Question de M. TRILLARD André (Loire-Atlantique - Les Républicains) publiée le 18/06/2015
M. André Trillard expose à Mme la secrétaire d'État, auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie que la regrettable affaire récente de la maison d'assistants maternels (MAM) « Graine de malice » de Bouguenais, contrainte de quitter les lieux par une décision de justice en raison des nuisances, notamment sonores, subies par le voisinage, a mis en lumière les nombreuses difficultés que rencontrent ces structures d'accueil de jeunes enfants dont la création a été permise par la loi n° 2010-625 du 9 juin 2010 relative à la création des maisons d'assistants maternels et portant diverses dispositions relatives aux assistants maternels. Qu'il s'agisse du manque d'aide juridique, logistique et financière, lors de leur création, ou des obstacles administratifs et réglementaires qui gênent leur fonctionnement et limite leur essor, tout se passe comme si les maisons d'assistants maternels - qui répondent pourtant de façon souple, innovante et peu coûteuse pour la collectivité aux importants besoins d'accueil, pallient le manque de crèches sur le territoire, se révèlent très adaptées au monde rural et suscitent, de fait, l'enthousiasme des parents ne recueillent ni l'adhésion, ni l'appui des pouvoirs publics. Lui rappelant les enjeux sous-jacents en matière de création d'emplois, il lui demande comment le Gouvernement entend agir pour accompagner le nécessaire développement des maisons d'assistants maternels et mieux répondre aux besoins des familles
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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargé de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie publiée le 22/07/2015
Réponse apportée en séance publique le 21/07/2015
M. le président. La parole est à M. André Trillard, auteur de la question n° 1175, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie.
M. André Trillard. Madame la secrétaire d'État, je pense que l'affaire de la maison d'assistantes maternelles, ou MAM, Graine de malice, située à Bouguenais en Loire-Atlantique, contrainte de quitter ses locaux par une décision de justice en raison des « nuisances » subies par les riverains, est bien connue de votre collègue, secrétaire d'État chargée de la famille.
Conduites manu militari à déménager à leur frais et à tout remettre aux normes sans aucune aide- ni du département, ni de la métropole, ni de la région -, ces cinq assistantes maternelles vont toutefois pouvoir rouvrir le 1er septembre prochain leur MAM, en d'autres lieux sur la même commune, grâce à leur ténacité et à leur énergie.
Pourquoi cette affaire a-t-elle fait grand bruit en Loire-Atlantique, où s'ouvrent des MAM, bien qu'à un rythme insuffisant par rapport à la croissance de la population ligérienne et à la demande des parents ? Parce qu'elle a mis en lumière les difficultés de tous ordres que rencontrent la mise en place et le fonctionnement de ces structures d'accueil dont la création a été permise par la loi du 9 juin 2010, qui a pour origine - je tiens à le rappeler ici - une proposition de loi sénatoriale.
Ces difficultés ont pour noms : insuffisance de l'aide juridique, logistique et financière au moment de la création de ces structures et obstacles que celles-ci rencontrent lors de leur mise aux normes. Les MAM n'ont droit qu'à une prime à l'installation et à des prêts préférentiels, c'est tout !
Pourtant, elles présentent plusieurs avantages essentiels. Tout d'abord, elles offrent une amplitude horaire d'accueil inégalable, qu'aucune structure collective ne pourrait, pour des raisons de coût, proposer.
Ensuite, leur coût de fonctionnement est compatible avec les finances de toutes les communes, puisque celui d'une crèche représente, pour la municipalité, une charge financière moyenne par enfant sept fois plus élevée.
En outre, les MAM représentent une augmentation des capacités d'accueil et de la création d'emploi : elles permettent d'ouvrir la profession à des femmes dont le logement est trop exigu, non conforme, ou dont l'habitation est située dans une zone où la demande est trop faible.
Enfin, ces structures représentent une opportunité d'évolution de carrière pour les assistantes maternelles et ont un effet psychologique positif sur certains parents, réticents à l'idée de laisser leur enfant seul avec une assistante maternelle.
Madame la secrétaire d'État, le Gouvernement a entre les mains un outil d'aménagement du territoire, un instrument de création d'emplois et un moyen d'améliorer la qualité de vie des parents comme des assistantes maternelles. Aussi, qu'entendez-vous faire pour le sécuriser juridiquement, le dynamiser et répondre ainsi au déficit de place de garde d'enfants, criant dans certaines zones ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Pascale Boistard,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes. Monsieur le sénateur, vous l'avez rappelé, les maisons d'assistants maternels ont été créées par la loi du 9 juin 2010.
