Question de M. MADRELLE Philippe (Gironde - SOC) publiée le 19/02/2015

M. Philippe Madrelle attire l'attention de M. le secrétaire d'État, auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche sur les graves conséquences, d'ordre environnemental et économique, du projet de Réseau ferré de France (RFF) sur la commune de Sainte-Eulalie.

Commune de 5 000 habitants, située sur la rive droite de la Gironde au nord-est de Bordeaux, longée à l'ouest par l'autoroute A10 et par la voie ferrée Bordeaux/Nantes, avec trois passages à niveau sur moins d'un kilomètre, Sainte-Eulalie draine une circulation routière intense, régulièrement saturée.

Réseau ferré de France a décidé la suppression de ces passages à niveau qui seraient remplacés par un pont-rail, c'est à dire une voie routière sous une voie ferrée. Outre les difficultés de gestion de la circulation routière locale, un tel projet a des conséquences dangereuses, tant sur le plan environnemental que sur un plan socio-économique. En effet, il ne prend pas en considération la complexité du réseau d'eaux souterraines, les risques d'inondation, les risques d'expropriation et de dépréciation foncière, l'allongement des parcours domestiques et scolaires.

Les arguments mis en avant par RFF ne doivent pas empêcher la prise en considération d'un autre projet, moins onéreux et ayant l'avantage de ne présenter aucun risque pour la survie de la commune. L'abaissement ou, plus exactement, l'enfouissement du niveau de la voie ferrée, avec la réalisation d'une simple tranchée ouverte respectant le sens d'écoulement des eaux souterraines, au lieu d'un tunnel à deux modules, constitue un projet réaliste, approuvé par les associations de riverains et des scientifiques, respectant l'environnement et la sécurité non seulement des habitants de Sainte-Eulalie mais, également, de milliers d'automobilistes contraints d'emprunter et de transiter par ce nœud routier.

En conséquence, il lui demande comment peut être pris en compte et réalisé ce projet d'enfouissement, seul capable de répondre à tous les défis, tout en assurant le développement pérenne de la commune de Sainte-Eulalie.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargé des droits des femmes publiée le 25/03/2015

Réponse apportée en séance publique le 24/03/2015

M. Philippe Madrelle. Alerté depuis des années par les citoyens du collectif des associations de défense des consommateurs et usagers de la commune de Sainte-Eulalie en Gironde, notamment l'union locale de la CLCV, Consommation, logement et cadre de vie, je souhaite appeler la bienveillante attention du Gouvernement sur les graves et inquiétantes conséquences d'ordre environnemental et économique du projet de Réseau ferré de France sur cette commune.

Peuplée de 5 000 habitants, située sur la rive droite de Bordeaux, longée à l'ouest par l'autoroute A10 et par la voie ferrée Bordeaux-Nantes, avec trois passages à niveau sur moins d'un kilomètre, Sainte-Eulalie draine un trafic routier intense, régulièrement saturé.

Réseau ferré de France a décidé la suppression de ces passages à niveau, qui seraient remplacés par un pont-rail - c'est-à-dire une voie routière construite sous la voie ferrée - de gabarit et de fonctionnalité très insuffisants.

S'il venait à être réalisé, un tel projet aurait de très graves incidences sur un plan tant environnemental que socioéconomique, de même que pour la sécurité des habitants.

Il augmenterait la durée des parcours scolaires tout en accroissant les risques d'accident pour les enfants des écoles et porterait à saturation le trafic routier de ce secteur très sensible à proximité de l'autoroute A10, où transitent des milliers de véhicules.

En outre, un tel projet ne prend pas en considération la complexité du réseau d'eaux souterraines. RFF n'a même pas envisagé la répercussion qu'aurait la coupure en deux parties d'une immense masse phréatique placée à faible profondeur, mobile et amplement réactive, selon les différents rapports des techniciens du Bureau de recherches géologiques et minières, le BRGM.

La construction du pont-rail ferait barrage à toutes les eaux souterraines, avec le risque d'inondations dont les effets pourraient être dévastateurs pour les nombreux riverains.

Bien évidemment, il ne faut pas négliger les conséquences en matière d'expropriation et de dépréciation foncière : la baisse de valeur de l'immobilier pourrait atteindre près de 40 %.

Cette dépréciation affecterait également les entreprises implantées localement, ce qui aurait des incidences très négatives sur la situation de l'emploi dans des communes déjà durement affectées dans ce domaine.

Vous l'avez bien compris, madame la secrétaire d'État, ce projet de RFF ne peut être réalisé. Les arguments mis en avant par l'opérateur ne doivent pas empêcher la prise en considération et l'étude d'une autre solution, moins onéreuse et ayant l'avantage de ne présenter aucun risque pour la survie de la commune de Sainte-Eulalie.

L'enfouissement ou, plus exactement, l'abaissement du niveau de la voie ferrée avec la réalisation d'une simple tranchée ouverte respectant le sens d'écoulement des eaux souterraines, au lieu d'un tunnel à deux modules, constitue un projet réaliste, approuvé par les associations de riverains et de scientifiques.

