Question de Mme DES ESGAULX Marie-Hélène (Gironde - UMP) publiée le 02/04/2015
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget sur la généralisation à l'ensemble du territoire de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, initiée au début de l'année 2013.
Cette étape fait suite à une expérimentation menée en 2011 dans certains départements. Elle prévoit, selon l'article 34 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010, l'instauration d'une révision des valeurs locatives des locaux professionnels en fonction d'un tarif déterminé à l'avance qui prend en compte le secteur locatif et la surface du bien.
Ainsi, dans chaque département, une commission mixte composée de représentants d'élus et de contribuables a été mise en place. Elle a été tenue d'examiner le projet, ainsi que les paramètres de la grille tarifaire fournie par l'administration fiscale.
Si le bien-fondé de cette révision des valeurs locatives, qui reposaient auparavant sur des règles complexes et peu intelligibles, semble relever du bon sens, il est, en revanche, possible d'émettre de sérieux doutes sur la qualité des moyens mis en œuvre pour solliciter l'avis des commissions intercommunales des impôts directs (CIID).
En effet, lors du processus de validation desdits paramètres, les commissions intercommunales ont émis, dans la plupart des départements dont celui de la Gironde, des avis largement défavorables.
Tout d'abord, le délai de trente jours octroyé aux commissions pour émettre un avis a été jugé beaucoup trop court et n'a pas permis un travail approfondi ni apaisé.
Par ailleurs, cette révision n'a pas manqué de susciter les plus vives inquiétudes des élus locaux dont elle se fait la porte-parole. En effet, les fiches d'impact fournies aux commissions se sont révélées souvent parcellaires, voire inexploitables.
Plus préoccupant encore : ces fiches d'impact laissent entrevoir de fortes disparités puisqu'elles ne prennent pas en compte la réalité du marché, à savoir que plus un local est grand et plus son loyer par mètre carré diminue.
Cela se traduit, dans les communes, par de fortes variations des cotisations entre les différents acteurs professionnels. Par exemple, les grandes surfaces situées en périphérie sont avantagées et cotisent moins en comparaison des petits commerçants situés en centre-ville.
Elle attire donc son attention sur la difficulté, pour les élus, de prendre une décision motivée et en connaissance de cause, ainsi que sur la menace qui pèse désormais sur la fiscalité des entreprises.
En conséquence, elle lui demande s'il est possible de fournir aux communes des études d'impact plus détaillées et si le Gouvernement accepte une « remise à plat » du processus de cette réforme, le report du calendrier le permettant.
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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale publiée le 10/06/2015
Réponse apportée en séance publique le 09/06/2015
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Je veux appeler l'attention de M. le secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget sur la généralisation à l'ensemble du territoire de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, initiée au début de l'année 2013.
Pour rappel, cette étape fait suite à une expérimentation menée en 2011 dans certains départements. Elle prévoit, selon l'article 34 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, l'instauration d'une révision des valeurs locatives des locaux professionnels en fonction d'un tarif déterminé à l'avance, qui prend en compte le secteur locatif et la surface du bien. Ainsi, dans chaque département, une commission mixte composée de représentants d'élus et de contribuables a été mise en place. Elle a été tenue d'examiner les paramètres du projet de grille tarifaire fournie par l'administration fiscale.
Si le bien-fondé de cette révision des valeurs locatives, qui reposaient auparavant sur des règles complexes et peu intelligibles, semble relever du bon sens, il est en revanche possible d'émettre de sérieux doutes quant à la qualité des moyens mis en uvre pour solliciter l'avis des commissions intercommunales des impôts directs. En effet, lors du processus de validation des paramètres de la grille tarifaire, ces commissions ont émis dans la plupart des départements, dont celui de la Gironde, comme j'ai pu moi-même le constater, des avis largement défavorables.
Il faut dire que le délai de trente jours octroyé aux commissions intercommunales des impôts directs pour émettre un avis a été jugé beaucoup trop court et n'a pas permis un travail approfondi ni apaisé. Cette révision n'a pas manqué non plus de susciter les plus vives inquiétudes des élus locaux, dont je veux me faire le porte-parole. En effet, les fiches d'impact fournies aux commissions intercommunales des impôts directs se sont souvent révélées parcellaires et même, quelquefois, totalement inexploitables. Plus préoccupant encore, ces fiches d'impact laissent entrevoir de fortes disparités, puisqu'elles ne prennent pas en compte la réalité du marché, à savoir la règle selon laquelle plus un local est grand, plus son loyer par mètre carré diminue. Cela se traduit, dans les communes, par de fortes variations des cotisations entre les différents acteurs professionnels. Par exemple, les grandes surfaces situées en périphérie sont avantagées et cotisent moins que les petits commerçants situés en centre-ville.
