Question de M. BOURQUIN Martial (Doubs - SOC) publiée le 18/06/2015
M. Martial Bourquin attire l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur l'application des conventions collectives dans les entreprise d'insertion et sur les difficultés liées à cette application.
Les responsables de ces entreprises d'insertion souhaitent, en effet, qu'une distinction soit effectuée entre les salariés permanents, auxquels s'appliquerait la convention collective, et les salariés en insertion. Ces derniers sont soumis à un contrat de travail particulier d'une durée maximale de deux ans : le contrat à durée déterminée d'insertion. L'État reconnaît d'ailleurs cette spécificité puisque Pôle emploi donne un agrément aux demandeurs d'emploi concernés, une sorte d'attestation de leurs difficultés d'insertion. Cette spécificité doit être reconnue dans son intégralité et donc, y compris lors de l'application des conventions collectives. Il rappelle que ces entreprises d'insertion ont une finalité première qui est sociale. Il s'agit de la réinsertion des personnes éloignées de l'emploi et ce, pour plusieurs raisons. On ne peut donc demander les mêmes obligations à des entreprises d'insertion qu'aux autres entreprises puisque une obligation fondamentale qui fait leur raison d'être prévaut : permettre le retour à l'emploi.
Il souligne que l'application d'une convention collective peut être un frein à l'insertion et au retour à l'emploi, puisque certains salariés en insertion hésitent face à une proposition d'une entreprise classique qui propose une convention collective différente ou moins avantageuse, voire sans convention collective.
Aussi lui demande-t-il de bien vouloir étudier la possibilité d'adapter la législation de l'application des conventions collectives aux salariés en insertion.
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Transmise au Ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social
Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargé des droits des femmes publiée le 14/10/2015
Réponse apportée en séance publique le 13/10/2015
M. Martial Bourquin. Ma question a pour objet la vitalité des entreprises uvrant au titre de l'économie sociale et solidaire, et, plus spécifiquement, des entreprises d'insertion.
La loi du 31 juillet 2014 relative à l'économie sociale et solidaire témoigne de l'importance que le Gouvernement attache à ce secteur dans la lutte pour la réduction du chômage de longue durée et la création d'activités productives innovantes et non délocalisables.
Notre pays compte 600 entreprises d'insertion, qui emploient 38 000 salariés ; ces entreprises font partie intégrante du tissu économique, dans des secteurs aussi utiles et divers que les transports, les déchets, le bâtiment, l'environnement.
La mission essentielle de ces entreprises consiste cependant, en premier lieu, à faciliter le retour à l'emploi durable des personnes qui en sont très éloignées.
Au sein de ces entreprises d'insertion cohabitent donc des salariés permanents - des encadrants, des formateurs - et des personnels en insertion bénéficiant d'un contrat de travail particulier, d'une durée maximale de deux ans.
Or les conventions collectives s'appliquent aujourd'hui de la même manière à ces deux catégories de salariés - personnels encadrants, demandeurs d'emploi de longue durée -, sans tenir compte ni de la spécificité des entreprises d'insertion et de la mission d'intégration dans l'emploi qu'elles remplissent ni de la durée très variable des contrats de travail des personnels en insertion de ces entreprises.
Je vous demande donc, madame la secrétaire d'État, d'adapter les conventions collectives à cette dualité.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Pascale Boistard, secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes. Monsieur le sénateur Martial Bourquin, comme vous l'avez dit, l'insertion par l'activité économique permet à des personnes sans emploi, rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières, de bénéficier de contrats de travail et d'une démarche individualisée d'accompagnement social et professionnel.
L'objectif est simple : faciliter l'insertion professionnelle durable sur le marché du travail.
Le contrat à durée déterminée d'insertion, prévu pour les structures de l'insertion par l'activité économique, demeure soumis aux règles de droit commun qui régissent les contrats à durée déterminée, hors dérogation expresse.
Le code du travail prévoit ainsi que les salariés recrutés en contrat à durée déterminée doivent être traités sur un pied d'égalité avec les titulaires d'un contrat à durée indéterminée. Ils bénéficient des mêmes droits et obligations, ainsi que des avantages accordés en application de la loi, de la convention collective ou des usages en vigueur. Ils ne peuvent donc pas être écartés du bénéfice d'une mesure à raison de leur seule qualité de salarié sous contrat à durée déterminée.
Les entreprises d'insertion sont des acteurs économiques qui ne peuvent pas ignorer, d'une part, la vocation des partenaires sociaux de créer des garanties à travers les conventions collectives ou accords collectifs pour l'ensemble des salariés d'un champ professionnel défini, et, d'autre part, la volonté réaffirmée du Gouvernement de laisser aux acteurs de la vie économique et sociale le soin d'élaborer les normes de leurs professions secteurs. C'est aussi un enjeu de régulation du jeu de la concurrence : la même règle s'applique à tous.
La France est l'un des pays qui bénéficient de la plus large couverture conventionnelle, grâce au recours à l'extension. Au 31 décembre 2012, quelque 710 conventions collectives de branche couvraient 15,3 millions de salariés.
Au regard des enjeux de l'insertion professionnelle des plus fragiles d'entre nous, faire bénéficier les salariés en insertion des avantages conventionnels est cohérent avec l'évolution du secteur, qui est d'ailleurs perçu comme vecteur de cohésion sociale, de développement des territoires et d'amélioration des conditions de vie.
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin.
M. Martial Bourquin. Madame la secrétaire d'État, je souscris à votre plaidoyer en faveur de l'accès des demandeurs d'emploi à la convention collective prévue pour les entreprises d'insertion.
Simplement, je tiens à faire part d'une demande, au nom des entreprises d'insertion : prenons en compte la spécificité du métier des encadrants, qui y effectuent leur carrière pour former les demandeurs d'emploi et les aider à rebondir. Il s'agit non pas d'élaborer une autre convention collective, mais simplement d'adapter celle qui est en vigueur pour tenir compte de cette dualité.
Mme la secrétaire d'État a évoqué la possibilité d'une négociation par branches. Il faut que la négociation reconnaisse la spécificité du métier et valorise ces personnels, qui donnent de leur cur et de leur savoir-faire au service des chômeurs de longue durée. Reconnaître leur compétence et leur motivation, c'est aussi les mobiliser !
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