Question de M. LENOIR Jean-Claude (Orne - UMP) publiée le 10/04/2015
Question posée en séance publique le 09/04/2015
M. Jean-Claude Lenoir. Le Parlement, à une large majorité, a voté la loi du 13 juillet 2011 sur l'interdiction de l'exploration et de l'exploitation des hydrocarbures dits « gaz et pétrole de schiste », par fracturation hydraulique.
M. Daniel Raoul. Et maintenant les gaz de schiste !
M. Jean-Claude Lenoir. Cette loi comportait notamment deux dispositions. D'une part, un comité de suivi formé d'experts en mesure d'accompagner les expérimentations demandées par la loi devait être mis en place. D'autre part, un rapport devait être remis chaque année par le Gouvernement au Parlement afin de l'informer du suivi de ce dossier.
Les quatre ministres chargés de l'énergie qui se sont succédé depuis l'élection présidentielle de 2012 se sont tous refusés à mettre cette loi en application.
Devant cette inertie, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques a demandé à deux de ses membres, Christian Bataille, député socialiste, et moi-même, sénateur du groupe UMP, de faire le point sur la question. Le rapport que nous avons élaboré a été adopté par 19 voix pour, ces voix correspondant à la quasi-totalité des groupes politiques représentés au Parlement, avec 2 voix écologistes contre. Il préconisait tout simplement que l'on poursuive les recherches et que l'on ne reste pas à la traîne de la plupart des pays qui suivent ce sujet.
Le Gouvernement s'est entêté et n'a pas voulu appliquer la loi du 13 juillet 2011. Or, mardi dernier, nous avons appris dans un quotidien du matin que ce même gouvernement avait demandé à un groupe d'experts et de scientifiques de faire le point sur ce thème, quelques semaines seulement après la publication du rapport de l'office parlementaire !
Ces experts et scientifiques ont remis un rapport qui a été caché : le Gouvernement l'a enfermé dans un coffre et n'a pas souhaité que cette question soit posée !
Quand je regarde la statue de Turgot, je me souviens d'une phrase qu'il a prononcée : « La curiosité fait toujours agir jusqu'à ce qu'elle ait épuisé l'objet de ses recherches, mais aucune question ne peut être épuisée, sauf à connaître la vérité ». La vérité, il faut la connaître, en effet, il faut savoir ce qu'il en est. Nous ne pourrons pas rester à l'écart.
M. Didier Guillaume. À l'écart de quoi ?
M. Jean-Claude Lenoir. Par conséquent, je pose la question au Gouvernement : pourquoi avez-vous caché ce rapport ? Depuis ce matin, j'ai également une seconde question à poser : pourquoi avez-vous dissimulé un autre rapport, celui qui a été réalisé par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME, sur les perspectives du développement des énergies renouvelables d'ici à 2050 ? (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche publiée le 10/04/2015
Réponse apportée en séance publique le 09/04/2015
M. Alain Vidalies,secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur Lenoir, le Gouvernement a toujours été très clair sur le principe qui se trouve au cur de votre question, à savoir l'interdiction de l'exploitation du gaz de schiste.(Exclamations sur les travées de l'UMP.) Le rapport auquel vous faites référence reconnaît que la fracturation hydraulique est condamnable dans le domaine environnemental.
Mme Catherine Procaccia etM. Ladislas Poniatowski. Ce n'est pas la question !
M. Alain Vidalies,secrétaire d'État. L'alternative qu'il propose n'est pas une solution. (Protestations sur les travées de l'UMP.) Il s'agit d'une technologie qui n'est pas mature et pour laquelle il n'existe aucun retour d'expérience.
Mme Isabelle Debré etM. Francis Delattre. Mais ce n'est pas la question !
M. Alain Vidalies,secrétaire d'État. Si le principe demeure la fracturation de la roche-mère, l'eau est remplacée par l'heptafluoropropane, une molécule dont le potentiel de réchauffement climatique est 3 000 fois supérieur à celui du CO2. Dans une approche scientifique, c'est beaucoup plus intéressant ! Vous auriez pu le préciser...
Contrairement à l'exploitation des hydrocarbures conventionnels, il est toujours nécessaire, dans cette perspective, de multiplier les forages et les simulations pour exploiter les gaz et les pétroles de schiste. Cela augmente donc le risque de pollution du sous-sol et des nappes phréatiques.
Par ailleurs, et pour être très clair, le gaz de schiste n'entre pas, vous le savez bien, dans la logique de la transition énergétique. Le développer pourrait même aujourd'hui déstabiliser l'effet de relance économique créé par la transition énergétique.(Rires et marques d'ironie sur les travées de l'UMP.)
M. Francis Delattre. C'est une réponse à la Coluche !
M. Alain Vidalies,secrétaire d'État. À l'heure où l'on cherche à mobiliser les acteurs des filières industrielles sur les économies d'énergie et les énergies décarbonées, comme le font beaucoup d'élus locaux sur ces travées, la priorité doit être donnée à la stabilité et à la lisibilité afin que les investissements puissent être engagés.
Le lancement de l'exploration puis de l'exploitation des gaz de schiste n'aurait aucun effet économique significatif avant 2020.(Protestations sur les travées de l'UMP.) Ce n'est donc pas la réponse à l'enjeu immédiat de la relance de la croissance.
En ce qui concerne l'étude de l'ADEME que vous avez mentionnée dans votre question, il s'agit d'un travail de prospective visant à explorer la possibilité technique et économique d'un accroissement de la part des énergies renouvelables à l'horizon 2050.
Au regard de l'intérêt que vous portez à cette étude, je suppose que c'est également l'horizon auquel vous envisagez votre retour au pouvoir...(Souriressur les travées du groupe socialiste.- Rires ironiques sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Il faut conclure, monsieur le secrétaire d'État.
M. Jean-Claude Lenoir. Mais ce rapport existe ; il faut le publier !
M. Alain Vidalies,secrétaire d'État. En réalité, ce rapport n'est pas complet à ce jour et nous souhaitons qu'il soit approfondi. Une fois déposé, il sera naturellement publié, car il alimentera la réflexion du Gouvernement autour des ambitions qu'il s'est fixées.
M. Jean-Claude Lenoir. Il a été déposé !
M. Alain Vidalies,secrétaire d'État. Pour répondre très précisément à votre question, monsieur le sénateur, car c'est un vrai débat politique, je réaffirme clairement que nous sommes opposés à l'exploitation du gaz de schiste et qu'aucune autorisation ne sera délivrée en France.(Applaudissementssur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste.)
M. Jean-Claude Lenoir. Ce n'était pas la question !
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