Question de M. SIDO Bruno (Haute-Marne - UMP) publiée le 05/03/2015
M. Bruno Sido appelle l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la place de l'éducation nationale au sein du système de formation d'apprentissage, à la suite du diagnostic et des propositions de réformes établis le 19 décembre 2014 par le conseil d'analyse économique, instance rattachée au Premier ministre.
À la lecture de cette étude, comptant parmi ses coauteurs Jean Tirole, prix « Nobel » d'économie, le constat est préoccupant pour les formations de niveau V comme le certificat d'aptitude professionnelle (CAP).
En effet, de 2004 à 2010, la progression du nombre d'apprentis s'explique par l'essor de l'apprentissage dans l'enseignement supérieur : + 24 %. À l'inverse, le nombre d'entrées en apprentissage des élèves de niveau CAP diminue de 6 %.
Parmi les raisons avancées, l'apprentissage peine à être perçu comme une solution positive d'orientation. Il s'agit là d'un vrai défi que la formation des enseignants doit permettre de relever. De fait, ce sont souvent des collégiens en difficulté qui sont orientés par défaut vers l'apprentissage. Sans doute les enseignants pourraient être davantage formés à identifier les talents autres qu'académiques. Il suggère de se mettre à la place d'un apprenti en CAP qui débute sa formation et s'aperçoit de la place prépondérante conservée aux matières académiques.
Cela peut contribuer à expliquer le taux d'échec considérable, de 40 % en CAP. En somme, un apprentissage de niveau V encore trop scolaire et trop éloigné des besoins des entreprises et ce, pour deux raisons : l'insuffisante association des entreprises à la définition même des programmes et l'excessive lourdeur des procédures pour ouvrir une nouvelle formation.
Enfin, l'apprentissage implique de trop nombreux intervenants, peu ou mal coordonnés. Simplifier la gouvernance est un enjeu majeur pour gagner en efficacité et mieux comprendre qui est responsable de quoi.
Autant de raisons pour lesquelles il la remercie de lui indiquer quelles mesures concrètes elle envisage de prendre pour réduire le taux d'abandon en CAP et mieux répondre aux forts besoins du tissu économique.
- page 464
Transmise au Ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche
Réponse du Secrétariat d'État, auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification publiée le 13/05/2015
Réponse apportée en séance publique le 12/05/2015
M. Bruno Sido. Je souhaite appeler l'attention de Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur la place de l'éducation nationale au sein du système de formation par apprentissage, à la suite du diagnostic et des propositions de réformes publiés le 19 décembre 2014 par le Conseil d'analyse économique, instance placée auprès du Premier ministre.
La lecture de cette étude, dont Jean Tirole,« prix Nobel » d'économie, est l'un des auteurs, fait apparaître un constat préoccupant pour les formations de niveau V comme le certificat d'aptitude professionnelle, le fameux CAP.
En effet, de 2004 à 2010, la progression du nombre d'apprentis s'explique par l'essor de l'apprentissage dans l'enseignement supérieur : le nombre d'apprentis y a augmenté de 24 %. À l'inverse, le nombre d'entrées en apprentissage des élèves de niveau CAP a diminué de 6 %.
Pour expliquer cette situation, certains pointent le fait que l'apprentissage peine à être perçu comme une solution positive d'orientation. Il s'agit là d'un vrai défi, que la formation des enseignants doit permettre de relever. De fait, ce sont souvent des collégiens en difficulté qui sont orientés par défaut vers l'apprentissage. Sans doute les enseignants pourraient-ils être davantage formés à identifier les talents autres qu'académiques.
Mettons-nous à la place d'un apprenti en CAP qui débute sa formation et s'aperçoit que les matières académiques conservent une place prépondérante. Cela peut contribuer à expliquer le taux d'échec considérable- il est de 40 % - en CAP. En somme, l'apprentissage de niveau V est encore trop scolaire et trop éloigné des besoins des entreprises, pour deux raisons : l'insuffisante association des entreprises à la définition des programmes et l'excessive lourdeur des procédures pour ouvrir une nouvelle formation.
