Question de Mme ROBERT Sylvie (Ille-et-Vilaine - SOC) publiée le 20/03/2015
Question posée en séance publique le 19/03/2015
Mme Sylvie Robert. Ne plus pouvoir se soigner : d'après une étude de l'Institut de recherche et documentation en économie de la santé, un Français sur quatre a dû affronter cette accablante réalité en 2012. L'avance des frais constitue l'un des facteurs déterminants de ce renoncement aux soins.
Pourtant, en 2000, dans son rapport sur la santé dans le monde, l'OMS concluait que « la France fournit les meilleurs soins de santé généraux ». La qualité de notre système de santé ne reposait pas uniquement sur son efficience ou sur la pertinence de son organisation, mais aussi sur sa lisibilité auprès des patients et sa capacité à garantir l'égalité devant la santé.
Or, sur ce point, la dernière décennie a été dramatique : les inégalités d'accès aux soins se sont irrémédiablement creusées, accentuant les fractures sociales et fragilisant les territoires, notamment ruraux.
Dans ce contexte, la généralisation du tiers payant n'est pas seulement nécessaire ; elle est salutaire. Pour preuve, bien que leurs systèmes de santé soient singulièrement différents, vingt-quatre des vingt-huit pays de l'Union européenne se retrouvent sur une mesure, la généralisation du tiers payant, déjà appliquée, dans une large proportion, par des professionnels de santé comme les infirmiers ou les orthophonistes.
Aussi, pourquoi se dresser contre cette disposition qui apparaît si profitable à tous ?
Premièrement, mes chers collègues, l'histoire ne fournit aucun argument à lui opposer ; au contraire, elle nous rappelle que la loi fondatrice du 5 avril 1928 était un texte ouvert, laissant la possibilité d'instaurer le tiers payant.
Deuxièmement, en termes de justice sociale, cette politique épouse les principes d'une assurance maladie universelle, puisque dès lors que les cotisations sont acquittées et la maladie survenue, rien ne justifie que l'assuré ait à effectuer l'avance de frais.
Troisièmement, et enfin, le mythe de la déresponsabilisation des patients doit être battu en brèche : aucune étude au monde ne montre que le tiers payant induit une augmentation de la dépense médicale. Il ne s'agit que d'une projection fantasmée, voire irrationnelle.
M. Alain Gournac. Quelle est la question ?
Mme Sylvie Robert. En revanche, il y a bien une responsabilité politique à agir afin de combattre les inégalités insupportables d'accès aux soins dont sont victimes les plus vulnérables, inégalités qui menacent aussi les classes moyennes ; il y a une responsabilité médicale à soigner tout un chacun, indépendamment de son niveau de richesse ; surtout, il y a une responsabilité collective à améliorer notre système de soins, en vue d'assurer l'effectivité du droit à la santé, constitutionnellement garanti par le Préambule de la Constitution de 1946. (Marques d'impatience sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Sylvie Robert. Comme l'a souligné Mme la ministre de la santé, la prochaine réforme « ne se fera pas sans les médecins », car il est naturel et bénéfique que ceux-ci puissent exercer leur noble profession dans les meilleures conditions. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Posez votre question, ma chère collègue !
Mme Sylvie Robert. Ainsi, quel calendrier et quelles modalités techniques envisagez-vous pour accompagner la mise en œuvre du tiers payant, madame la ministre ? Et quelles garanties donnez-vous aux praticiens ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargé de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie publiée le 20/03/2015
Réponse apportée en séance publique le 19/03/2015
Mme Laurence Rossignol,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l'autonomie. Madame la sénatrice, vous ne pouvez plus ignorer maintenant que Marisol Touraine est actuellement à l'Assemblée nationale(Sourires.), précisément pour l'examen du projet de loi relatif à la santé, et je vous prie de bien vouloir excuser son absence.
Vous avez raison, madame la sénatrice, le tiers payant est une mesure de progrès social, car certains Français, notamment parmi les classes moyennes, renoncent à se soigner parce qu'ils ne peuvent pas faire l'avance des frais. Aucun responsable politique ne peut se satisfaire de cette situation.
Marisol Touraine a annoncé que le tiers payant serait étendu à tous les Français, par étapes, d'ici à 2017. Elle a de nouveau reçu ce matin, avec le Premier ministre, l'ensemble des syndicats représentatifs des médecins et des jeunes en formation.
Le Premier ministre a rappelé que le dispositif devait être le plus simple possible pour les professionnels et que cette fiabilité était désormais inscrite dans le texte du projet de loi, après l'adoption, cette nuit à l'Assemblée nationale, d'un amendement du Gouvernement visant à clarifier l'article du projet de loi relatif au tiers payant.
Concrètement, les professionnels ont désormais la garantie d'être payés en moins de sept jours. Et si cette garantie n'était pas respectée, l'assurance maladie leur verserait des pénalités.
S'agissant du dispositif technique qui sera mis à la disposition des médecins en 2017, le texte prévoit désormais que l'assurance maladie assume la mission générale de pilotage du déploiement et de l'application du tiers payant et que le paiement sera effectué aux médecins par un flux unique. Il s'agissait là d'une revendication extrêmement forte de leur part.
Vous le voyez, madame la sénatrice, l'action de Marisol Touraine a été claire : elle est déterminée sur l'objectif d'extension du tiers payant à tous les Français, parce que c'est juste et parce que cet objectif se trouve au cur du projet de loi ; dans le même temps, toutes les garanties de sécurité, de rapidité et de fiabilité sont assurées. C'est dans ce sens que nous entendons continuer à avancer et à travailler.(Applaudissementssur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC, du groupe écologiste et du RDSE.)
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