Question de Mme ARCHIMBAUD Aline (Seine-Saint-Denis - ECOLO) publiée le 25/12/2014

Mme Aline Archimbaud interpelle Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie au sujet du sort du cargo roulier « Cosette ».

Alors qu'il devait se rendre en Haïti à la suite du séisme, en janvier 2010, une décision de justice, intervenue au moment où le navire faisait escale au port de Fort-de-France l'avait bloqué sur place, après une procédure intentée par deux créanciers américains du bateau. L'État, tout comme le Grand port, n'avaient alors eu d'autre choix que de garder le navire à quai, mais a cherché à faire récupérer le « Cosette ». En vain. En 2012, il a changé de stratégie et lancé une procédure de déchéance de propriété, condition obligatoire pour pouvoir intervenir. Cette procédure a pris beaucoup de temps, pour n'aboutir que le 1er novembre 2014, à un moment où l'état de l'épave était devenu très inquiétant. Quelques jours plus tard, faisant suite à l'aggravation des infiltrations d'eau constatées sur le « Cosette », le préfet a pris la décision de faire couler le navire au large de la côte Caraïbe, alors que le ministère annonçait, la veille encore, sa volonté de convoyer le bateau jusqu'en métropole, pour qu'il y soit déconstruit. L'expert maritime, mandaté par le Grand port pour contrôler l'état de dépollution du navire, affirme, avec certitude, qu'il n'y a plus rien de nocif sur ce bateau.

Cependant, de nombreuses associations et des élus locaux s'inquiètent. Les marins-pêcheurs du Nord-Caraïbe, déjà très impactés par le drame du chlordécone, sont également très préoccupés et affirment que, là aussi, les conséquences négatives de cette décision pourraient apparaître à long terme.

Elle lui demande donc si elle peut prescrire une enquête indépendante pour que la lumière soit faite sur le sujet.

Pour éviter que ce genre de problématique ne survienne à l'avenir, elle lui demande, en outre, quelles décisions elle pense pouvoir prendre en vue de développer, sans délai, les capacités de démantèlement des bateaux de commerce, de pêche, de servitude et de plaisance hors d'usage sur les villes de Martinique et de Guadeloupe et, plus généralement, de tous les véhicules et bâtiments résidentiels ou industriels hors d'usage, notamment après les épisodes cycloniques.

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Réponse du Secrétariat d'État, auprès du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche publiée le 11/03/2015

Réponse apportée en séance publique le 10/03/2015

Mme Aline Archimbaud. Alors que le cargo roulier Cosette se rendait à Haïti à la suite du séisme de janvier 2010, il a été bloqué à Fort-de-France lors de son escale, après une procédure intentée par deux créanciers américains du bateau. L'État tout comme le Grand Port de Martinique n'ont eu d'autre choix que de garder le navire à quai, tout en cherchant à le faire récupérer, mais en vain.

En 2012, l'État a changé de stratégie et lancé une procédure de déchéance de propriété, condition obligatoire pour pouvoir intervenir. Cette procédure a pris beaucoup de temps, pour n'aboutir que le 1er novembre 2014, à un moment où l'état de l'épave était devenu très inquiétant. Quelques jours plus tard, le 4 novembre, faisant suite à l'aggravation des infiltrations d'eau constatées sur le Cosette, le préfet a pris la décision de faire couler le cargo au large de la côte Caraïbe, alors qu'il était annoncé, la veille encore, la volonté de convoyer le bateau jusqu'en métropole pour qu'il y soit déconstruit.

L'expert maritime, mandaté par le Grand Port pour contrôler l'état de dépollution du navire, a affirmé avec certitude « qu'il n'y avait plus rien de nocif sur ce bateau ». Cependant, de nombreuses associations et des élus locaux s'inquiètent. Les marins pêcheurs du nord de la région Caraïbe, déjà très impactés par le drame du chlordécone, sont également très préoccupés et affirment que, là aussi, les conséquences négatives de cette décision pourraient se manifester à long terme : pollution, dégâts dans la biodiversité de la faune et de la flore...

