systématique une perte de recettes, les frais étant fixes pour la collectivité. Concernant la signature de la convention d'aide à la gestion directement entre l'État et le prestataire gestionnaire du site impliquant le versement des aides au profit de ce dernier, il n'est pas compatible avec les marchés publics en cours. Au moment de la conclusion de ces marchés, ces nouvelles dispositions n'étaient évidemment pas connues. D'un point de vue juridique, il est difficile pour le prestataire privé d'encaisser cette recette perçue sans contrepartie et non prévue dans le marché. Par ailleurs, la dépense liée au marché de gestion incombe bien à la collectivité qui rémunère son prestataire et non au gestionnaire mandaté par la collectivité.
Au vu de ces difficultés d'application, elle lui demande ce qu'elle souhaite entreprendre pour modifier ces dispositions afin de pouvoir agir dans la continuité des années précédentes en concluant une convention directement entre la collectivité et l'État lorsque la gestion est déléguée par le biais d'un marché public.
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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes publiée le 28/10/2015
Réponse apportée en séance publique le 27/10/2015
Mme Dominique Estrosi Sassone. Monsieur le secrétaire d'État, ma question porte sur la modification du bénéficiaire de l'aide au logement temporaire, l'ALT.
Le décret du 30 décembre 2014 relatif à l'aide versée aux gestionnaires d'aires d'accueil des gens du voyage a réformé les modalités de calcul et d'attribution de l'ALT. Ce décret, précisé par l'instruction ministérielle du 4 février dernier relative à la réforme de l'aide versée aux gestionnaires d'aires d'accueil des gens du voyage, instaure un nouveau type de conventionnement avec la société gestionnaire du site ; la compétence en la matière a été transférée aux établissements publics de coopération intercommunale le 1er janvier dernier.
Au sein de la métropole Nice Côte d'Azur, la Ville de Nice a confié la gestion de son aire d'accueil à un prestataire privé, à qui l'ALT sera dorénavant versée. Un décret à paraître devrait préciser les modalités d'application du nouveau dispositif, et ainsi dissiper le flou juridique entourant la définition du gestionnaire de l'équipement, bénéficiaire de l'ALT : s'agit-il de la collectivité territoriale ou du prestataire ?
Or les modalités envisagées risquent de créer des difficultés pour les collectivités territoriales dans leurs relations contractuelles avec les prestataires. En effet, le projet de décret prévoit qu'un tiers de l'aide sera modulé en fonction de l'occupation des aires d'accueil, et que « le signataire de la convention est le gestionnaire opérationnel direct de l'aire, soit la collectivité en cas de régie directe, soit l'opérateur en cas de gestion déléguée, soit l'opérateur en cas de gestion confiée dans le cadre d'un marché public ».
L'ALT est pourtant, depuis l'origine, une subvention mensuelle de fonctionnement versée à la collectivité territoriale exerçant la compétence d'accueil des gens du voyage.
Quant à la modulation du tiers de l'aide selon le taux d'occupation, elle aura pour conséquence systématique une perte de recettes pour la collectivité territoriale, alors que les frais supportés par celle-ci sont fixes.
Par ailleurs, la signature directe de la convention d'aide à la gestion entre l'État et le prestataire gestionnaire du site, qui implique le versement des aides au profit de ce dernier, n'est pas compatible avec les marchés publics en cours. Or, au moment de la conclusion de ces marchés, les nouvelles dispositions n'étaient évidemment pas connues. D'un point de vue juridique, il est difficilement admissible que le prestataire privé encaisse sans contrepartie une recette non prévue dans le marché.
Monsieur le secrétaire d'État, compte tenu de ces nombreuses difficultés d'application, le Gouvernement entend-il modifier le dispositif pour que la convention continue, comme les années précédentes, d'être conclue entre l'État et la collectivité territoriale en cas de gestion déléguée par le biais d'un marché public ?
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Harlem Désir, secrétaire d'État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes. Madame Estrosi Sassone, le décret n° 2014-1742 du 30 décembre 2014 relatif à l'aide versée aux gestionnaires d'aires d'accueil des gens du voyage, pris en application de la loi du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, a, comme vous l'avez expliqué, réformé les modalités de calcul et d'attribution de l'aide au logement temporaire.
Cette réforme, explicitement recommandée par la Cour des comptes dans son rapport de 2012 sur l'accueil et l'accompagnement des gens du voyage, a notamment consisté à introduire une modulation de l'aide en fonction de l'occupation effective des aires. Cette mesure met fin à un système dans lequel l'aide, forfaitaire, était versée indifféremment aux gestionnaires d'aires peu occupées et aux gestionnaires d'aires entièrement occupées, sans que soient nullement pris en compte les coûts induits par l'occupation.
Elle renforcera l'incitation financière des gestionnaires à développer l'attractivité et l'efficience des aires.
Le versement de l'aide financière au gestionnaire direct de l'aire n'est pas une mesure nouvelle. L'instruction n° DGCS/SD5A/2015/33 du 4 février dernier relative à la réforme de l'aide versée aux gestionnaires d'aires d'accueil des gens du voyage se borne à rappeler le dispositif légal préexistant, inspiré de la quatorzième recommandation formulée par la Cour des comptes dans son rapport de 2012 : « Verser l'aide à la gestion directement au gestionnaire de l'aire conformément à la réglementation. »
La Cour des comptes a souligné que la pratique observée consistant à verser systématiquement l'aide à la collectivité territoriale ne permettait pas « d'assurer une réelle transparence des recettes des gestionnaires d'accueil, la subvention de fonctionnement de l'État n'étant pas identifiable ».
S'agissant de la modulation du tiers de l'aide selon le taux d'occupation, qui induit une baisse de recettes pour des collectivités territoriales dont les frais sont fixes, je vous signale que le Gouvernement, pleinement conscient du problème et de l'effort déjà entrepris par les collectivités territoriales sur ce sujet sensible, un effort qui reste à consolider, a veillé à préserver le caractère forfaitaire d'une part prépondérante de l'aide - les deux tiers -, pour garantir aux collectivités une couverture suffisante des charges fixes qui leur incombent.
La modulation du tiers de l'aide selon l'occupation des aires assurera une meilleure équité par la prise en compte des dépenses directement liées à l'occupation.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Je ne puis que déplorer, monsieur le secrétaire d'État, que l'on complexifie le dispositif, d'autant plus que les communes ont réalisé des efforts pour se mettre en conformité avec la loi en créant des aires d'accueil des gens du voyage.
Dans la mesure où ces aires d'accueil, particulièrement celle de la métropole Nice Côte d'Azur, fonctionnent bien, il serait regrettable que des communes ayant consenti des efforts pour prendre à bras le corps un sujet dont vous avez souligné qu'il est sensible soient pénalisées par la réduction de l'ALT consécutive à la modulation. La gestion de ces aires entraînant des frais importants, les communes doivent avoir l'assurance, en contrepartie de leurs efforts, qu'elles n'en seront pas de leur poche !
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