Enfin, l'apprentissage implique de trop nombreux intervenants, peu ou mal coordonnés. Simplifier la gouvernance est un enjeu majeur pour gagner en efficacité et mieux comprendre qui est responsable de quoi.
Dans ces conditions, je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de bien vouloir m'indiquer quelles mesures concrètes sont prévues pour réduire le taux d'abandon en CAP et mieux répondre aux forts besoins du tissu économique.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Thierry Mandon,secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification. Monsieur Sido, je vous prie d'excuser l'absence de Mme Vallaud-Belkacem, qui, vous le savez, a beaucoup à faire en ce moment et m'a donc chargé de vous répondre.
Vous l'avez souligné, l'apprentissage souffre d'un manque d'attractivité. Le ministère de l'éducation nationale agit donc pour lui redonner toute la visibilité nécessaire ; cette action est vraiment au tout premier rang de ses priorités. Ainsi, les journées d'information sur les métiers, qui précèdent les choix d'orientation, réserveront désormais une place particulière à l'apprentissage. La découverte de cette voie sera également intégrée dans le parcours individuel d'information, d'orientation et de découverte du monde économique et professionnel, le PIODMEP, à partir de la classe de cinquième. En outre, les formations en apprentissage seront intégrées dans les logiciels d'orientation post-baccalauréat. Enfin, des parcours mixtes combinant statut scolaire et apprentissage seront désormais possibles, afin d'éviter aux élèves des changements d'établissement qui pourraient les détourner de cette voie.
Toutefois, si l'information et l'orientation doivent être renforcées, il est également très important, me semble-t-il, de rapprocher l'éducation nationale du monde de l'entreprise, pour améliorer l'attractivité et la réussite des actions d'apprentissage.
De ce point de vue, le ministère de l'éducation nationale est déterminé à rendre les formations par la voie de l'apprentissage plus conformes aux attentes du monde du travail, afin de favoriser l'insertion rapide des jeunes apprentis dans le monde professionnel. Il a engagé une expérimentation avec huit branches professionnelles, afin de rénover en profondeur le processus d'élaboration des diplômes. Il sera particulièrement attentif aux filières le plus en tension, ainsi qu'aux premiers niveaux de qualification.
Enfin, pour lutter contre l'échec scolaire, qui touche plus fortement le secteur de l'apprentissage, des mesures concrètes de lutte contre le décrochage ont été mises enuvre par ce gouvernement. Une attention toute particulière est accordée au choix de l'orientation et à l'assiduité des élèves. S'agissant plus particulièrement des établissements accueillant des apprentis, ils sont encouragés à développer la mixité des publics, afin de créer une atmosphère stimulante et valorisante pour ces derniers.
Au travers de ces différentes mesures, il s'agit de mettre en uvre progressivement un plan d'action systématique, qui doit aider les élèves à s'accomplir et à se réaliser, que ce soit par la voie générale ou la voie professionnelle.
M. le président. La parole est à M. Bruno Sido.
M. Bruno Sido. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de votre réponse.
Je voudrais cependant citer quelques chiffres, qui sont accablants. Le nombre d'apprentis a baissé de 8 % en 2013, de 3 % en 2014 et de 15 % depuis le début de l'année 2015. Aussi M. le Président de la République, qui, j'en conviens, est très mobilisé sur ce sujet, a-t-il fixé un objectif de 500 000 jeunes en alternance, en affirmant que « relancer l'apprentissage, c'est relancer l'emploi, c'est réaffirmer la priorité à la jeunesse ».
Je veux également signaler que 70 % des apprentis qui vont jusqu'au bout de leur cursus trouvent un emploi dans les six mois suivant la fin de leur formation, alors que 25 % de nos jeunes sont, hélas, au chômage...
Monsieur le secrétaire d'État, vous l'avez bien compris, il s'agit non pas d'une question politicienne, mais d'une vraie question politique : comment faire pour que nos jeunes intègrent le monde du travail ? Il faut rassembler l'éducation nationale et les entreprises pour définir des programmes adaptés à des jeunes qui, s'ils ne sont pas forcément très intellectuels, sont pétris de qualités.
- page 4813
Page mise à jour le