Question de Mme LOISIER Anne-Catherine (Côte-d'Or - UDI-UC-R) publiée le 20/03/2015

Question posée en séance publique le 19/03/2015

Mme Anne-Catherine Loisier. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget.

Monsieur le secrétaire d'État, votre gouvernement a décidé de diminuer de 11 milliards d'euros les concours financiers aux collectivités territoriales d'ici à 2017. Le bloc communal subira l'essentiel de ce prélèvement, alors qu'il réalise quelque 63 % des investissements publics locaux et qu'il ne représente que 4,1 % de la dette nationale. Sur les 3,6 milliards d'euros qui seront prélevés sur les collectivités en 2015, quelque 2 milliards d'euros seront pris sur le bloc communal, soit plus de 56 % de l'effort total.

Monsieur le secrétaire d'État, à la veille du vote des budgets des communes, cet effort sans précédent est insoutenable et injustement réparti.

Il est insoutenable, car il s'est accompagné de transferts et de charges nouvelles – réforme des rythmes scolaires, urbanisme ou revalorisation des traitements –, auxquels s'ajoutent les baisses concomitantes des aides des cofinanceurs habituels des collectivités.

L'effet de ciseau qui asphyxie aujourd'hui les collectivités risque également de produire un effet domino désastreux sur l'économie locale : les collectivités vont moins investir, elles vont même emprunter, freinant ainsi une croissance tant attendue. À titre d'exemple, alors que la dotation globale de fonctionnement d'une communauté de communes rurales de 6 000 habitants en Côte-d'Or s'élevait à 112 000 euros en 2012, elle ne sera plus que de 6 800 euros en 2017.

L'effort est également injuste, car il se traduit par une baisse de 94 % des dotations en cinq exercices budgétaires. J'aimerais savoir, monsieur le secrétaire d'État, si vous demandez de tels efforts à vos administrations !

Comme il n'est pas concevable d'augmenter les impôts locaux en proportion, il sera impossible, dès 2016, d'assurer le fonctionnement de nombreux services de proximité nécessaires aux habitants, qu'il s'agisse des crèches, des centres sociaux ou des bibliothèques.

Que doit-on fermer en votre nom et en celui de votre gouvernement, monsieur le secrétaire d'État ? (Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

À ce rythme, quel sera le visage des campagnes françaises d'ici à 2017, alors que les routes et les bâtiments ne seront plus entretenus, que les entreprises et les artisans verront leurs carnets de commandes se vider et qu'ils devront licencier, ce qu'ils font d'ailleurs déjà ?

L'avenir de la France doit se construire sur un équilibre entre les villes et les campagnes. Nos concitoyens y sont attachés. Vos décisions suscitent des interrogations sur votre vision de la France de demain.

Monsieur le secrétaire d'État, allez-vous revoir cette baisse des dotations brutale, injuste et dangereuse ? Allez-vous accompagner les communes et les intercommunalités et leur permettre d'effectuer des économies de gestion réalistes, progressives et, finalement, plus vertueuses, car elles donneront aux collectivités le temps de se réorganiser ?

Enfin, monsieur le secrétaire d'État, allez-vous abandonner la France rurale ? Et allez-vous montrer l'exemple aux Français en réformant l'État ? (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.)

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des finances et des comptes publics, chargé du budget publiée le 20/03/2015

Réponse apportée en séance publique le 19/03/2015

M. Christian Eckert,secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Madame la sénatrice, le Gouvernement est engagé dans une démarche de baisse de la dépense publique, à hauteur de 50 milliards d'euros ; Michel Sapin l'a rappelé à l'instant. Toutes les administrations publiques doivent prendre leur part dans cet effort.

Mme Annie David. Que vous avez voté, chers collègues de la majorité sénatoriale !

M. Christian Eckert,secrétaire d'État. La dépense publique locale est de 21 % de l'ensemble de la dépense publique. C'est donc un effort de réduction de 11 milliards d'euros que le Parlement, madame la sénatrice, a décidé de mettre en œuvre.

M. Alain Gournac. Pas le Sénat !

M. Christian Eckert,secrétaire d'État. Cette contribution est loin d'être insoutenable pour les collectivités, puisqu'elle ne représente que 1,9 % de leurs recettes de fonctionnement et qu'elle ne porte que sur les concours financiers de l'État. Ceux-ci représentent quelque 28 % des recettes des collectivités locales, alors que la fiscalité, qui conserve son dynamisme, en représente 60 %.

À titre d'exemple, je relève d'ailleurs que la revalorisation forfaitaire des bases votées en loi de finances initiale pour 2015 à hauteur de 0,9 % apportera quelque 520 millions d'euros de ressources fiscales supplémentaires, alors même que l'inflation sera proche de zéro cette année.

S'agissant de l'effet de la baisse des dotations sur l'investissement, nous ferons le bilan en cours d'année.

M. Philippe Dallier. Il sera alors trop tard !

M. Christian Eckert,secrétaire d'État. Néanmoins, je souligne que l'investissement public en France s'élève à 3,2 % du PIB, alors qu'en l'Allemagne, un pays souvent cité en exemple, il représente 1,6 % du PIB, soit exactement la moitié. Dans ce contexte, il y a peu de risques que cette baisse des concours de l'État remette en cause la croissance française.(Protestations sur les travées de l'UMP.)

M. Jean-Claude Lenoir. Vous vous payez de mots !

M. Christian Eckert,secrétaire d'État. Enfin, madame la sénatrice, M. le Premier ministre a rencontré récemment le vice-président, ainsi que le président de l'Association des maires de France.

M. Bruno Retailleau. Excellent président ! (Souriressur les travées de l'UMP.)

M. Christian Eckert,secrétaire d'État. Le Gouvernement s'est montré ouvert et il a été décidé, pour lever toute ambiguïté, de se donner deux mois pour dresser ensemble un constat, si possible partagé, de l'état de l'évolution des finances locales, à l'issue duquel nous tirerons des conclusions.(Exclamations sur les travées de l'UMP.)

Je le répète, des décisions ont été prises pour l'année 2015. Et pour atteindre les objectifs de diminution de la dépense publique, c'est bien la quote-part qui s'impose.

Pour conclure, vous vous demandiez si l'État s'était infligé le même traitement. Permettez-moi d'observer que, de 2013 à 2014, d'exécution à exécution, les dépenses de l'État ont baissé de 3,3 milliards d'euros.(Applaudissementssur les travées du groupe socialiste.)

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