Question de M. BOUTANT Michel (Charente - SOC) publiée le 15/01/2015

M. Michel Boutant attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur le problème du décalage entre perception du revenu et versement des cotisations au régime social des indépendants (RSI).

Les cotisations des travailleurs indépendants sont, souvent, difficilement compréhensibles, en raison du décalage qui existe entre la perception des revenus et le paiement des cotisations, avec son régime d'acomptes provisionnels et de régularisations.

Le revenu des artisans, en particulier, est soumis à une variabilité importante qui peut poser problème et menacer la trésorerie de certains travailleurs indépendants.

La loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014 a prévu de rapprocher la date de régularisation des cotisations sur les revenus de l'année N-1 sur l'année N, contre N-2 actuellement. De même, la régularisation intervenant sur les deux derniers mois de l'année pourra également être anticipée dès le printemps.

Néanmoins, il n'est pas certain que ces avancées puissent apporter une solution complète aux variations de revenus et encore moins aux situations de cessation d'activité.

La pratique de l'autoliquidation, de son côté, ne fait pas forcément l'unanimité. En particulier, les artisans sont inquiets de devoir faire appel aux services d'un expert-comptable et craignent une augmentation des frais. Par ailleurs, le RSI et l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss) ont exprimé l'inquiétude de voir une baisse du rendement du recouvrement, tout en soulignant la difficulté d'effectuer des contrôles.

Une solution intéressante avait été mise en avant par les rapporteurs MM. Jean-Noël Cardoux et Jean-Pierre Godefroy dans leur rapport d'information sur le RSI, déposé le 11 juin 2014 (Sénat 2013-2014. n° 597).

Il s'agit de mettre en avant le recours aux dispositions dérogatoires de l'article L. 131-6-2 du code de la sécurité sociale, permettant de calculer sur la base du revenu estimé de l'année en cours le montant des cotisations provisionnelles.

Par ailleurs, il serait également intéressant de mettre en avant la pratique du provisionnement des cotisations, permettant de lisser les variations de revenus.

Il lui demande donc ce que le Gouvernement, dans le cadre des travaux législatifs à venir, souhaite proposer pour permettre une avancée sur cette situation.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargé des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion publiée le 18/02/2015

Réponse apportée en séance publique le 17/02/2015

M. le président. La parole est à M. Claude Dilain, en remplacement de M. Michel Boutant, auteur de la question n° 991, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

M. Claude Dilain,en remplacement de M. Michel Boutant.Madame la secrétaire d'État, je vous remercie de bien vouloir excuser mon collègue Michel Boutant, qui a malheureusement été empêché de poser lui-même sa question.

Michel Boutant souhaitait attirer l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur le problème que rencontrent les professionnels affiliés au régime social des indépendants - RSI - du fait du décalage existant entre le moment où ils perçoivent leur revenu et celui où ils doivent acquitter leurs cotisations. En raison de ce décalage, il existe un régime d'acomptes provisionnels et de régularisations qui rend leurs cotisations difficilement compréhensibles.

Le revenu des artisans, en particulier, est soumis à une variabilité importante, de telle sorte que la trésorerie de certains travailleurs indépendants peut s'en trouver malmenée.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a prévu de rapprocher la date de régularisation des cotisations de l'année au titre de laquelle ces cotisations sont dues, c'est-à-dire de faire en sorte que la régularisation intervenant lors de l'année n concerne l'année n-1, au lieu de l'année n-2, comme c'est le cas actuellement. De même, la régularisation concernant les deux derniers mois de l'année pourra également être anticipée dès le printemps.

Toutefois, il n'est pas certain que ces avancées puissent apporter une solution complète en cas de fortes variations des revenus, encore moins dans les situations de cessation d'activité.

La pratique de l'autoliquidation, quant à elle, ne fait pas l'unanimité. En particulier, les artisans s'inquiètent des frais que pourrait entraîner la nécessité de faire appel aux services d'un expert-comptable. Par ailleurs, le RSI et l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l'ACOSS, craignent une baisse du rendement du recouvrement et soulignent la difficulté d'effectuer des contrôles.

Une solution intéressante a été mise en avant par MM. Jean-Noël Cardoux et Jean-Pierre Godefroy dans leur rapport d'information sur le RSI, déposé le 11 juin 2014. Il s'agirait de recourir aux dispositions dérogatoires de l'article L. 131-6-2 du code de la sécurité sociale, qui permettent de calculer le montant des cotisations provisionnelles sur la base du revenu estimé de l'année en cours.

