Question de Mme CANAYER Agnès (Seine-Maritime - UMP) publiée le 21/05/2015

Mme Agnès Canayer attire l'attention de Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie sur les difficultés de financement des projets par les agences de l'eau.

Depuis leur création en 1964, les agences de l'eau établissent des programmes pluriannuels d'intervention, qui mettent en œuvre les orientations de la politique nationale de l'eau. Il s'agit de six programmes différents adaptés aux enjeux de chaque bassin mais au service d'une seule et même politique de gestion de l'eau.

Le dixième programme de l'agence de l'eau « Seine-Normandie » s'inscrit dans la mise en œuvre de la directive 2000/60/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2000 établissant un cadre pour une politique communautaire dans le domaine de l'eau, et du schéma directeur d'aménagement et de gestion de l'eau adopté par le comité de bassin en octobre 2009. Le dixième programme doit garantir un bon état écologique sur les deux tiers des eaux de surface à l'échéance de 2015, et doit également contribuer aux objectifs de bon état pour 2021.

La réduction drastique des dotations allouées aux agences de l'eau, depuis quelques années et, plus particulièrement, depuis la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, fragilise les opérations que doit mettre en œuvre l'agence de l'eau « Seine-Normandie ». Celle-ci a dû hiérarchiser ses priorités et n'est plus en mesure d'accompagner financièrement les travaux sur l'eau, l'assainissement et les milieux aquatiques, comme elle s'y était engagée pour la mise en œuvre du dixième programme.

Aussi souhaite-t-elle connaître sa position sur ce sujet.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche publiée le 08/07/2015

Réponse apportée en séance publique le 07/07/2015

Mme Agnès Canayer. Ma question porte sur le financement des projets des agences de l'eau, notamment ceux de l'agence de l'eau Seine-Normandie.

Créées en 1964, les agences de l'eau, établissements publics administratifs, fonctionnent selon le principe mutualiste, et les comités de bassin, instances représentant les acteurs de l'eau, sont chargés de définir la politique de l'eau sur un territoire et de percevoir les redevances y afférentes, dont le taux est encadré par la loi.

Les agences financent aussi des équipements de production et de distribution de l'eau potable, ainsi que ceux qui sont destinés à la collecte et au traitement des effluents, et ce dans le cadre de programmes pluriannuels élaborés par le comité de bassin.

Pour réduire le déficit public, la loi de finances pour 2015 a acté un prélèvement annuel de 175 millions d'euros sur le fonds de roulement des agences de l'eau pour les années 2015 à 2017.

Selon le Gouvernement, le dixième programme des agences de l'eau permettra, malgré ce prélèvement, d'assurer sur la période 2013-2018 un niveau d'investissement comparable à celui du neuvième programme, qui a permis la mise aux normes des systèmes d'assainissement exigés par la directive sur les eaux résiduaires urbaines.

Cette décision a été vivement contestée sur toutes les travées de cet hémicycle. Cette mesure, outre les questions environnementales qu'elle soulève, a une incidence économique importante du point de vue tant de l'emploi que des usagers. Les communes seront aussi directement impactées dans la réalisation de leurs projets de mise aux normes de leurs équipements.

Si, globalement, le prélèvement opéré l'année dernière n'a pas conduit les agences de l'eau à réviser leur programme de travaux, il n'en est pas de même pour l'agence de l'eau Seine-Normandie, pour laquelle ces ponctions représentent 10 % des moyens d'intervention.

Le contexte est plus complexe pour cette agence, qui n'a pas de trésorerie et fonctionne avec un fonds de roulement d'un mois seulement. En outre, elle applique le principe de la modulation de la redevance en fonction de la pollution causée.

Aujourd'hui, l'agence de l'eau Seine-Normandie a la capacité de financer les projets à hauteur de 60 % du montant global des travaux prévus. Or la baisse des capacités d'investissement des maîtres d'ouvrage, l'accroissement du nombre de projets et la baisse des moyens financiers de l'agence ne permettent plus de répondre favorablement à l'ensemble des demandes d'aides reçues dans le cadre du dixième programme.

