Question de M. GENEST Jacques (Ardèche - UMP) publiée le 01/01/2015

M. Jacques Genest attire l'attention de M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique sur la situation préoccupante des 1 400 000 actifs du secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP).

En un an, l'emploi salarié y a baissé de 2 % ; l'emploi intérimaire de presque 7 % et, pour le seul mois d'octobre 2014, de 20 %.

Il précise que ces chiffres sont la conséquence d'un fait édifiant : avec seulement 300 000 mises en chantier et une baisse de 11,4 % enregistrée sur les douze derniers mois, rarement on a construit si peu de logements en France. La conjoncture ne peut seule expliquer ce phénomène. Des normes toujours plus nombreuses et des règles d'urbanisme toujours plus rigides entravent la construction, notamment en milieu rural. Les maires doivent faire face à l'incompréhension de leurs concitoyens qui voient de plus en plus de terrains classés inconstructibles. Cette situation contribue à tirer vers le haut le prix du mètre carré de terrain à bâtir, avec une augmentation de 8,8 % en 2013.

Quant à la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, elle a enlevé toute confiance aux investisseurs.

Enfin, la baisse drastique des dotations affecte les collectivités territoriales, alors que ces dernières représentent environ 70 % de l'activité des entreprises de travaux publiques.

Il rappelle qu'il a interrogé le Gouvernement lors de la séance des questions d'actualité du jeudi 27 novembre 2014, mais qu'aucune réponse ne lui a été apportée.

Il souhaite donc connaître enfin les initiatives que compte prendre le Gouvernement pour prendre les mesures urgentes qui s'imposent et faire repartir l'activité et l'emploi dans la construction.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère des finances et des comptes publics, chargé du budget publiée le 18/02/2015

Réponse apportée en séance publique le 17/02/2015

M. Jacques Genest. Ma question porte sur la situation préoccupante du secteur du bâtiment et des travaux publics et sur ses répercussions directes en matière d'emploi.

J'avais déjà interpellé le Gouvernement à ce sujet lors de la séance de questions d'actualité du jeudi 27 novembre dernier, mais Mme Delga, secrétaire d'État chargée du commerce, de l'artisanat, de la consommation et de l'économie sociale et solidaire, avait alors répondu à côté, en centrant son propos sur la crise du logement. J'espère donc, monsieur le secrétaire d'État, obtenir enfin une réponse ce matin.

En 2014, le nombre de mises en chantier de logements neufs a régressé de 10 % par rapport à 2013, pour s'établir à 297 000, ce qui est historiquement très bas. C'est dire si notre pays tourne le dos à l'objectif, affiché par le candidat François Hollande, de 500 000 nouveaux logements par an !

La conjoncture ne peut, à elle seule, expliquer cette situation. À la vérité, toujours plus de règles d'urbanisme et de normes en tout genre viennent rigidifier la législation en matière de construction ; le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, que nous examinons en ce moment, en offre de nouveaux et déplorables exemples. Il faudrait faire exactement le contraire ! Le Gouvernement serait-il insensible aux appels des chômeurs de ce secteur ?

Que dire aussi de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, véritable usine à gaz qui a fait chuter la confiance des investisseurs ? Jusqu'au sein du Gouvernement, elle ne trouve plus guère de défenseurs ! En vérité, il ne se passe pas un jour sans qu'un maire m'alerte sur un permis refusé ou sur un certificat d'urbanisme négatif.

Monsieur le secrétaire d'État, il faut absolument réduire les contraintes en assouplissant les règles d'urbanisme et en allégeant les obligations en matière de construction.

Aujourd'hui, les maires doivent faire face à l'incompréhension de leurs concitoyens, qui voient de plus en plus de terrains classés inconstructibles. Ce phénomène contribue aussi à tirer vers le haut le prix du mètre carré de terrain à bâtir : songez qu'il a augmenté de 8,8 % au cours de la seule année 2013 !

Par ailleurs, les collectivités territoriales assurant environ 70 % de l'activité des entreprises de travaux publics, la baisse des dotations que l'État leur alloue aggrave les difficultés de ce secteur.

Les conséquences de cette situation, en particulier la baisse de 12 % du nombre d'emplois dans le bâtiment et les travaux publics, sont d'autant plus préoccupantes que ce secteur joue un rôle moteur pour l'économie de notre pays. Quant aux perspectives pour 2015, les professionnels s'accordent à considérer qu'elles sont tout aussi sombres : le secteur détruira cette année quelque 30 000 emplois, soit autant que l'année dernière.