Le Gouvernement peut-il prescrire une enquête indépendante pour que la lumière soit faite sur le sujet ? Pour éviter que ce genre de problème ne se reproduise à l'avenir, quelles décisions pense-t-il prendre pour développer sans délai les capacités de démantèlement des bateaux de commerce, de pêche, de servitude et de plaisance hors d'usage sur les territoires de Martinique et de Guadeloupe et, plus généralement, de tous les véhicules, bâtiments résidentiels ou industriels hors d'usage, notamment après les épisodes cycloniques ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Madame la sénatrice, vous avez interrogé Mme Ségolène Royal, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie. Ne pouvant être présente, elle m'a chargé de vous répondre, et je vous prie de bien vouloir l'excuser.

Le Cosette est ce navire roulier dont l'armateur peu scrupuleux s'est débarrassé en 2010 dans un port français, en l'occurrence en Martinique. Les autorités françaises ont d'abord veillé à ce que son équipage reçoive les moyens de subsistance nécessaires et puisse regagner son pays lorsqu'il est apparu que l'armateur n'assumerait plus ses responsabilités.

Depuis 2010, les procédures ont été longues et les mises en demeure du propriétaire nombreuses. Une procédure de saisie-vente a été engagée par les créanciers du navire. Elle s'est soldée par un échec.

L'État a finalement prononcé la déchéance de propriété, ce qui a permis d'envisager des solutions pour le traitement du navire. Plusieurs solutions ont été sérieusement étudiées : la vente en vue d'une transformation, un éventuel démantèlement sur place, qui s'est avéré impossible, ou encore un remorquage vers la métropole en vue d'un démantèlement, qui était la solution préconisée. L'immersion du navire n'était qu'une hypothèse de dernier recours.

La dégradation de l'état du navire, qui menaçait de couler dans le port, a conduit le préfet à procéder à l'immersion du navire au large, dans les conditions prévues par les conventions internationales. C'est le cas de force majeure qui a prévalu. Ainsi, même si ce n'était pas la solution privilégiée par les services de l'État, le Cosette a dû être immergé à 2 700 mètres de fond, à 14 milles nautiques de la Martinique, soit plus de 25 kilomètres des côtes.

Cette solution de dernier recours ne saurait être généralisée. La justice a été saisie par diverses associations et se prononcera donc sur ce dossier.

Avant cela, le Cosette, qui avait une activité marchande classique et ne transportait plus de déchets toxiques depuis 1988, a été débarrassé de son carburant, de ses huiles et de ses batteries, qui sont les polluants les plus importants. En outre, il n'y avait plus aucune cargaison à bord. Ces deux points sont attestés par l'expert indépendant missionné par le Grand Port maritime de la Martinique, dans un rapport que le préfet de la Martinique, dans un souci de transparence, a mis en consultation publique.

Enfin, afin de protéger les mammifères marins de l'aire Agoa, des mesures d'effarouchement ont été prises avant de procéder à l'immersion.

Sachez que Mme Ségolène Royal et moi-même partageons votre préoccupation de créer une filière de démantèlement aux Antilles françaises, et nous serons attentifs aux initiatives qui se feront jour.

M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud.

Mme Aline Archimbaud. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de cette réponse précise.

J'ai bien entendu qu'une expertise indépendante a indiqué qu'il n'y avait plus de déchets toxiques à bord et que l'État était dans une situation d'urgence. J'ai également entendu que le Gouvernement était favorable à la création d'une filière de déconstruction sur place.

La création de cette filière me paraît particulièrement importante dans ces territoires très éloignés de la métropole. Outre le démantèlement des bateaux et d'autres véhicules, elle permettrait de traiter les déchets en général, ce qui serait bénéfique à la protection de l'environnement et favoriserait la création d'emplois sur place. Il serait donc intéressant de voir avec les partenaires économiques et sociaux ainsi qu'avec les élus locaux comment une telle filière pourrait être mise en œuvre, d'autant qu'il est très probable que la question se repose à nouveau. Nous devons donc anticiper si nous ne voulons pas avoir à résoudre les problèmes dans l'urgence.

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