Cette solution de l'enfouissement constitue la seule réponse hydrogéologique valable avec un gain environnemental énorme, car cela limitera la pollution liée au trafic tout en évitant l'enclavement contenu dans le projet de RFF.

Madame la secrétaire d'État, si vous m'autorisez l'expression : il n'y a pas photo entre les deux projets. Le projet d'enfouissement est le seul capable de répondre à tous les défis tout en assurant le développement pérenne de la commune de Sainte-Eulalie.

Je vous demande de bien vouloir le prendre en considération en vue de le faire adopter par RFF.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Pascale Boistard,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des droits des femmes. Monsieur le sénateur, comme vous le savez, le secrétaire d'État aux transports a fait de la sécurité du réseau ferroviaire sa priorité. C'est la raison pour laquelle, en collaboration avec l'État et les collectivités territoriales, SNCF Réseau se mobilise pour améliorer ou supprimer les passages à niveau.

C'est ainsi que l'effacement du bouchon ferroviaire de Bordeaux prévoit la suppression de trois passages à niveau situés sur la commune de Sainte-Eulalie, compte tenu de l'augmentation des circulations TER et fret sur ces voies, liée notamment à l'arrivée de la ligne à grande vitesse Sud Europe Atlantique.

Un tel projet doit être l'occasion de mener une analyse complète de la meilleure réponse à apporter, pour traiter avant tout les enjeux de sécurité, mais également pour prendre en compte les nuisances sonores et la fluidité des circulations.

C'est la raison pour laquelle SNCF Réseau, pour répondre à ces enjeux, a étudié plusieurs solutions, et notamment la dénivellation des passages à niveau ainsi que l'enfouissement des voies.

L'analyse approfondie par SNCF Réseau de l'enfouissement des voies a mis en évidence des difficultés importantes à sa mise en œuvre.

La première difficulté tient à la durée des travaux, qui s'étaleraient sur cinq ans, et à leur ampleur, alors que la dénivellation des passages existants ne nécessiterait que des travaux ponctuels sur une année.

Cette situation serait à l'origine d'une longue période de nuisances importantes pour les riverains et conduirait à des perturbations notables des circulations ferroviaires après la mise en service de la LGV, alors que celles-ci seront renforcées.

La deuxième difficulté tient aux impacts environnementaux.

Les études ont montré que l'enfouissement d'une partie de la ligne s'accompagnerait d'effets négatifs notables sur le ruisseau du Moulin, dont il viendrait rompre l'écoulement, ainsi que d'effets négatifs sur les eaux souterraines, qui seraient au mieux équivalents, mais probablement supérieurs, à ceux qu'entraînerait la simple dénivellation de ces passages à niveau.

L'enfouissement de la ligne existante nécessiterait également de recourir à des expropriations puisqu'un élargissement de l'emprise ferroviaire existante serait indispensable.

Enfin, la dernière difficulté est le coût, jusqu'à cinq fois plus élevé que celui des solutions prévoyant la dénivellation des passages à niveau.

C'est un élément important dans le contexte budgétaire particulièrement contraint que nous connaissons, tant pour l'État que pour les collectivités locales.

Toutes ces raisons ont conduit SNCF Réseau à privilégier une famille de solutions reposant sur la dénivellation de ces passages à niveau et à organiser une concertation au cours des derniers mois afin de préciser ce projet, pour répondre au mieux aux attentes.

Cette famille de solutions pourrait être complétée par la mise en place de protections phoniques, qui permettraient de réduire l'exposition au bruit des riverains, dans le respect de la réglementation.

Il n'est pas souhaitable de retarder l'échéance de suppression de ces passages à niveau, compte tenu des enjeux de sécurité.

Les échanges doivent donc se poursuivre avec SNCF Réseau afin de préciser le projet qui sera in fineprésenté lors des prochaines étapes de concertation, et en particulier lors de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique.

La justification des choix réalisés devra alors être confirmée par SNCF Réseau, sur la base de l'ensemble des propositions qui auront été formulées - y compris les nouvelles propositions comme celle que vous me présentez aujourd'hui - et des préoccupations qui auront été exprimées.

M. le président. La parole est à M. Philippe Madrelle.

M. Philippe Madrelle. Effectivement, sous mon impulsion et celle du collectif d'associations, le projet initial d'enfouissement a depuis lors évolué vers un simple abaissement de la voie ferrée, projet bien moins onéreux. Je vous remercie d'accepter que soit étudiée cette solution face au projet minimaliste de RFF, encore plus dangereux, comme je l'ai expliqué à l'instant.

Madame la secrétaire d'État, je compte sur les ministres concernés pour prendre en main ce dossier afin de faire adopter le projet d'abaissement de la voie ferrée, projet totalement différent de celui que nous avions eu l'honneur de présenter voilà quelques années.

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