La pratique du provisionnement des cotisations, qui permettrait de lisser les variations de revenus, offrirait peut-être également une solution intéressante.

Michel Boutant souhaite donc savoir ce qu'entend proposer le Gouvernement, dans le cadre des travaux législatifs à venir, pour réaliser une avancée à cet égard ?

Ayant été moi-même médecin libéral pendant plusieurs dizaines d'années, je peux témoigner qu'il s'agit là d'un problème très sérieux pour les professionnels affiliés au RSI.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Ségolène Neuville,secrétaire d'État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée des personnes handicapées et de la lutte contre l'exclusion. Monsieur le sénateur, le Gouvernement est particulièrement attentif à la mise en œuvre de mesures de simplification en faveur du régime social des indépendants. Par ailleurs, il est pleinement conscient des difficultés spécifiques que peuvent rencontrer certains travailleurs indépendants du fait des variations de leurs revenus dans le temps.

C'est pourquoi la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a généralisé le dispositif de régularisation anticipée, qui permet d'ajuster les cotisations provisionnelles appelées pour l'année en cours et de régulariser les cotisations de l'année précédente dès que le revenu est déclaré, sans attendre l'automne.

Cela permet aux cotisants de payer leurs cotisations provisionnelles sur le revenu de l'année n-1 au lieu de l'année n-2, donc sur une base plus proche de la réalité des revenus des entrepreneurs. Ainsi, ils peuvent ajuster plus tôt à la baisse leurs appels de cotisations si leurs revenus sont en baisse, tout comme cela leur évite de devoir verser des sommes trop importantes lors de la régularisation en cas de hausse de leurs revenus.

La régularisation anticipée permet aux entrepreneurs qui ont versé trop de cotisations provisionnelles de bénéficier au plus tôt d'un remboursement et à ceux qui doivent effectuer des versements complémentaires d'étaler ces paiements sur un plus grand nombre de mois.

Ajuster les cotisations au plus près de la réalité des revenus des entrepreneurs, limiter l'ampleur des régularisations, tels sont les objectifs de ce dispositif qui a fait ses preuves et se généralise en 2015. Les travailleurs indépendants pourront mesurer dès cette année les avantages de ce dispositif.

Michel Boutant propose d'aller plus loin aujourd'hui en généralisant, d'une part, le recours au dispositif permettant aux travailleurs indépendants d'opter pour le calcul de leurs cotisations provisionnelles sur la base du revenu estimé de l'année considérée et, d'autre part, la pratique du provisionnement des cotisations afin de lisser les variations de revenus.

Ce dernier aspect relève non pas de la responsabilité des organismes de sécurité sociale, mais bien de celle des entrepreneurs. Contraindre ces derniers à un provisionnement systématique, notamment en début d'activité, pourrait freiner leur développement. Il revient aux entrepreneurs d'apprécier la façon dont ils doivent anticiper le paiement des sommes dues lors de la régularisation dans les phases de croissance de leurs revenus.

Quant au calcul des cotisations provisionnelles sur la base du revenu estimé, il doit rester un dispositif facultatif, permettant aux travailleurs indépendants, par son caractère optionnel, d'adapter l'assiette de leurs cotisations provisionnelles en temps réel lorsque les aléas économiques l'exigent.

En effet, il convient de ne pas créer de complexité inutile pour les travailleurs indépendants dont les revenus sont plus stables ou qui ne sauraient pas procéder à une telle estimation.

Il est donc important de conserver cette possibilité- il faut aussi la faire connaître - pour les entrepreneurs pour lesquels elle est adaptée. Nous ferons ensuite le bilan des apports de la régularisation anticipée pour l'ensemble des entrepreneurs une fois que cette pratique aura été généralisée.

En résumé, le Gouvernement considère qu'il faut conserver une certaine souplesse afin que les entrepreneurs puissent choisir entre différentes possibilités.

M. le président. La parole est à M. Claude Dilain.

M. Claude Dilain. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d'État, que je transmettrai à M. Boutant.

Je sais, pour l'avoir pratiqué, que le régime en cause est extrêmement compliqué. Plus on le simplifiera, mieux cela vaudra !

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