Question de M. DURAN Alain (Ariège - SOC) publiée le 14/05/2015

M. Alain Duran attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur les effets paradoxaux, au regard des objectifs d'accès aux soins, que produisent les normes de santé et de sécurité appliquées aux centres hospitaliers de proximité, ex-hôpitaux locaux.

Dans le département de l'Ariège, le centre hospitalier « Jules Rousse » de Tarascon-sur-Ariège bénéficie de la qualification d'établissement sanitaire, grâce au maintien d'un service de soins de suite et de réadaptation (SSR) de quinze lits, en complément de son établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) de 150 lits. Ce statut lui permet d'assurer la présence d'infirmières et d'un praticien hospitalier, indispensables au maintien d'une offre de soins de qualité et accessible dans une zone de montagne enclavée.

Le centre hospitalier est aujourd'hui menacé de voir son service SSR déqualifié en raison de l'impossibilité d'assurer une veille médicale permanente, nuit et jours fériés compris. Cette exigence est intenable, au vu des moyens du centre hospitalier, qui ne peut compter qu'un seul praticien hospitalier dans ses effectifs.

La mutualisation des moyens avec les équipes hospitalières environnantes, promue par les services de l'État comme solution alternative, se heurte, en pratique, au refus des médecins concernés, légitimement peu enclins à assurer une permanence de garde sur un lieu se situant à une distance-temps trop élevée. Le centre hospitalier a proposé d'organiser cette veille médicale via le recours au service d'aide médicale d'urgence (SAMU), lequel est rattaché au centre hospitalier du « Val d'Ariège », situé à vingt minutes. Le recours au SAMU étant réservé aux soins ambulatoires, cette proposition a été écartée par la Haute autorité de santé.

Le centre hospitalier « Jules Rousse » est, dès lors, susceptible de perdre son statut d'établissement public de santé. La privation des crédits sanitaires qui y sont associés se traduirait par une baisse préjudiciable des effectifs et de la qualité de prise en charge du public gériatrique.

Le cas du centre hospitalier « Jules Rousse » s'inscrit dans une problématique beaucoup plus large, à l'échelle nationale, en termes de désertification médicale et des réponses qui sont apportées pour y remédier. La loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a soumis les ex-hôpitaux locaux au droit commun des établissements publics de santé, empêchant, de ce fait, la prise en compte des particularités, des réalités qui constituent l'environnement de ces centres hospitaliers de proximité : enclavement, petite taille, désertification médicale.

Les critères de certification aujourd'hui appliqués par la Haute autorité de santé aboutissent à une situation paradoxale où la mise en avant d'objectifs de qualité et de sécurité conduit, en réalité, à accroître l'insécurité sanitaire des habitants de zones rurales, en les éloignant des centres médicaux en mesure de les accueillir dans un délai rapproché.

Comme la fédération hospitalière de France le sollicite justement, il convient d'aménager, en fonction de la réalité des territoires, les critères appliqués par la Haute autorité de santé et les agences régionales de santé (ARS) pour la certification des établissements sanitaires. Leur application rigide et inadaptée à la diversité des territoires contrevient au principe essentiel, auquel est attaché le Gouvernement, d'égalité et de solidarité territoriale, en vue notamment d'assurer un maillage territorial dense dans l'offre de soins.

Après que le Gouvernement a annoncé parmi ses priorités, lors du comité interministériel aux ruralités, le soutien aux hôpitaux de proximité, il l'interroge sur les mesures et aménagements pratiques qu'il entend prendre pour éviter leur disparition dans les zones les plus fragiles.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargé de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie publiée le 08/07/2015

Réponse apportée en séance publique le 07/07/2015

M. Alain Duran. Madame la secrétaire d'État, je tiens à attirer votre attention sur les effets paradoxaux, au regard des objectifs d'accès aux soins, que produisent les normes de santé et de sécurité appliquées aux centres hospitaliers de proximité, que l'on appelle encore parfois les hôpitaux locaux.

Dans mon département, le centre hospitalier de Tarascon-sur-Ariège bénéficie de la qualification d'établissement sanitaire, grâce au maintien d'un service de soins de suite et de réadaptation, ou service SSR, lequel comprend 15 lits. Ce service vient en complément de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou EHPAD, qui compte, lui, 150 lits.

Ce centre hospitalier est aujourd'hui menacé de voir son service SSR déqualifié, faute de pouvoir assurer une veille médicale permanente. Il y parvenait jusqu'en 2013 grâce à l'appui d'un médecin coordonnateur, qui a, hélas ! démissionné, et d'un médecin qui, à cette date, est parti à la retraite.

