Question de M. GROSPERRIN Jacques (Doubs - UMP) publiée le 29/05/2015
Question posée en séance publique le 28/05/2015
Concerne le thème : La réforme du collège
M. Jacques Grosperrin. Madame la ministre, la réforme du collège, que vous avez menée avec brutalité et dogmatisme (Protestations sur les travées du groupe socialiste.),
Mme Catherine Troendlé. C'est vrai !
M. Jacques Grosperrin.
a dressé contre le Gouvernement auquel vous appartenez les acteurs de la communauté éducative, l'opinion publique et de nombreux intellectuels des vrais intellectuels !
Mme Françoise Cartron. Car il y aurait de faux intellectuels ?
M. Jacques Grosperrin. Comment en est-on arrivés là, alors que vous partiez d'une bonne intention, si l'on en croit vos déclarations, madame la ministre ? Il s'agissait, disiez-vous, de partir de ce qui marche déjà sur le terrain, de libérer les capacités d'initiative.
M. Didier Guillaume. C'est ce qui va arriver !
M. Jacques Grosperrin. Je vous donne acte de la mise en œuvre de votre intention de libérer les initiatives : l'accroissement de l'autonomie va dans le bon sens.
Mais, pour le reste, quel échec ! Vous prétendez en effet partir de ce qui marche sur le terrain (M. Didier Guillaume s'exclame.) et vous commencez par supprimer les expériences pédagogiques, qui ont fait la preuve de leur efficacité et de leur attractivité. Je parle bien entendu des classes bilangues et de l'enseignement des langues anciennes en tant que matière à part entière.
S'agissant des classes bilangues, vous supprimez une proposition pédagogique qui permet l'apprentissage de deux langues dès la sixième, qui concerne actuellement 80 000 élèves de sixième et qui a permis, à partir de 2005, de maintenir les effectifs en langue allemande.
En remplacement de cette proposition, qui fonctionne sur le terrain, vous proposez que tous les élèves puissent apprendre une deuxième langue de leur choix dès la cinquième. Cette modification pose trois problèmes. D'abord, comme l'a relevé M. Ayrault, il y a fort à craindre que les élèves ne fassent le choix de l'espagnol contre l'allemand. Ensuite, nos élèves n'auront pas le niveau suffisant pour appréhender une deuxième langue dès la cinquième, et vous les conduirez à l'échec. Enfin, de nombreuses familles vont fuir le collège public pour aller dans les établissements privés, qui proposeront, eux, des classes bilangues.
Sur les langues anciennes, vous prétendez les offrir à tous alors que vous les supprimez en tant qu'enseignements autonomes. Qui peut croire que les mesures de votre réforme permettront de les sauvegarder ?
M. le président. Posez votre question, mon cher collègue, afin de permettre à Mme Garriaud-Maylam de bénéficier de la retransmission télévisée.
M. Jacques Grosperrin. En réalité, votre réforme s'emploie à tirer tous les élèves vers le bas et révèle une fois de plus combien le socialisme a un problème avec l'excellence et la méritocratie. (Protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Jacques Grosperrin. Ne serait-il pas encore temps, madame la ministre, de retirer ce texte pour travailler en véritable concertation avec les acteurs, pour faire en sorte que les enfants de la République réussissent.
Enfin, à quel moment le Parlement s'est-il prononcé sur le contenu de cette réforme du collège qui, d'après vous, fait suite à la loi de refondation de l'école ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre, pour deux minutes. Je suis certain que Jacques Grosperrin contractera son temps de parole lors de sa réplique.
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Réponse du Ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 29/05/2015
Réponse apportée en séance publique le 28/05/2015
Mme Najat Vallaud-Belkacem,ministre.Monsieur le sénateur Jacques Grosperrin, vous me demandez à quel moment les parlementaires se sont prononcés. Ils l'ont fait lors du vote sur le projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République, en 2013 ; c'était il y a vingt-deux mois.
M. Roger Karoutchi. Nous ne nous sommes pas prononcés sur la réforme du collège !
Mme Najat Vallaud-Belkacem,ministre.Que prévoit la réforme du collège s'agissant des langues vivantes étrangères ? Elle prévoit que l'apprentissage de la deuxième langue vivante se fera plus précocement qu'aujourd'hui : dès la classe de cinquième, et non en plus en classe de quatrième.
M. Didier Guillaume. Très bonne mesure !
Mme Najat Vallaud-Belkacem,ministre.Toutes les enquêtes démontrent qu'une exposition plus précoce à une langue vivante étrangère en renforce la maîtrise. Il est évidemment dans l'intérêt de tous ces jeunes qui seront sans doute amenés à rejoindre le marché du travail en 2023 de pratiquer de façon aisée deux langues vivantes étrangères, quel que soit le métier qu'ils exerceront.
La logique des classes bilangues, qui consiste à faire pratiquer deux langues vivantes étrangères dès la classe de sixième à une minorité de collégiens- 15 % -, est non seulement préservée, mais également étendue à tous les collégiens. Vous êtes d'accord avec moi, le bilinguisme sera désormais offert à tous les collégiens en classe de cinquième.
J'insiste de nouveau sur un point : ce qui demeurera dans la réforme du collège, c'est la possibilité, pour tous les élèves - et pas seulement pour ceux de certains collèges, sur la base du volontariat -qui ont appris à l'école primaire, comme première langue vivante, une autre langue que l'anglais, d'accéder à l'anglais comme deuxième langue vivante dès la classe de sixième.
M. le président. Il faut conclure, madame la ministre !
Mme Najat Vallaud-Belkacem,ministre.Pourquoi faisons-nous cela ? Parce que nous savons que, ce qui peut arrêter les parents dans le choix d'une autre langue que l'anglais comme première langue, c'est la crainte que leur enfant n'aborde l'anglais, langue indispensable de notre monde, que trop tard, en classe de quatrième.
M. le président. Il faut vraiment conclure, madame la ministre !
Mme Najat Vallaud-Belkacem,ministre.Nous leur garantissons aujourd'hui que leur enfant pourra apprendre l'anglais comme deuxième langue vivante dès la classe de sixième. C'est une formidable façon de diversifier le choix des langues.
Mme Françoise Cartron. C'est du plurilinguisme !
Mme Najat Vallaud-Belkacem,ministre.En effet, c'est du plurilinguisme.(Applaudissementssur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. Vous n'écoutez pas en classe, madame la ministre !
La parole est à M. Jacques Grosperrin, pour une réplique rapide. Je suis le garant de l'équité dans cet hémicycle.
M. Jacques Grosperrin. Madame la ministre, vous savez très bien que, comme les associations de parents d'élèves nous l'ont dit avant-hier, il n'était pas question de la réforme du collège dans la loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République. Vous avez confisqué la parole au Parlement.(Applaudissementssur les travées de l'UMP.- protestations sur les travées du groupe socialiste.)
M. Claude Bérit-Débat.C'est excessif !
M. Jacques Grosperrin. C'est un rétropédalage, parce que vous vous êtes rendu compte qu'il fallait passer en force. Si vous vouliez organiser une concertation, il fallait débattre avec le Parlement. Travailler sous forme de décrets, ce n'est pas honorable pour une ministre de la République.(M. Didier Guillaume s'exclame.) On a très bien vu le rétropédalage. Il fallait passer en force. Vous sentiez que les acteurs de la vie éducative allaient agir. Il aurait été plus judicieux de réaliser des expérimentations dans certains départements si vous vouliez vraiment réformer le collège.(Applaudissementssur les travées de l'UMP.- M. Claude Kern applaudit également.)
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