J'appelle l'attention sur la difficulté pour les élus de prendre une décision motivée et en connaissance de cause, ainsi que sur la menace qui pèse désormais sur la fiscalité de nos entreprises. Je souhaite donc savoir s'il est envisagé de fournir aux communes des études d'impact plus détaillées et si le Gouvernement accepte une remise à plat du processus de cette réforme, puisque le report du calendrier le permet maintenant.
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Vallini,secrétaire d'État auprès de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique, chargé de la réforme territoriale.C'est sur l'initiative du Parlement, notamment de la commission des finances du Sénat, que le processus de révision des valeurs locatives des locaux professionnels, puis, dans un second temps, des locaux d'habitation, a été engagé par le Gouvernement. Ce processus résulte, pour ce qui concerne les locaux professionnels, de l'adoption d'un amendement à la loi de finances rectificative du 29 décembre 2013. Cette réforme fait partie, comme vous l'avez dit, madame la sénatrice, de revendications anciennes des diverses associations d'élus locaux, régulièrement rappelées au Gouvernement.
La principale justification de cette réforme, attendue depuis longtemps, est le constat de l'injustice fiscale résultant du mode de calcul actuel des valeurs locatives, qui remonte à quarante ans. Chaque année, les valeurs locatives sont éventuellement revalorisées mais toujours de manière uniforme, sans tenir compte des évolutions relatives des prix de l'immobilier et des valeurs foncières entre différents quartiers d'une même commune ou entre deux collectivités distinctes. C'est à cette situation que nous souhaitons remédier, en évitant les écueils des précédentes réformes, qui ont toutes échoué. C'est pour cette raison que le Gouvernement, par la voix de Christian Eckert, secrétaire d'État chargé du budget, a annoncé qu'il solliciterait du Parlement un report de l'entrée en vigueur de cette révision.
J'entends ce que vous avez dit à propos des fiches d'impact qui ont été fournies aux commissions intercommunales des impôts directs examinant les effets de la réforme. Toutefois, à l'heure actuelle, il n'est pas possible d'avoir une vision fiable et globale des effets de la réforme sur certaines catégories de contribuables. Les inquiétudes qui s'élèvent sont donc infondées ou pour le moins prématurées.
Nous faisons face en effet à un processus délicat : en l'absence de délibération des commissions intercommunales des impôts directs, l'administration est dans l'incapacité de produire des simulations de la réforme qui soient fiables. Toutefois, comme vous le signalez, certaines commissions peuvent craindre de ne pas disposer de l'ensemble des informations nécessaires à leurs délibérations.
La seule manière d'avancer est donc la suivante : prioritairement, mener à son terme le travail des commissions intercommunales des impôts directs, qui seul permettra d'évaluer les conséquences de la révision ; ensuite, pour répondre à votre préoccupation, ne pas mettre en uvre cette réforme dès 2016, afin d'éviter les éventuels effets pervers qu'on n'aurait pas pu prévoir. En effet, reporter la réforme permettra à la fois aux commissions, et donc aux élus locaux et nationaux, d'avoir une vision claire de ses conséquences. Nous disposerons alors d'une année supplémentaire pour envisager, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2016, les évolutions qui pourraient être nécessaires afin de rendre la réforme soutenable pour l'ensemble des contribuables.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Soyons clairs, nous ne sommes pas opposés à la révision des valeurs locatives cadastrales. Seulement, cette question est extrêmement sensible, car les conséquences d'une telle révision peuvent être très lourdes pour nos entreprises. Aussi, il me semble qu'il convient d'engager une vraie concertation avec les élus locaux, au cas par cas. Il ne faut pas en rester au formalisme de ces commissions, parce que, comme vous venez de le reconnaître vous-même, monsieur le secrétaire d'État, le Gouvernement ne peut pas leur fournir la totalité des éléments qu'elles réclament.
Remettez-vous-en à la sagesse des élus locaux, à leurs connaissances du territoire. Voilà pourquoi il faut absolument que le Gouvernement engage cette concertation. Cela me paraît d'autant plus essentiel que d'autres réformes doivent suivre celle-ci. Si on« loupe », si j'ose dire, la révision des valeurs locatives des locaux professionnels qu'en sera-t-il de celle des valeurs locatives des locaux d'habitation ? Il faut donc que cette réforme soit exemplaire.
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