Des territoires comme Seine-Aval, où la demande est soutenue, sont directement concernés. En effet, sur ce territoire, l'agence a pu évaluer à 130 millions d'euros les demandes d'aides, alors que l'enveloppe est aujourd'hui de 78 millions d'euros.

Compte tenu de ces données chiffrées, invariables, il est évident que des projets devront être reportés, voire abandonnés.

L'une des solutions envisagées pour geler les ponctions budgétaires de 60 millions d'euros par an est l'élargissement des compétences des agences de l'eau. Monsieur le secrétaire d'État, comment ces missions peuvent-elles être réalisées avec les mêmes personnels et les mêmes moyens ? Quelles sont les prévisions pour les années à venir ? Comment envisagez-vous l'avenir de l'agence de l'eau Seine-Normandie ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Vidalies,secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice, votre question porte sur la nécessaire préservation des moyens des agences de l'eau pour la mise en œuvre de la politique de l'eau.

L'article 32 de la loi de finances pour 2015 prévoit un prélèvement de 175 millions d'euros par an sur le fonds de roulement des agences de l'eau de 2015 à 2017. Cette contribution s'inscrit dans le cadre de l'effort collectif demandé à tous les opérateurs de l'État.

Le calibrage de cette mesure a été effectué pour éviter une remise en cause des fondements des dixièmes programmes d'intervention des agences de l'eau, dont 90 % constituent des investissements.

Les conseils d'administration des agences pourront répartir cette réduction tout au long des programmes d'intervention.

Cette contribution ne devrait pas conduire à un accroissement de la pression fiscale pour les usagers de l'eau ni remettre en cause les travaux programmés et les emplois.

Les orientations votées dans les programmes seront préservées pour atteindre les engagements communautaires à l'égard de la directive-cadre sur l'eau, de la directive relative au traitement des eaux résiduaires urbaines et des directives sectorielles.

Il est nécessaire de contribuer à l'effort de réduction du déficit budgétaire et de continuer à mobiliser les moyens permettant de respecter nos engagements européens, en particulier les objectifs du bon état des eaux fixés par la directive-cadre sur l'eau.

Le Gouvernement a ainsi fixé en juillet 2014 les orientations prioritaires de la politique de l'eau dans chaque bassin, de manière à guider les choix concernant la répercussion du prélèvement par les instances de gouvernance des agences sur les aides versées par ces établissements.

Mme Ségolène Royal a également rencontré l'ensemble des présidents de comité de bassin, leur indiquant sa volonté de concilier l'objectif gouvernemental prioritaire de redressement des comptes publics et l'enjeu du maintien d'une politique de l'eau ambitieuse dotée de financements suffisants.

M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer.

Mme Agnès Canayer. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de vos propos qui ne me rassureront pas plus qu'ils n'ont répondu aux interrogations du conseil d'administration de l'agence de l'eau Seine-Normandie.

Nous avons bien conscience de la nécessité de participer à l'effort commun de réduction des déficits ; mais les agences étant tenues de respecter les normes toujours plus nombreuses qui s'imposent au niveau tant européen que local, le respect de celles-ci exige des mises aux normes et des travaux importants.

Or la réduction des financements de l'agence de l'eau aura évidemment des conséquences sur les partenaires concernés, puisque les collectivités territoriales, notamment les communes, se verront privées d'une source de revenus supplémentaires pour effectuer les travaux indispensables.

Cette réduction affectera aussi l'emploi. Je vous rappelle à cet égard que l'agence de l'eau Seine-Normandie emploie jusqu'à 1 000 équivalents temps plein, ne serait-ce que pour réaliser des missions d'animation sur l'ensemble du territoire.(Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)

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