Question de Mme SCHILLINGER Patricia (Haut-Rhin - SOC) publiée le 30/04/2015

Mme Patricia Schillinger attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire sur le maintien de la dénomination de qualité « fait main » des bottiers et la préservation de la filière française du cuir. Le secteur du luxe français fonde son savoir-faire sur la qualité des articles confectionnés par ses artisans et la qualité de la fabrication à la main, garante de la réputation de nos productions et du maintien des emplois en France, s'avère déterminante. L'article 1 de la loi loi n° 48-824 du 14 mai 1948 réglementant l'emploi de la dénomination de qualité « fait main » et l'emploi de l'expression « bottier » dans l'industrie et le commerce stipule que « la dénomination de qualité fait main est exclusivement réservée, dans le commerce de la chaussure, aux chaussures qui ont été confectionnées à la main, sans intervention de la machine, sauf en ce qui concerne l'assemblage des diverses pièces composant la tige ». Ce dernier permet de protéger un savoir-faire traditionnel d'excellence ainsi que de pérenniser la filière française du cuir. Or, la Commission européenne a engagé une procédure d'infraction à l'égard de la France sur le fondement de l'article 258 du traité de fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) pour entrave aux échanges qui est susceptible d'entraîner une révision voire une abrogation de l'article 1 de la loi en cause. Les professionnels de la filière s'inquiètent car si cette abrogation était confirmée, les chaussures faites à la main entièrement réalisées dans des ateliers installés en France et les chaussures produites en série de façon mécanisée, seraient alors mises sur le même plan. Cela entraînerait une concurrence déloyale, une désinformation du consommateur et mettrait en plus à mal les emplois de cette filière. Par conséquent, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer ce que le Gouvernement compte faire pour que soit maintenue dans son intégralité la loi n° 48-824 du 14 mai 1948, afin de préserver le savoir-faire du « fabriqué main » français.

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Transmise au Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargé du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire


Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargé du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire publiée le 09/07/2015

À la suite d'une plainte de professionnel, la Commission européenne (CE) a engagé, depuis janvier 2012, un contentieux avec la France au sujet de la loi n° 48-824 du 14 mai 1948 « réglementant l'emploi de la dénomination de qualité "fait main" et l'emploi de l'expression "bottier" dans l'industrie et le commerce ». En particulier, l'article 1er de cette loi dispose que « la dénomination de qualité "fait main" est exclusivement réservée, dans le commerce de la chaussure, aux chaussures qui ont été confectionnées à la main, sans intervention de la machine, sauf en ce qui concerne l'assemblage des diverses pièces composant la tige ». La Commission, jugeant cette définition trop restrictive (au regard des appellations similaires utilisées dans d'autres États membres, telles que « hand made », « fatto a mano », ...) et source potentielle d'entraves injustifiées aux échanges, a entamé une procédure d'infraction à l'égard de la France, sur le fondement de l'article 258 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Dans la mesure où, d'une part, l'issue de ce contentieux est fortement susceptible d'aboutir à une condamnation de la France et où, d'autre part, la loi n° 48-824 du 14 mai 1948 - au demeurant peu appliquée et jamais réactualisée depuis son origine - apparaît techniquement obsolète, les travaux visant à abroger cette loi ont été engagés. Il faut replacer l'utilité de la loi du 14 mai 1948 précitée dans son contexte historique : à l'époque, le risque de confusion était relativement grand dans l'esprit du consommateur (et l'écart de prix relativement faible) entre une chaussure produite artisanalement et une chaussure produite à la machine. Surtout, il n'existait dans l'arsenal législatif national aucun instrument adapté pouvant réprimer la « publicité mensongère » (appelée depuis « pratique commerciale trompeuse ») quant au mode de fabrication des produits. Bien entendu, ce contexte - technique, commercial et législatif - a fortement évolué depuis 1948. Aussi, l'abrogation de cette loi ne créerait pas un vide juridique, sachant que les abus commis en la matière peuvent et pourront être sanctionnés à l'aide des textes généraux réprimant la tromperie et les pratiques commerciales trompeuses (cf. respectivement les articles L. 213-1 et L. 121-1 du code de la consommation), textes dont les sanctions viennent d'être notablement alourdies par la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation, et qui sont aujourd'hui beaucoup plus dissuasives que les sanctions spécifiques issues de la loi de 1948. Par ailleurs, la disparition de la loi nationale spécifique aux bottiers ne signifierait nullement la négation d'un savoir-faire artisanal, ni une situation où les chaussures produites artisanalement à l'unité ou en petites séries, devraient désormais être placées sur le même plan commercial que les chaussures produites industriellement, mécaniquement et en grandes séries. Au contraire, les bottiers réalisant des chaussures adaptées à la morphologie du pied et/ou aux désirs particuliers de leur clientèle peuvent et pourront se prévaloir de mentions, telles que « chaussures réalisées sur mesure », allégations publicitaires particulièrement pertinentes et valorisantes, qui à l'avenir seront découplées de l'usage éventuel de la machine pour réaliser telle ou telle opération, tout en préservant l'aspect artisanal, créatif et d'excellence qui caractérise la filière française du cuir et ses métiers d'art.

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