Depuis, cet établissement a recours ponctuellement au SAMU rattaché au centre hospitalier du val d'Ariège, joignable en quinze minutes par une voie rapide. Cette solution est efficiente, mais elle est rarement utilisée : seulement dix appels vers le 15 ont été enregistrés en 2014, soit moins d'un par mois. (Mme Catherine Génisson s'exclame.) Or, le recours au SAMU étant légalement réservé aux soins ambulatoires, la Haute Autorité de santé enjoint désormais au centre hospitalier de revenir à un tableau de veille et de renoncer à ce dispositif pour son SSR.

Dès lors, le centre hospitalier de Tarascon risque de perdre son statut d'établissement public de santé, faute de pouvoir respecter des normes dont l'application rigide exige la mise en place d'un dispositif qui se révélerait plus coûteux et moins efficient.

La disparition du caractère d'établissement sanitaire qui, vous en conviendrez, contribue à l'attractivité de l'EHPAD, pourrait se traduire par une baisse préjudiciable des effectifs et, bien entendu, de la qualité de la prise en charge du public gériatrique.

Le cas du centre hospitalier de Tarascon-sur-Ariège s'inscrit dans une problématique beaucoup plus large, à l'échelle nationale : celle de la désertification médicale et des réponses à apporter pour y remédier. La loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST »,datant de 2009, a soumis les ex-hôpitaux locaux au droit commun des établissements publics de santé. De ce fait, elle a empêché la prise en compte des particularités et des réalités constituant l'environnement de ces centres hospitaliers de proximité : la petite taille de ces structures, l'enclavement des territoires et la désertification médicale.

Les critères de certification aujourd'hui appliqués par la Haute Autorité de santé aboutissent à une situation paradoxale. La mise en avant d'objectifs de qualité et de sécurité conduit, en réalité, à accroître l'insécurité sanitaire pour les habitants des zones rurales, en les éloignant des centres médicaux en mesure de les accueillir dans un délai restreint.

Une application de ces critères dénuée de pragmatisme et inadaptée à la diversité des territoires contrevient aux principes essentiels d'égalité et de solidarité territoriale, auxquels nous sommes attachés.

Madame la secrétaire d'État, lors du comité interministériel aux ruralités, le Gouvernement a annoncé, au nombre de ses priorités, le soutien aux hôpitaux de proximité. Pouvez-vous me préciser les mesures et aménagements pratiques qu'il entend prendre pour éviter la disparition de ces structures dans les zones rurales les plus fragiles ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Laurence Rossignol,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie.Monsieur le sénateur, depuis 2012, le Gouvernement mène une action déterminée de réduction des inégalités territoriales d'accès aux soins.

Après une première mesure en faveur des établissements isolés et situés dans des zones de faible densité, une nouvelle disposition en faveur des hôpitaux de proximité, adoptée au titre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, viendra prochainement concrétiser l'un des engagements du pacte territoire-santé.

Le centre hospitalier de Tarascon-sur-Ariège présente une activité importante d'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes de 150 lits, ainsi qu'une activité de soins de suite et de réadaptation de 15 lits.

L'activité de soins nécessite une organisation médicale de nature à garantir la continuité des soins. Néanmoins, la mise en œuvre de cette exigence se heurte à des difficultés engendrées, notamment, par la démographie médicale dans ce bassin de santé. Cette problématique a été identifiée par l'agence régionale de santé, l'ARS. Elle a également été rappelée par la Haute Autorité de santé lors de sa dernière visite de certification.

L'ARS travaille actuellement avec la direction de l'établissement pour conforter sa place dans la filière gériatrique mise en œuvre dans le territoire de l'Ariège. Dans ce contexte, les travaux visent notamment la transformation de lits de soins de suite et de réadaptation en unité de soins de longue durée pour répondre au mieux aux besoins de santé de la population, dans le respect des exigences réglementaires.

Vous l'avez compris, cette orientation vise, d'une part, à conforter la place de cet établissement de santé dans son territoire et, d'autre part, à maintenir la qualité et la sécurité des prises en charge. Ces objectifs sont bel et bien indissociables pour assurer le maintien d'une offre de soins de proximité, accessibles pour la population.

M. le président. La parole est à M. Alain Duran.

M. Alain Duran. Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse. Je ne doutais nullement de la volonté de ce gouvernement de nous aider à maintenir, dans nos territoires, ces structures indispensables. Aussi, je compte sur vous et sur vos services pour nous accompagner dans cette démarche : il faut entendre les attentes spécifiques de la ruralité.(Mme la secrétaire d'État acquiesce.)

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