Avant cela, le législateur avait autorisé le regroupement de quatre assistants maternels au sein d'un local tiers pour qu'ils puissent accueillir des enfants en dehors de leurs domiciles respectifs. Ce regroupement ne pouvait pas avoir lieu sans la signature d'une convention entre trois acteurs : les assistants maternels, la caisse d'allocations familiales et le président du conseil départemental. En outre, il n'était pas encore question, dans ce premier modèle, de délégation d'accueil entre assistants maternels.
En créant les maisons d'assistants maternels, le législateur est venu assouplir ce dispositif. Les MAM réunissent dans un même local jusqu'à quatre assistants maternels pouvant chacun accueillir quatre enfants au plus. Chaque famille emploie un seul assistant maternel mais la loi autorise l'assistant maternel qui accueille un enfant à déléguer cet accueil aux autres professionnels présents. La signature d'une convention n'est plus obligatoire.
La nouveauté du dispositif de même qu'un cadre juridique assoupli expliquent en grande partie ce que vous estimez être un manque de soutien institutionnel. Une enquête conduite par le ministère des affaires sociales en 2012 a même conclu à une certaine défiance institutionnelle à l'égard des MAM, en particulier de la part des pouvoirs publics locaux.
Pourtant - et c'est également une conclusion forte de cette même étude -, les MAM répondent à des besoins émergents. En premier lieu, ces maisons correspondent pour une part importante à un profil d'assistants maternels plus jeunes et plus diplômés. En deuxième lieu, l'exercice en MAM permet aux assistants maternels expérimentés de rompre leur isolement professionnel. Enfin, en troisième lieu, les assistants maternels peuvent mutualiser un local et ne sont donc plus contraints par la localisation ou la taille de leur domicile, qui constitue souvent un frein à leur activité.
Les MAM contribuent ainsi à renforcer l'attractivité du métier d'assistant maternel et répondent en outre aux besoins des parents, qui se sentent rassurés par un accueil familial adapté au rythme de leur enfant et par un exercice proche du collectif.
Telles sont les raisons qui expliquent que les MAM se développent et que le Gouvernement les soutient tout en veillant à en sécuriser le dispositif. Fin 2012, on comptait près de 530 MAM en activité, contre 230 en 2011, la plupart d'entre elles rassemblant trois assistants maternels et accueillant entre dix et douze enfants.
À ma demande, la direction générale de la cohésion sociale pilote un groupe de travail qui réunit l'association nationale des MAM, les représentants des collectivités territoriales, les caisses de sécurité sociale, des partenaires sociaux et des assistants maternels.
D'ici à fin septembre, les travaux de ce groupe de travail aboutiront à la rédaction d'un référentiel qui sera diffusé auprès des services de protection maternelle et infantile. Si des recommandations d'évolutions juridiques sont formulées, je les étudierai attentivement.
Ainsi, le Gouvernement agit pour accompagner le développement des MAM et pour répondre aux besoins des familles.
M. le président. La parole est à M. André Trillard.
M. André Trillard. Madame la secrétaire d'État, je tiens à souligner l'action des services de l'État en Loire-Atlantique, particulièrement celle de la direction départementale des territoires et de la mer, la DDTM, qui a accepté d'avancer la date des visites de conformité et de contrôle de sécurité des bâtiments qui vont ouvrir le 1er septembre, ce qui impliquait d'accepter d'organiser ses travaux pendant l'été.
Je veux en outre vous dire qu'il est aujourd'hui impossible de renoncer aux MAM en Loire-Atlantique, compte tenu des structures existantes et de l'évolution de la population. En effet, depuis plus de vingt ans, nous accueillons chaque année environ 15 000 nouveaux habitants et nous sommes aujourd'hui 1,3 million ; nous ne pourrons donc nous passer d'un seul des systèmes à notre disposition.
Enfin, je tiens à préciser que notre premier objectif est qu'on ne puisse plus dire, à l'avenir, que l'existence d'une MAM est incompatible avec la tranquillité publique dans un lotissement créé voilà trente-cinq ans. Je crois qu'il relève de votre devoir, madame, de traiter cette question et de nous proposer un système correct, que nous serions prêts à adopter dès demain, pour que de pareils problèmes ne se posent plus. Les MAM n'existaient sûrement pas quand le lotissement en question a été construit !
Je pense que les assistantes maternelles de Graine de Malice auraient pu gagner le procès si elles avaient interjeté appel de la décision rendue. Elles n'ont pas pu le faire, ayant déjà eu 4 000 euros de frais de justice à débourser, alors qu'elles ne touchent même pas le SMIC, en dépit de leurs horaires. Elles ont déjà consenti un effort gigantesque !
Madame la secrétaire d'État, je ne manquerais pas de vous interroger de nouveau si une affaire similaire devait éclater en Loire-Atlantique dans les semaines qui viennent, ce que je crains.
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