D'où, monsieur le secrétaire d'État, la question simple que je pose une nouvelle fois : quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre d'urgence pour relancer l'activité et l'emploi dans la construction ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Christian Eckert,secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget. Monsieur Genest, vous attirez l'attention du Gouvernement sur la crise du secteur du bâtiment. Nous sommes naturellement préoccupés par la situation de la construction, qui est l'un des pivots de la reprise de l'économie et de la création d'emplois.

Il faut se souvenir que, en réalité, la baisse de la construction a débuté en 2009 ; les chiffres de l'an dernier, que vous avez mentionnés, ne sont pas si éloignés de ceux de cette année-là.

Par ailleurs, les chiffres actuels doivent être analysés à la lumière de la nouvelle orientation que le Gouvernement a donnée à la politique du logement. Il s'agit, en particulier, d'opérer un rééquilibrage entre les territoires pour offrir des logements plus abordables aux endroits où les besoins sont les plus pressants. Ainsi, dans les zones tendues, la construction est plus importante aujourd'hui qu'entre 2007 et 2012.

Monsieur le sénateur, je vous assure que le Gouvernement ne minimise pas les difficultés rencontrées par le secteur, qui rejaillissent sur l'emploi, mais aussi sur les prix du marché. C'est si vrai qu'il a lancé un ambitieux plan de relance fondé sur cinq priorités.

Premièrement, nous favorisons l'accession à la propriété grâce au renforcement du prêt à taux zéro et à son ouverture à l'achat de logements anciens dans 6 000 communes rurales.

M. Jacques Genest. Le problème, c'est qu'on ne peut pas construire !

M. Christian Eckert,secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, les effets de transfert résultant de ces mesures sont loin d'être négligeables. De fait, l'insuffisante circulation dans le circuit d'occupation des locataires et des propriétaires est l'une des difficultés que nous signalent l'ensemble des gestionnaires du secteur ; il faut donc améliorer cette circulation, et nous nous y employons.

Deuxièmement, en ce qui concerne les normes, dont vous avez parlé, nous avons lancé un grand chantier de simplification des règles de construction et d'urbanisme pour abaisser les coûts, développer l'innovation et accélérer les projets. Trente-sept des soixante-dix mesures annoncées par le Premier ministre et la ministre du logement dans ce domaine sont d'ores et déjà opérationnelles.

Troisièmement, nous poursuivons le soutien de l'État à la construction de logements, y compris de logements sociaux et très sociaux. Nous avons également créé une nouvelle offre de logements intermédiaires en zone tendue et, pour la renforcer, nous faisons bénéficier ces logements d'un taux de TVA de 10 %.

Quatrièmement, nous avons intensifié la mobilisation du foncier public, dont chacun sait qu'elle est une condition de l'accélération de la construction de logements neufs.

Cinquièmement, nous soutenons la rénovation des logements, un secteur créateur d'emplois, via le crédit d'impôt pour la transition énergétique, la simplification de l'éco-prêt à taux zéro et le programme« Habiter Mieux » de l'Agence nationale de l'habitat, qui financera 45 000 projets en 2015.

Pour que ces mesures portent leurs fruits, il faut, il est vrai, encore un peu de temps ; mais le dernier trimestre de l'année dernière a vu se manifester des signes encourageants, dont la presse s'est fait l'écho ces deniers temps.

Il faut également mener un travail de pédagogie et de diffusion de l'information. C'est pourquoi Sylvia Pinel a entrepris un « tour de France de la construction », destiné à faire connaître l'ensemble des nouvelles mesures, notamment aux acteurs de la construction.

Les élus locaux doivent aussi prendre leurs responsabilités. Nous y veillerons particulièrement, au besoin en renforçant les sanctions contre les communes qui ne respectent pas leurs obligations de construction de logements sociaux au titre de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains.

M. le président. La parole est à M. Jacques Genest.

M. Jacques Genest. À en juger par votre réponse, monsieur le secrétaire d'État, et par celle que Mme Delga m'avait apportée, le Gouvernement n'a plus les pieds sur terre ! En tout cas, c'est ce que je suis conduit à penser.

Voyez les ruraux : ils ne peuvent plus construire et se sentent ignorés, ce qui est encore pire qu'être méprisés ; ce sentiment, qui s'exprime à chaque élection, on le perçoit tous les jours dans le monde rural. Monsieur le secrétaire d'État, pour conjurer la menace, qui est grande, il faut donner de la liberté à la ruralité !

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